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La sixte napolitaine. Explication.

En musique, qu’est ce qu’une sixte napolitaine?

La réponse : un second degré rabaissé présenté en accord de sixte.

Explication

Tout d’abord il faut savoir que la musique occidentale est basée sur les enchaînements d’accords. Ces accords sont construits à partir d’une gamme. La gamme qui a servi de base à notre musique dite classique pendant plus de deux siècles est le mode ionien ou gamme de do majeur. Elle constitue le fondement de la musique  tonale, qui s’est épanouie  du début du 17eme siècle au début du 20eme. Il existe dans le système tonal deux type de gammes : les gammes majeures et les gammes mineures. Voici deux exemples ; la gamme de do majeur et son homonyme, la gamme de do mineur.

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Cette gamme est constituée de degrés, au même titre qu’une échelle. D’ailleurs lorsque l’on parle de gamme, le terme d’échelle est aussi très souvent utilisé.

A partir de cette gamme, on va construire des accords parfaits qui correspondent à chacun de ses degrés. Pour construire un accord parfait, il suffit d’empiler des notes à distance de tierce les unes des autres. (Domi, mi fa sol, etc..). 

Exemple ci dessous : les accords parfaits de tonique, second degré et dominante.

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Enchaînement qui n’est pas sans évoquer une célèbre pièce pour piano de Debussy..

Un enchaînement entre les premier et cinquième degrés avec retour sur le premier peut servir à terminer un morceau de musique. On le nomme cadence parfaite. Lorsque l’on prend un temps d’arrêt sur la dominante, on appelle cela une demi-cadence. La musique est alors en suspension.

Exemples ci dessous : une demi cadence suivie d’une cadence parfaite. Dans cet exemple, l’accord de sol (V) est présenté avec une septième, à savoir un fa. Il en sera de même pour les exemples suivants. 

 

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Il existe un degré qui amène très souvent l’accord de dominante. Il s’agit du second degré de la gamme. Pour quelle raison? Cela est très logique. Lorsque l’on est dans le ton de la dominante, on s’aperçoit que le cinquième degré est en fait le second de la tonalité d’origine. Explication ci dessous.

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En ce qui concerne la sixte napolitaine, c’est ce second degré qui va nous intéresser ici. En jargon musical,il existe un terme que l’on utilise souvent, c’est le 1-2-5-1. Cela signifie que l’on donne à entendre un enchaînement d’accords qui part du premier degré (la tonique) pour aller sur le second degré puis le cinquième (la dominante) pour enfin se résoudre sur un retour au premier degré. Il existe plusieurs manières de présenter un 1-2-5-1. En voici quelques exemples dans lesquels pour des raisons de clarté seul le second degré est présenté différemment à chaque fois. Il va de soi que les possibilités sont multiples, et que cette multiplicité va s’accroître avec les différentes manières de présenter chaque accord.

Exemples d’enchaînements 2-5-1 en tonalité majeure

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Exemples d’enchaînements 1-2-5-1 en tonalité mineure

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Dans le cas de la sixte napolitaine, le second degré se trouve rabaissé d’un demi ton, pour des raisons expressives. Exemple: en do, le second degré est la note ré. Pour obtenir un second degré rabaissé, on va donc faire entendre un ré bémol. Voici un exemple d’enchaînement  1-2-5-1, tout d’abord sans puis avec sixte napolitaine, en tonalité majeure puis mineure. Le ré bémol est dans la voix du haut.

Exemples d’enchaînements 2-5-1 avec sixte napolitaine

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Il faut maintenant donner une explication supplémentaire. En effet, pourquoi ce terme de sixte ? Tout simplement parce que l’accord de second degré rabaissé est présenté dans son premier renversement.

Les choses se compliquent..

Mais cela est en fait assez simple. Il faut savoir qu’un accord parfait peut être joué de trois manières différentes : état fondamental suivi de deux renversements. Prenons comme exemple l’accord de base, c’est à dire do majeur. On peut le présenter ainsi : do-mi-sol, mi-sol-do et sol-do-mi,.et chacune de ces présentations  peut se chiffrer. A l’état fondamental (do-mi-sol), on parle d’accord de quinte car on entend l’intervalle do (ré mi fa) sol, intervalle compris entre cinq notes. Dans le premier renversement (mi-sol-do), on parle d’accord de sixte car on entend l’intervalle mi (fa sol la si) do, intervalle compris entre six notes. (Pour des raisons de clarté, laissons de côté le second renversement, même s’il figure sur l’exemple ci-dessous).

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Dans le cas de la sixte napolitaine, c’est donc le premier renversement qui est concerné. En do, l’accord de second degré est donc un accord de ré (ré-fa-la). Si on le baisse d’un demi-ton, on va obtenir un accord de ré bémol (ré bémol-fa-la bémol). Pour avoir enfin cette sixte napolitaine, on va présenter cet accord de ré bémol dans son premier renversement. (fa-la bémol-ré bémol). Exemple ci-dessous.

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Dans le cas de l’enchaînement 2-5-1 avec sixte napolitaine, le second degré rabaissé est donc présenté en premier renversement. (Accord de sixte).

Une dernière précision 

Il est très fréquent que l’accord de sixte napolitaine mène à un accord de premier degré dans son deuxième renversement, que l’on appelle la quarte et sixte. Voici deux exemples, en tonalité majeure puis mineure.

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Exemples d’utilisation de la sixte napolitaine.

Le premier est extrait de l’opéra Don Giovanni de Mozart. Pendant le deuxième acte, lors du septuor, Donna Anna dit à Don Ottavio son désir de vengeance, en une magnifique phrase dont voici la partie finale. (Ne pas hésiter bien entendu à écouter l’original). Cette phrase se termine en ut mineur avec une sixte napolitaine particulièrement parlante.

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Si l’on regarde bien, Mozart propose déjà l’accord dans les mesures qui précèdent. Essayez de le retrouver!

Un autre exemple, extrêmement connu : La chanson du « Toréador » de Carmen de Georges Bizet. En voici l’introduction. Ont été supprimées pour des raisons de clarté les notes ornementales.

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Enfin, un troisième exemple, fameux lui aussi, extrait de « La Danza » de Rossini:

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Comme on peut le constater, l’enchaînement 1-2-5-1 avec sixte napolitaine est particulièrement expressif. Mozart et Schubert, pour ne citer qu’eux, en offrent de nombreux exemples mais ils ne sont pas les seuls. Il faut pouvoir reconnaître cet enchaînement à l’écoute. Pour indice, il est souvent proposé à la fin d’une phrase.

Bonne découverte!