• Accueil
  • Bienvenue
  • Mentions légales

marenzo ars musica

~ un site consacré à la musique, analyse musicale, concerts, composition.

marenzo ars musica

Archives de Catégorie: Cours

Le rapport texte-musique.

23 mercredi Jan 2019

Posted by Pascal Rabatti in Cours, Non classé

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

le figuralisme en musique, Le rapport texte-musique, texte et musique

Cette thématique concerne toute œuvre musicale faisant appel à un texte, avec ou non présence de celui-ci. Les exemples à étudier peuvent être puisés dans l’opéra, la musique religieuse, le lied (pièce vocale allemande consistant en la mise en musique d’un poème), la mélodie (équivalent français du lied) la chanson. 

Dans le cas d’une absence de texte, il existe de très nombreuses œuvres pour orchestre avec support littéraire. Ce sont des œuvres de musique à programme (musique descriptive) appelées poèmes symphoniques. Parmi les plus fameux : Mazeppa, de Franz Liszt, d’après un poème de Victor Hugo, et Ainsi parlait Zarathoustra de Richard Strauss, d’après l’œuvre de Nietszche, ceci pour ne citer que deux exemples.

Cet article ne traitera en revanche que des oeuvres musicales avec présence de texte.

Il existe plusieurs manières d’illustrer un texte par la musique.

Quand un compositeur met en musique un texte, il va en souligner le sens par différents moyens.

–Rapport entre texte et ligne mélodique : 

le figuralisme

Un figuralisme est une représentation, parfois au premier degré, des idées littéraires par la musique. Les figuralismes sont très présents dans la musique religieuse, l’opéra et certaines chansons. Cette notion s’est affirmée durant le 16eme siècle, notamment grâce au madrigal italien. Ce que l’on a appelé madrigalisme est en effet une imitation du mot par la musique, qui peut se faire de différentes manières:

-D’un point de vue symbolique tout d’abord. Par exemple, pour décrire le ciel, une mélodie peut monter dans l’aigu. Pour décrire la terre, elle peut descendre. En témoigne l’exemple suivant, dans le thème principal du Libera me du Requiem de Gabriel Fauré. 

Cette image a un attribut alt vide ; son nom de fichier est libera-me-1.jpg

Comme autre exemple, on pourrait citer l’air du catalogue de l’opéra Don Giovanni de Mozart, au moment où Leporello évoque deux types de femme, la petite et la grande. « La piccina » est dit en valeurs très brèves, « la granda maestosa » en valeurs longues. Le figuralisme rajoute ici au côté burlesque de la scène.

Henry Purcell, dans une pièce intitulée Hear my prayer, (Hear my prayer oh Lord and let my crying come unto thee : entends ma prière oh Seigneur et laisse mes pleurs venir à Toi), illustre son texte de la manière suivante:

Hear my prayer: mélodie rectotonale, supplication psalmodique.

My crying: « mes pleurs » est évoqué par une ligne torturée hésitant entre si bémol et si bécarre.

Enfin l’idée globale du texte (laisse mes pleurs venir à Toi), est évoquée par une ligne mélodique ascendante.

Ecoutons cette (trop) brève pièce dans son intégralité. L’ensemble est une polyphonie vocale à huit voix qui monte progressivement vers un climax (sommet expressif), véritable architecture sonore qui pourrait évoquer les coupoles de certains édifices religieux, qui portent toujours le regard vers le point central où siège la lumière. Cette montée progressive rend ici compte du sens global du texte.

Comme dernier exemple, restons avec Henry Purcell dans une autre polyphonie vocale, Man that is born of a woman, pièce extraite de la musique pour les funérailles de la reine Mary. Dans la seconde partie, les ténors énoncent:

He cometh up (il grandit): ligne mélodique ascendante.

And is cut down like a flower (et est fauché comme une fleur): ligne mélodique descendante.

Concernant le symbolisme musical, il va de soi qu’il en existe une infinité d’exemples. Il suffit d’en comprendre le principe pour pouvoir remarquer ce procédé dans d’autres partitions. 

Dans cette pièce, l’écriture participe également à l’évocation du texte. En effet, lorsque le choeur entonne la phrase: « he fleeth as it were a shadow, and never continueth ». (Il fuit comme s’il était une ombre et ne se maintient jamais en un séjour), le contrepoint se resserre, en donnant l’impression d’une fuite perpétuelle ne trouvant sa résolution que dans l’accord final. Nous sommes ici en présence d’une métaphore musicale, qui donne un rapport très profond entre texte et musique.

La métaphore est un procédé sans doute plus abstrait que le symbolisme. Une dissonance, par exemple, peut traduire la souffrance. Pour illustrer cette idée, je propose un extrait de la cantate 137 de Bach. Aus der Tiefe rufe ich Herr zu Dir. (De l’abîme, je crie Seigneur vers toi).

Après une évocation symbolique de l’abîme, avec une ligne vocale qui part de l’aigu pour chuter vers le grave, (aus der Tiefe), l’expression « je crie » (rufe ich) est illustrée par un retard, une dissonance qui par la tension qu’elle génère va participer de manière très subtile à une évocation en profondeur du sens de ce texte.

Ce procédé se retrouve dans la pièce de Purcell citée plus haut, (Hear my prayer), avec un accord dissonant à chaque apparition du mot « crying ».

–Rapport entre texte et harmonie.

Un accord, une succession harmonique peuvent à leur tour souligner une idée littéraire. Une modulation (changement de tonalité) peut renforcer un sentiment ou une situation. L’arrivée d’un nouveau personnage sur scène, par exemple, peut être marquée par un changement de tonalité.

En voici un magnifique exemple, avec une modulation par enharmonie dans le septuor du deuxième acte de Don Giovanni. Pour résumer la scène, Leporello cherche à s’enfuir. Il trouve une porte dans l’obscurité et va pour l’ouvrir. Cependant cette porte s’ouvre sur Don Ottavio et Donna Anna. La musique va ainsi moduler de façon très surprenante de si bémol majeur vers ré majeur, modifiant totalement l’éclairage de la scène.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2019/01/septuor-dg-1.mp3

Cette image a un attribut alt vide ; son nom de fichier est septuor-dg..jpg

-Rapport entre texte et rythme.

Une mesure, une cellule rythmique peuvent également être en adéquation avec un texte. Pour reprendre le Libera me de Fauré, on trouve au début un rythme obstiné (noire-noire-soupir-noire, décomposition de ce qui pourrait être un rythme iambique, une longue suivie d’une brève) qui donne à la musique un caractère très sombre et implacable.

–Rapport entre texte et orchestration. 

Une phrase jouée par un hautbois n’évoquera pas les mêmes sentiments qu’une phrase de flûte, clarinette, basson, etc.. Dans un opéra, l’orchestration tient une très grande place. Bizet, comme Mozart, associe par exemple la flûte traversière à l’idée de la séduction. Il est fréquent aussi qu’une voix aigüe se trouve doublée par un instrument grave, le contraire étant valable. 

Dans cette rubrique, les modes de jeu instrumentaux sont également à considérer avec attention. Un trémolo de cordes dans un opéra sera toujours synonyme de situation tendue, d’incertitude. Des pizzicati de basses posent le discours.

Dans un opéra, l’arrivée d’un personnage marquant est généralement accompagnée par une instrumentation spécifique. Voyez par exemple la véritable trouvaille orchestrale qui marque l’arrivée du grand inquisiteur dans l’opéra Don Carlos de Verdi.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/12/Don-Carlos.-1.mp3

Un mélange des timbres les plus graves de l’orchestre (contrebasses, violoncelles, contrebasson et basson) sur un motif pesant de marche lente, soutenu par des accords aux trombones. La musique est ici lourde de sens, inquiétante et caverneuse, dans la tonalité de fa mineur.

-Rapport entre texte et type d’écriture. Ecriture horizontale, verticale. (Notion déjà entrevue plus haut avec la deuxième pièce de Purcell).

Prenons comme exemple une chanson polyphonique de la renaissance: La Guerre de Clément Janequin. Dans cette chanson, l’écriture peut être horizontale, verticale, très dense, plus dépouillée, dépendante du sens du texte et de ce que veut en faire comprendre le compositeur. Ecoutons les King’s Singers.

Le premier mot, « écoutez! » est tout d’abord lancé comme un appel, mélangé entre les différentes voix par une entrée en imitations dans la tonalité très claire de fa majeur. (Certaines versions de cette chanson sont en la).

Certains mots sont dits en homorythmie. « Aventuriers, bons compagnons, ensemble croisez vos bâtons ». En jeu de réponse entre deux groupes de chanteurs et en mesure ternaire très entraînante, dynamique et d’esprit guerrier. Cette mesure ternaire se retrouvera d’ailleurs à la fin de la chanson lors de la victoire, alors que les chanteurs disent « ils sont perdus ».

 « Et orrez si bien écoutez les coups ruez de tous côtés ». Les mots « de tout côtés » se trouvent répétés en écho par le groupe de chanteurs, de tous les côtés de l’ensemble vocal, dans un esprit figuraliste.

« La fleur de lys, fleur de haut prix, y est en personne », chanté par le ténor et accompagné par une polyphonie claire. Il va de soi que le compositeur cherche ici à flatter le monarque et qu’il désire que son texte soit compris, c’est pourquoi Janequin cherche ici à rendre le texte bien intelligible. La ligne mélodique est d’ailleurs à ce moment très caressante. (Dans le même ordre d’idée, il insiste aussi au début de la chanson sur les mots « du noble Roy François »).

Dans la seconde partie, le vacarme et la pagaille du champ de bataille sont rendus par une polyphonie en revanche très dense, avec de nombreuses onomatopées, imitant la charge des chevaux, les bombardes, les clairons et les armes qui s’entrechoquent.

La musique cherche à créer des images fortes. Il s’agit d’une véritable fresque sonore qui fait revivre au roi la victoire qu’il a obtenue sur les milanais à Marignan en 1515, et tous les moyens vocaux sont ici employés dans ce but.

Dans cette version, il faut apprécier comment les King’s Singers rendent la charge avant le fracas final, (sur les onomatopées « vom, vom, patipatoc »), en un accelerando qui laisse pantois. On ne peut être qu’admiratif devant tant de virtuosité et d’aisance.

Cette chanson de Janequin fut dit-on à son époque une oeuvre extrêmement célèbre. Le compositeur était, et reste toujours, considéré comme l’un des plus grands de son temps, en particulier dans le domaine de la chanson imitative que l’on peut assimiler à la chanson de gestes.

A la fin de la chanson, c’est le mot « Victoire » qui sera lancé dans le même esprit que le mot « écoutez », au début de la pièce, terminant la pièce en apothéose.

Trois liens pour davantage de précisions sur cette oeuvre:

Clément Janequin – La Guerre (ca. 1530)

http://www.tard-bourrichon.fr/musique%20JANEQUIN%20Bataille.html

 » LA GUERRE « , de Clément Janequin.

Voici donc quelques exemples qui peuvent étayer une argumentation sur la thématique du rapport entre texte et musique. Il s’agit d’un domaine très vaste, mais dans lequel de nombreuses manières de procéder se retrouvent. A l’auditeur de pouvoir les appliquer.

Nota bene

Concernant le rapport texte-musique, il existe sur ce même site trois articles qui parlent de ce thème à travers des oeuvres précises et que l’on peut consulter grâce aux liens suivants:

https://marenzo-ars-musica.com/2017/05/14/premiere-scene-de-lopera-dramma-giocoso-en-francais-drame-joyeux-don-giovanni-de-mozart/

Le rapport texte-musique dans le Concerto Duo seraphim extrait des Vêpres de Claudio Monteverdi

https://marenzo-ars-musica.com/category/analyses-musicales/le-voyage-dhiver-de-schubert/

Voici également un lien vers un site intéressant:

http://musique.tice.ac-orleans-tours.fr/php5/site/rapports_texte.htm

La fugue. Cours donné dans le cadre d’une option musique en lycée.

21 vendredi Sep 2018

Posted by Pascal Rabatti in Cours

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

évolution de la fugue, de Bach à Bartok

Une fugue est une pièce musicale généralement à thème unique (mais nous verrons que cela n’est pas toujours le cas), basée sur le principe des entrées en imitations et sur l’écriture contrapuntique. Une fugue est donc une pièce toujours polyphonique, dont le nombre de voix peut aller de deux à six.

Pourquoi ce terme de fugue ? Ce mot contient l’idée de fuite, cette impression étant donnée par le jeu des voix entre elles, qui se répondent sans cesse, qui dialoguent en s’échangeant notamment le thème (appelé sujet) et différents motifs, ceci jusqu’à l’accord final.

Quelques définitions

-Contrepoint : technique d’écriture musicale difficile et complexe qui consiste à superposer différentes lignes mélodiques. L’écriture contrapuntique est également appelée écriture horizontale.

-Entrée en imitations : entrée successive de différentes voix dont chacune reprend ce qu’a dit la précédente. C’est le principe de ce que l’on appelle le canon. Il ne faut cependant pas confondre une entrée de fugue avec une entrée en canon, nous verrons pourquoi par la suite.

-Polyphonie : superposition de différentes voix. La polyphonie rejoint bien entendu l’écriture contrapuntique, mais une pièce polyphonique peut également être non contrapuntique, dans le cas d’une écriture en accords (écriture verticale).

Les compositeurs qui illustrent l’écriture fuguée

Commençons par un lieu commun : Jean Sébastien Bach est considéré comme le maître absolu en la matière. Nous n’insisterons pas trop là dessus, cependant nous puiserons chez lui de nombreux exemples, ce qui semble inévitable dans la mesure où l’écriture fuguée a été pour Bach le creuset dans lequel il a accompli ses prouesses contrapuntiques les plus vertigineuses.

Avant Bach, Buxtehude, après lui, Mozart, contrapuntiste hors pair qui utilisera la fugue notamment dans sa musique religieuse et également dans l’ouverture de la Flûte Enchantée. Mozart compose également un Adagio et fugue en ut mineur  pour cordes. Il a aussi réalisé des arrangements pour quatuor à cordes de fugues de Bach extraites du Clavier bien Tempéré. Beethoven utilise la fugue dans certains quatuors, et propose une entrée fuguée dans un passage de sa 5eme symphonie. Berlioz, également excellent contrapuntiste, utilise l’écriture fuguée dans son Te Deum, dans le dernier mouvement de la Symphonie Fantastique et dans la Damnation de Faust, dans une fugue parodique lors de la scène de la taverne. Dans son opéra Carmen, Bizet fait entendre une entrée fuguée à la fin du premier acte, alors que Carmen va s’enfuir (rapport texte musique intéressant). Au XXeme siècle Bela Bartok compose une magistrale fugue atonale à 6 voix pour ouvrir Musique pour cordes, percussions et célesta . Dmitri Chostakovich compose quant à lui 24 préludes et fugues pour piano, en hommage vraisemblablement à Bach.

Il ne s’agit pas ici de fournir une liste exhaustive mais de donner quelques exemples, sur lesquels nous reviendrons par la suite.

Deux précisions nécessaires

Il ne faut donc pas confondre fugue et canon. Dans un canon en effet, les différentes voix font rigoureusement la même chose de manière décalée. Dans une fugue, après son entrée, chaque voix suit son chemin propre. Cependant on peut dire que le canon est à l’origine de la fugue. L’entrée en imitations est en effet un procédé extrêmement ancien. En témoigne cette pièce en canon strict de Guillaume de Machault (14eme siècle):

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/canon-Machault-2.mp3

Il est fréquent que la fugue soit présentée comme une forme musicale. C’est une erreur. La fugue n’est pas une forme mais un procédé d’écriture. Les formes musicales telles que forme ABA, forme sonate, forme rondo, sont des cadres immuables dans lesquels se fond l’inspiration du compositeur. La fugue est avant tout une manière de concevoir l’écriture. Il n’y a pas deux fugues qui se ressemblent, hormis les principes de composition cités plus haut. On ne peut en aucun cas parler de « forme fugue ». (Cela sonne d’ailleurs très mal, comme une mauvaise dissonance).

Exemples et analyses.

Premier exemple : fugue en ut mineur de Bach, extraite du clavier bien tempéré volume 2. Cette pièce possède l’avantage d’être très claire, et surtout très belle. Elle est ici précédée d’un prélude et se trouve sur cet enregistrement à 1’39 ».

fugue ut m 1.jpg

fugue ut m 2.jpg

Quelques détails sur cette pièce.

Pour commencer voici le thème au début, exposé par la première voix. Ce thème est appelé le sujet de la fugue.  Exemple 1:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/le-sujet-ex1-1.mp3

le sujet ex1.jpg

A la mesure 2, la seconde voix donne ce que l’on appelle la réponse, c’est à dire le sujet mais transposé une quarte au dessus, ici dans le ton de sol, dominante de do. Exemple 2:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/rc3a9ponse-ex-2-1.mp3

réponse ex 2..jpg

Cependant que la première voix continue avec ce que l’on appellera le contresujet. Voici les deux voix en même temps. Exemple 3:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/2-voix-dc3a9but-ex-3.mp3

2 voix début ex3.jpg

Il s’ensuit un bref passage d’une mesure, donnant la part belle aux retards. exemple 4

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/ex3-mesure-3.mp3

ex 3 mes 3.jpg

Puis la main gauche entonne le sujet mesure 4. Exemple 5:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/ex4-entrc3a9e-basse.mp3

ex4 entr basse.jpg

Trois voix sont entrées en jeu. Les deux mesures qui vont suivre donnent alors à entendre un moment plus libre. Exemple 6:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/div-1.mp3

div 1.jpg

Une fugue comporte toujours une alternance entre des moment d’écriture rigoureuse et des moments plus libres que l’on nomme divertissements.

Concernant le début de la pièce on constate que le sujet se trouve exposé dans le ton principal alors que la réponse est dite dans le ton de la dominante. Ce balancement entre les deux degrés contribue à relancer la musique pour lui donner son élan.

Ecoute globale de la fugue. 

A partir de maintenant, réécoutez la pièce en essayant de retrouver le sujet ou sa réponse disséminés dans les autres voix. Ils apparaissent régulièrement et plusieurs écoutes seront nécessaires avant de tout percevoir.

                                                 ________________________________________

Je souhaiterais insister sur un passage situé en bas de la première page, au cinquième système. Exemple 7:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/bas-page-1.mp3

bas page 1.jpg

En quoi ce passage est-il remarquable? Si l’on regarde bien, la voix du haut (en noir ici) donne le sujet. La voix intermédiaire (ici en rouge) donne ce même sujet mais en valeurs plus longues, c’est à dire en augmentation. Enfin la ligne de basse (ici en vert) joue le sujet inversé, comme une image que l’on regarderait dans un miroir.

Dans ce passage, qui reste une très belle combinaison des voix, Bach se permet tout de même une faute de contrepoint, avec une octave par mouvement direct dans la première mesure. Elle est ci-dessous soulignée en bleu (ex 8). Il faut savoir que l’apprentissage du contrepoint nécessite la connaissance de règles très strictes, et qu’arriver sur une octave (ou une quinte), ne peut se faire suivant ces règles que par mouvement contraire. Or, ici, les deux voix montent ensemble sur cette note fa. L’apparition du thème en valeurs augmentées peut justifier cette faute, même s’il est vrai qu’une octave abordée de cette manière peut sonner assez platement. 

Citons Debussy, dans une phrase extraite de Monsieur Croche:

« Le vieux Bach, qui contient toute la musique, se moquait, croyez le bien, des formules harmoniques. Il leur préférait le jeu libre des sonorités, dont les courbes, parallèles ou contrariées, préparaient l’épanouissement inespéré qui orne d’impérissable beauté le moindre de ses innombrables cahiers ».

Cette citation pourrait étayer une argumentation en faveur de cette faute de contrepoint. Exemple ci dessous.

Exemple 8: faute ctpt.jpg

Pour terminer, je souhaiterais montrer deux extraits, au sixième système et à la fin, aux neuvième et dixième systèmes. Il s’agit de deux passage en strettes. Très souvent en effet, on entend à la fin d’une fugue un moment dans lequel les entrées du sujet se resserrent. (en italien stretto signifie serré). On en a deux exemples ici. Pour des raisons de commodité de lecture, j’en ai enlevé tout ce qui n’est pas le sujet ou sa réponse. Dans le dernier extrait, (couleur bleue), Bach donne à entendre le sujet inversé, en une fort belle combinaison des voix.

Voici donc le premier passage en strette. Exemple 8.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/1ere-strette.mp3

1ere strette.jpg

Et le second, avec des entrées encore plus rapprochées.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/2eme-strette-1.mp3

2eme strette.jpg

J’ai choisi cette pièce pour tout ce qu’elle contient d’instructif (outre qu’elle nous apprend que même Bach peut commettre des fautes d’écriture) sur les manières de faire lorsque l’on compose du contrepoint suivant le principe de la fugue. Un sujet, sa réponse à la dominante, sa présentation en valeurs augmentées, en inverse, en strettes, tout ceci de manière particulièrement limpide. On retrouvera tous ces procédés dans le testament musical du maître, cette œuvre incroyable et inachevée qu’est L’Art de la Fugue.

Considérons maintenant ce procédé chez d’autres musiciens.

Nous avons évoqué Mozart au début de l’article. Celui ci utilisera la fugue à maintes reprises. N’hésitez pas à consulter sur ce site l’analyse de l’adagio et fugue en ut mineur. Je n’y reviens bien entendu pas ici, et souhaite seulement citer l’ouverture de La Flûte Enchantée. Après une introduction majestueuse en accords, nous entendons ceci :

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/ouv-flute.mp3

Ouv flute 1.jpg

ouv flute 2.jpg

ouv flute 3.jpg

Par l’écriture fuguée Mozart illustre le côté initiatique de son oeuvre. La fugue est en effet considérée comme un procédé difficile à maîtriser car il fait appel à une certaine intelligence musicale afin de pouvoir combiner dans l’harmonie les différentes lignes mélodiques, avec toutes les contraintes imposées. Chacun sait que la Flûte Enchantée correspond dans la vie de Mozart à son entrée dans la franc-maçonnerie, et à son époque, cette entrée comportait des épreuves, l’une des épreuves que les musiciens avaient à subir étant la composition d’un canon ! La partie fuguée de cette ouverture n’est donc vraiment pas là par hasard, elle reflète les aspirations du compositeur à ce moment de sa vie.

Chez Beethoven, l’écriture fuguée peut être extrêmement ludique, comme en témoigne l’exubérant finale du troisième quatuor de l’opus 59.

On retrouve cet esprit dans le scherzo de la 5eme symphonie, alors que les basses entonnent ce passage endiablé:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/scherzo-5eme-1.mp3

scherzo 5eme 1.jpg

scherzo 5eme 2.jpg

Dans l’un de ses derniers quatuors, Beethoven compose une fugue conclusive, mais son éditeur convaincra le compositeur de la considérer comme un mouvement à part. (Il dure en effet plus de 15 minutes). C’est ici le rythme qui est roi, au détriment de la ligne mélodique. On est en effet à mille lieues de la fluidité de Bach. L’oeuvre peut paraître ardue, mais comme disait Hector Berlioz : « il est monté si haut que l’air commence à manquer ». Voici donc « La grande Fugue » pour quatuor.

Berlioz a vis à vis de l’écriture fuguée une attitude quelque peu ambigüe. En effet, il critiquait volontiers les fugues religieuses dans lesquelles on répète inlassablement « Kyrie Eleison ». Il propose donc une parodie de fugue dans sa Damnation de Faust, avec un choeur d’hommes qui chante sur le mot « Amen » sur le thème de la chanson de Brander.

Comme souvent dans ses oeuvres, Berlioz fait passer un message sur ses goûts musicaux. Juste avant cette fugue, Méphistophélès déclare qu’il s’agit de « la bestialité dans toute sa candeur ».

Au début de son Te Deum, en revanche, Berlioz utilise l’écriture fuguée, avec deux thèmes superposés, et donc une double entrée en imitations. Pour information, on trouve un procédé similaire chez Mozart avec le Kyrie du Requiem, ce sur quoi nous allons revenir à la fin de cet article. Ecoutons donc le début du Teum de Berlioz.

Concernant la symphonie Fantastique, voici l’entrée fuguée lors du mouvement intitulé Le Songe d’une nuit de Sabbat. Le principe de la fugue rajoute ici au côté diabolique de la scène.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/fugue-sabbath.mp3

fugue sabbath 1.jpg

fugue sabbath 2.jpg

Georges Bizet lui aussi va utiliser le procédé de la fugue pour illustrer une idée littéraire. Dans son opéra Carmen, il fait entendre ceci, à la fin de l’acte 1:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/bizet-carmen-fuite.mp3

bizet carmen fuite.jpg

La musique anticipe ainsi l’action puisque dans l’histoire, elle correspond au moment ou Carmen s’apprête à prendre la fuite après avoir été arrêtée. La fugue possède donc ici une connotation très forte, et cette idée de fuite en avant évoquée plus haut prend ici tout son sens.

Deux exemples de musiciens du XXeme siècle qui ont composé des fugues. 

Je souhaiterais bien entendu citer Bela Bartok et sa monumentale fugue à six voix qui ouvre l’oeuvre intitulée Musique pour cordes, percussions et célesta. Les entrées des voix se font suivant le cycle des quintes, (la, mi, ré, si sol, fa dièse), et la musique est ici très chromatique et donc atonale. Ecoutons ce chef d’oeuvre.

https://www.youtube.com/watch?v=m129k5YcQnU

Un peu plus tard, Dimitri Chostakovitch a composé pour le piano 24 préludes et fugues. On peut les écouter dans une très belle version de Keith Jarret. On peut aussi écouter l’hallucinant passage en écriture fuguée de sa quatrième symphonie. Il arrive à 15’15 » dans le premier mouvement.

_________________________________________________________________________

Pour terminer, je voudrais revenir sur le plurithématisme dans l’écriture fuguée.

Considérons les deux exemples cités plus haut, Te Deum de Berlioz, Kyrie du Requiem de Mozart.

Le début du Te Deum (entrée des voix : soprano, ténor basse)

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/te-deum-b.mp3

te deum Berlioz.jpg

Le début du Kyrie du Requiem de Mozart.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/kyrie-mozart-1.mp3

kyrie Mozart.jpg

Pour chaque exemple, on trouve donc deux motifs distincts qui se trouvent superposés.

Il faut remarquer que dans ces deux cas, chaque motif supporte un texte différent.

Chez Berlioz, le motif A chante « Te Deum laudamus » (Nous te louons, Dieu), alors que le motif B chante « Te veneratur omnis terra » (Toute la terre te vénère).

Chez Mozart, le motif A chante « Kyrie Eleison » (Seigneur prends pitié), alors que le motif B chante « Christe Eleison » (Christ prends pitié). Il est d’ailleurs assez rare de faire chanter les deux textes ensemble puisque dans l’ordinaire de la messe, on chante le kyrie, le Christe puis le kyrie de nouveau en alternance.

Toujours dans cette notion de plurithématisme, revenons à Bach.

Le plus fameux exemple à proposer est le dernier contrepoint de l’Art de la Fugue. Il est intitulé « Fugue à trois sujets ». Les voici dans l’ordre. Il conviendra ensuite d’écouter cette pièce qui a la particularité d’être inachevée, Bach étant vraisemblablement décédé avant d’avoir pu la terminer, ce qui à vrai dire reste une énigme. On a également remis en doute l’appartenance de cette fugue au recueil de l’Art de la Fugue du fait que l’on n’y entende pas le thème principal de l’oeuvre.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/adf-3-sujets-2.mp3

adf 3 sujets.jpg

Le troisième sujet permet à Bach de signer sa musique de son nom. En effet il faut savoir qu’en Allemagne les notes sont désignées par des lettres. Ici on entend donc ce fameux B-A-C-H. Ecoutons la toute fin de cette pièce, avec les trois thèmes qui se trouvent superposés.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/09/art-fugue-fin.mp3

art fugue fin.jpg

Il est évident que l’écriture fuguée est surtout l’apanage de la période baroque, et on a l’habitude de dire qu’avec la mort de Bach en 1750 cette manière de concevoir la musique va quelque peu tomber en désuétude. Cependant tous les exemples cités ici prouvent à quel point cette écriture a quand même perduré à travers les âges en s’adaptant aux différents styles. La musique populaire s’est également emparée de ce mode d’écriture. En 1968, Astor Piazzolla compose Fuga y misterio, qui va mêler en un tout  intéressant le tango à l’écriture fuguée. Il s’agit cependant d’un exemple assez rare, ce mode de composition restant généralement cantonné au domaine de la musique savante.

Une vision de l’esthétique de Bach.

17 dimanche Juin 2018

Posted by Pascal Rabatti in Analyses musicales, Cours

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

analyse Kyrie Bach, messe en si mineur Kyrie

Il y a dans le livre « Relevés d’apprenti » de Pierre Boulez, (l’une de mes bibles alors que j’étais étudiant), un texte sur Bach qui m’a toujours frappé. Ce texte n’est pas de lui, mais il cite François Florand dans son livre « Jean Sébastien Bach ». Voici ce texte:

« Pour bâtir un développement, il arrive à Bach de préférer un moyen, qui consiste à développer le concert des voix sans sortir de la tessiture qu’il leur a assignée au départ, les maintenant de force dans les mêmes limites -guère plus d’une octave pour chaque partie- et amenant une progression venue tout entière du courant mélodique lui même, à peu près comme un fleuve que l’on verrait grossir sans cause extérieure apparente, ni affluents, ni glaciers, ni orages, mais par le seul apport de mystérieuses sources souterraines. C’est là autre chose qu’une simple esthétique de répétition, à la manière orientale ou hindoue. C’est un procédé très particulier à Bach, qui est fait d’une accumulation intérieure d’énergie, de force émotive, jusqu’au point où l’auteur et l’auditeur sont saturés et comme enivrés. Il n’y faut chercher, assurément, rien  de brutal, ni de grossier. Mais enfin, il vient alors un moment où, à force de tourner et retourner son motif, la tête semble tourner à l’auteur lui même. « Es schwindelt… » Et c’est cela le sommet de l’oeuvre ».

J’ai aimé cette évocation d’un fleuve qui ne grossirait que par l’apport de sources invisibles. Pour François Florand, il semblerait en effet que la tension, l’énergie qui se dégagent de la musique de Bach soient le résultat d’une polyphonie dans laquelle le musicien contraint ses voix, à la manière d’une personne qui chercherait à canaliser un débordement. Ainsi, la tension inhérente au discours musical serait le résultat inévitable de cette contrainte, une sorte de respiration profonde qui amènerait la musique vers des sommets d’expression trouvant leur résolution naturelle dans des moments de détente.

Un exemple pourrait illustrer cette idée de manière assez claire. Il s’agit du Kyrie qui débute la Messe en si mineur. Nous allons tenter d’en expliquer la teneur à la lumière du texte de François Florand.

Pour commencer, écoutons ce Kyrie :

(Dans la très belle version de Philippe Herreweghe).

Les éléments qui composent ce Kyrie. (Passons l’introduction). 

-Le thème principal, un sujet de fugue, en si mineur. Thème de courbe globalement ascendante donnant à entendre de grands intervalles disjoints d’esprit plus instrumental que vocal. Le do bécarre de la fin est à analyser comme un second degré rabaissé (napolitain) de si. Comme la basse à ce moment fait entendre un mi, nous nous trouvons sur l’accord de sixte napolitaine mi-sol-do, qui mène logiquement au 5eme degré fa dièse, pour la réponse (voir exemple numéro 2).

Exemple numéro 1

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/06/sujet-fugue-1.mp3

Sujet fugue

-Comme second élément, une marche harmonique descendante sur une noire liée à quatre croches, à partir de laquelle toute la tension accumulée va se résoudre. Cette marche débute sur une note qui peut correspondre au sommet d’expression dont parle François Florand dans son texte. C’est ce que nous tenterons d’expliquer dans cet article. Cette marche se trouve exposée dès le début dans l’introduction d’orchestre, (exemple ci-dessous à la mesure 6), et se trouvera par la suite considérablement amplifiée par le choeur, ce que nous verrons par la suite.

Voici donc comme deuxième exemple l’introduction orchestrale avec le sujet, sa réponse, et la note sol dièse, qui sert ici de point culminant à partir duquel va se résoudre la tension, surlignée en bleu. Ce sol dièse est à analyser sur la mesure 6 comme un retard de tonique sur l’accord de fa dièse mineur, note dissonante donc très expressive.

Exemple numéro 2

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/06/dc3a9but-kyrie-1.mp3

intro orchestre 1.jpg

début fugue 2.jpg

-Enfin, dans les motifs principaux de ce Kyrie, un motif en croches directement issu du thème principal, puisqu’il en reprend en les développant les intervalles disjoints descendants. Ce motif est utilisé lors des passages de transition. On l’entendra en effet joué par l’orchestre entre les deux plus grandes sections de choeur de cette pièce.

Exemple numéro 3

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/06/motif-secondaire.mp3

motif secondaire.jpg

Pour reprendre le texte de François Florand, en voici des extraits:

(…..)sans sortir de la tessiture qu’il leur a assignée au départ, les maintenant de force dans les mêmes limites -guère plus d’une octave pour chaque partie-(….)

L’ambitus de chaque voix se situe ici globalement dans un intervalle de neuvième.

(..)une progression venue tout entière du courant mélodique lui même(..)

Le « courant mélodique » rejoint bien entendu l’idée du fleuve, en décrivant bien  cette musique qui prend l’auditeur dès les premières notes pour le mener inexorablement aux dernières.

Considérons maintenant le développement de cette fugue, à partir de l’entrée du choeur. qui suit l’introduction orchestrale. 

(En raison des sonorités de voix synthétique non convaincantes, j’ai choisi de faire entendre ce choeur par une imitation de quintette à vents).

Ce sont tout d’abord les ténors (ici le basson), qui donnent le sujet, suivis par les voix d’alto pour la réponse, (ici la clarinette).

Entrent ensuite les sopranos 1 qui vont entonner le sujet, suivies par les sopranos 2 sur la réponse. Voici tout le début du choeur, jusqu’à l’entrée des basses. Cette fugue est en effet à cinq voix, ce qui reste assez rare, mais qui correspond à son aspect monumental. Appréciez au passage comment cette entrée des basses est préparée de manière à produire un effet maximal.

Exemple numéro 4

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/06/entrc3a9e-fugue-choeur-1.mp3

entrée fugue choeur 1.jpg

entrée fugue choeur 2.jpg

entrée fugue choeur 3.jpg

entrée fugue choeur4.jpg

Toutes les voix sont à présent entrées en jeu. Voyons comment la musique va évoluer.

A partir de ce moment, le texte de François Florand prend tout son sens.

Dans le passage qui suit, la voix d’alto se trouve sur la réponse, en fa dièse mineur. Mais sur la mesure 3, les sopranos entrent sur une autre réponse, en do dièse mineur, quinte de fa dièse, (réponse à la réponse?), qui amène une surenchère de tension musicale arrivant à un apogée sur la mesure 5 (note surlignée en bleu), à partir duquel cette tension accumulée va se résoudre dans la tonalité du second degré de si mineur, à savoir do dièse mineur, suivant le principe de la marche harmonique descendante énoncé à l’exemple 2. Comme il a été dit plus haut, tout ceci se trouve à l’état embryonnaire dans l’introduction d’orchestre, et amplifié ici dans ce passage choral.

(Ce principe de marche harmonique descendante pour résoudre la tension musicale me rappelle d’ailleurs mon professeur d’harmonie, Jean Louis Lusignan, alors que j’étais étudiant au conservatoire de Nice. Il nous disait : « il est plus difficile de faire monter la musique que de la faire descendre. Naturellement, la musique descend ». De ce fait il est logique qu’une montée soit génératrice de tension et qu’une descente soit synonyme de résolution de cette tension). 

Exemple numéro 5

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/06/suite-choeur-1-1.mp3

Suite choeur 1.jpg

suite choeur 2.jpg

Je vous propose maintenant d’écouter le tout, depuis l’entrée du choeur jusqu’au passage précédemment entendu. Réécoutez ensuite l’original.

Exemple numéro 6

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/06/le-tout.mp3

Rappelons ici le texte de François Florand:

« C’est un procédé très particulier à Bach, qui est fait d’une accumulation intérieure d’énergie, de force émotive, jusqu’au point où l’auteur et l’auditeur sont saturés et comme enivrés ». 

« Es schwindelt… » Et c’est cela le sommet de l’oeuvre ».

Petite parenthèse sur la dynamique chez Bach 

Du point de vue de la dynamique, la musique de Bach ne possède pas la richesse, la palette de nuances que l’on trouvera plus tard dans le classicisme, et surtout dans le romantisme. Pas de crescendo ici, pas d’alternance forte piano. En fait cette musique n’en a pas besoin, l’énergie qu’elle dégage étant générée par la seule force de l’écriture. Le « délire » de Bach, son ivresse musicale, sont absolument contrôlés, et c’est ce qui en fait la force. Au moment du climax (point culminant souligné plus haut) dû à la répétition obsessionnelle du sujet, en si puis en fa dièse (réponse) puis en do dièse (réponse à la réponse), on a l’impression d’un crescendo de nuance alors qu’il s’agirait plutôt d’un crescendo de tension, qui impose de manière obligée l’expression musicale. Il ne faut rien forcer dans cette musique, il suffit de la laisser faire!

Pour citer un exemple opposé, lorsque bien plus tard Beethoven débute sa neuvième symphonie, il commence pianissimo pour s’acheminer vers le fortissimo, en un crescendo orchestral dont il est d’ailleurs un peu l’inventeur. L’expression musicale, l’écriture, sont dans le début de cette symphonie tributaires de ce crescendo. Chez Bach, c’est le contraire. La nuance découle logiquement et implacablement de l’écriture.

La suite du Kyrie. 

Lors de la seconde grande entrée du choeur, il faudra apprécier l’entrée des voix dans l’ordre suivant : basse-ténor-alto-soprano 2-soprano 1. La tension musicale va s’accumuler et se résoudre de la même manière que dans la première partie, pour mener la musique à l’accord final, en tierce picarde. (Accord de si majeur).

Il est inutile je pense de décrire cette suite dans le détail, essayez de tout retrouver à l’écoute. Laissez vous entraîner dans le fleuve!

Le Dies Irae dans l’histoire de la musique

15 jeudi Fév 2018

Posted by Pascal Rabatti in Cours, Non classé

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

Dies Irae, Le Requiem

Le Dies Irae

Thème important dans l’histoire de la musique, le thème du Dies Irae fait partie de la messe des morts, le Requiem. Important parce que privilégié par les compositeurs qui se sont consacrés à ce beau texte qu’est celui du Requiem.

Voici un extrait du texte de la messe des morts

Requiem æternam dona eis, Domine, et lux perpetua luceat eis.

Te decet hymnus Deus, in Sion, et tibi reddetur votum in Jerusalem.

Exaudi orationem meam; ad te omnis caro veniet.

Requiem æternam dona eis, Domine, et lux perpetua luceat eis.

 

« Donne-leur le repos éternel, Seigneur, et que la lumière éternelle les illumine.

Dieu, il convient de chanter tes louanges en Sion ; et de t’offrir des sacrifices à Jérusalem.

Exauce ma prière, toute chair ira à toi.

Donne-leur le repos éternel, Seigneur, et que la lumière éternelle les illumine ».

 

Le texte du Requiem est en fait un texte d’espoir et d’apaisement. Le Dies Irae conserve cependant un caractère assez effrayant.

Le texte du Dies Irae

 Dies iræ, dies illa,                                             

Solvet sæclum in favílla,

Teste David cum Sibýlla !

Quantus tremor est futúrus,

quando judex est ventúrus,

cuncta stricte discussúrus !

Tuba mirum spargens sonum

per sepúlcra regiónum,

coget omnes ante thronum.

Mors stupébit et Natúra,

cum resúrget creatúra,

judicánti responsúra.

Liber scriptus proferétur,

in quo totum continétur,

unde Mundus judicétur.

Judex ergo cum sedébit,

quidquid latet apparébit,

nihil inúltum remanébit.

 

Traduction

Jour de colère, que ce jour-là

Où le monde sera réduit en cendres,

Selon les oracles de David et de la Sibylle.

Quelle terreur nous saisira,

lorsque la créature ressuscitera

pour examiner rigoureusement.

L’étrange son de la trompette,

se répandant sur les tombeaux,

nous jettera au pied du trône.

La Mort, surprise, et la Nature,

verront se lever tous les hommes,

pour comparaître face au Juge.

Le livre alors sera produit,

où tous nos actes seront inscrits ;

tout d’après lui sera jugé.

Lorsque le Juge siégera,

tous les secrets apparaîtront,

et rien ne restera impuni.

Ce texte correspond dans la liturgie au jugement dernier, thème qui a également été traité par de nombreux peintres et sculpteurs. 

https://www.google.fr/search?q=jugement+dernier&source=lnms&tbm=isch&sa=X&ved=0ahUKEwiQlc7vzqfZAhXQGuwKHZcsBKEQ_AUICigB&biw=1280&bih=918&safe=active&ssui=on

On trouve notamment le jugement dernier sur le tympan de l’Abbatiale de Conques. On peut également en voir une fresque à la cathédrale Ste Cécile d’Albi. 

Voici la mélodie grégorienne du Dies Irae. Elle sera reprise tout au long de l’histoire de la musique par de très nombreux compositeurs. (Charpentier, Lully, Berlioz (dernier mouvement de la Symphonie fantastique), Dvorak, Tchaïkovsky, Ysaye, etc…). Il serait inutile et fastidieux de donner une liste exhaustive tant les exemples foisonnent. Cette pléthore  est due d’une part à la grande force expressive qui se dégage de ce thème, et d’autre part aux grandes possibilités de variation et de développement qu’il offre. Cette mélodie telle qu’on la connait aujourd’hui date du XIIIeme siècle, époque à laquelle elle commence à faire partie du corpus grégorien.

Pour plus de précisions, consulter l’article wikipedia à ce sujet.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Dies_ir%C3%A6

 

L’utilisation de la mélodie grégorienne du Dies Irae dans d’autres oeuvres. 

Lorsque Hector Berlioz reprend ce thème, il en fait une parodie, destinée à décrire le moment où celle qu’il aime rejoint la danse infernale des sorcières, alors qu’il est en plein délire. Ce thème servira en partie à conclure la Symphonie Fantastique. La mélodie du Dies Irae apparaît après un célèbre coup de cloche.

Voici un autre exemple, la Danse Macabre pour piano et orchestre de Franz Liszt.

 

Serge Rachmaninov en propose une variation au début de sa première symphonie

 

La Danse des morts d’Arthur Honegger.

 

Le Dies Irae dans le Requiem 

Il existe un grand nombre de Requiem célèbres. Parmi eux il faut citer celui de Mozart, de Berlioz, de Verdi, de Dvorak et de Fauré.

Dans la séquence du Dies Irae, ces compositeurs n’ont cependant pas repris la mélodie grégorienne originale mais ils en ont conservé le texte qu’ils ont mis en musique à leur manière. Façon souvent similaire d’ailleurs puisque le moment du Dies Irae dans un Requiem est généralement tourmenté, sonore, dans un tempo rapide et une orchestration fournie. (Gabriel Fauré faisant toutefois exception à cette règle).

Auditions 

-Dies Irae extrait du Requiem de Mozart. Véritable concentré de musique qui produit toujours beaucoup d’effet.

 

-Dies Irae extrait du Requiem de Berlioz. (Pour le coté spectaculaire : quatre fanfares disposées en quatre coins se répondent au moment du Tuba Mirum!). L’un des moments préférés de son illustre auteur. L’un des plus bruyants aussi. Il faut prendre le temps d’écouter ces douze minutes, cela vaut la peine!

 

-Dies Irae du Requiem de Verdi. (L’un des plus connus, très spectaculaire également, avec des percussions particulièrement affirmées).

 

-Dies Irae du requiem de Dvorak.

 

Le Dies Irae de Fauré est inclus au milieu de la séquence du Libera me. Ce Requiem reflète un grand apaisement par rapport à l’idée de la Mort. Même le Dies Irae n’a pas un caractère véritablement effrayant comme c’est le cas chez les autres.

« (…) Voilà 40 ans que j’accompagne à l’orgue des services d’enterrement, j’ai voulu faire autre chose« , a dit Fauré à propos de son Requiem.

Pour la littérature contemporaine, il existe le très étonnant Requiem de Ligeti

 

Voici enfin le Dies Irae extrait du War requiem de Benjamin Britten.

 

 

Dans la musique plus ancienne, il existe des pages magnifiques de compositeurs qui ont mis en musique le texte du Requiem.

En rapport avec Fauré, voici Libera me, extrait de Officium Defunctorum de Tomas Luis de Victoria.

 

Voici le Dies Irae de Cristobal de Morales (1500-1553), qui reprend le thème textuel pour le traiter ensuite de manière personnelle.

 

Il ne faut donc pas hésiter à aller écouter toutes ces pages qui prouvent à quel point la Mort a de tous temps inspiré les artistes. Par l’art, l’homme cherche des réponses à ses questions, ce qui peut expliquer en partie que le texte du Requiem ait pu être aussi souvent utilisé dans des oeuvres musicales, depuis la renaissance jusqu’à la période contemporaine.

 

L’univers modal. Explications et exemples.

10 samedi Fév 2018

Posted by Pascal Rabatti in Cours, Non classé

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

la modalité en musique au XXeme siècle, les modes ecclésiastiqyes, musique modale

PREMIERE PARTIE 

Les modes ecclésiastiques 

Pendant environ trois siècles, de 1600 à 1900, la musique occidentale savante a principalement fonctionné sur deux couleurs modales, le majeur et le mineur. En effet, à partir du moment où s’installe la notion de tonalité, les compositeurs écrivent sur la base de la gamme de do majeur et son relatif mineur la.

Mais à la fin du XIXeme siècle, le système tonal a besoin d’être renouvelé. De nombreux musiciens vont alors se tourner vers d’autres gammes, et en particulier vers ce que l’on a appelé les modes ecclésiastiques, ainsi nommés car ils étaient utilisés au moyen age, notamment dans le chant grégorien. Ces musiciens se nomment Franck, Fauré, Debussy, Ravel, Sibelius, pour ne nommer qu’eux.

Obtenir ces modes sur un clavier est très facile. Il faut tout d’abord monter la gamme de do majeur, appelée mode ionien. Ce mode a triomphé durant trois siècles du fait de la très forte attraction que l’on trouve entre la note si appelée sensible et la note do appelée tonique. Cette attraction permet d’obtenir la cadence parfaite, qui peut servir à terminer un morceau de musique de manière très affirmée. La gamme de do majeur est le fondement de la musique dite tonale.

Le mode Ionien 

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/ionien.mp3

ionien

Que se passe-t-il maintenant si l’on monte cette même gamme en partant d’une autre note que le do? On obtient une autre gamme. Exemples ci-dessous:

Le mode Dorien 

Si l’on part du ré, on obtient le mode dorien, mode mineur qui possède deux particularités: faire entendre une sixte majeure (ré-si), et un intervalle d’un ton entre la septième note et la note fondamentale (do-ré). Voici ce mode, suivi d’une cadence de même type que la cadence parfaite en do:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/dorien.mp3

dorien

Le mode phrygien 

Si l’on part du mi, on obtient le mode phrygien, autre mode mineur possédant un caractère particulièrement mélancolique car il débute sur une seconde mineure (mi-fa). C’est la raison pour laquelle le mode phrygien est utilisé dans les musiques tziganes et dans le flamenco. Exemple ci-dessous, suivi d’une cadence à forte connotation « flamenca ». Ce mode possède des gammes dérivées dont nous parlerons plus tard.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/phrygien.mp3

mode de mi phrygien

Le mode lydien 

Si l’on part du fa, on obtient le mode lydien, très utilisé dans la musique polonaise. Il s’agit d’un mode majeur donnant à entendre la quarte augmentée fa-si naturel, la gamme de fa majeur faisant, elle entendre un si bémol. Ce mode est à rapprocher de la gamme harmonique ou gamme Bartok dont nous reparlerons également plus tard.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/lydien.mp3

mode de fa lydien

Le mode mixolydien

En partant du sol, on obtient le mode mixolydien, autre mode majeur, qui doit sa couleur particulière à la septième mineure sol-fa naturel. (La gamme de sol majeur fait entendre un fa dièse). Le mode de sol est très utilisé dans le jazz et le rock.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/myxo.mp3

myxo

Le mode éolien 

En partant du la, on obtient le mode éolien, mode mineur qui se rapproche du dorien mais qui comporte une sixte mineure la-fa.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/eolien.mp3

eolien

Le mode locrien

Enfin, en partant du si, on obtient le mode locrien très peu utilisé du fait de sa quinte diminuée si-fa qui lui confère un caractère particulièrement instable. On attend en effet toujours avec ce mode une résolution en mode ionien à la manière d’une cadence parfaite, tant il est évident que la quinte juste reste la base de toute notre musique, et qu’une quinte diminuée sonne toujours de manière « non finie ».

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/locrien.mp3

mode de si locrien

SECONDE PARTIE 

La couleur modale 

L’un des grands intérêts de ces modes, c’est que chacun possède son caractère, sa personnalité propre. En musique tonale, il y a standardisation de l’ordre des intervalles. Que l’on joue en si majeur ou en ré bémol majeur, cet ordre est le même. (Ton-ton-demi ton, ton-ton-ton-demi ton). Mais en musique modale, cet ordre diffère d’une gamme à l’autre. C’est la raison pour laquelle chaque mode peut évoquer un sentiment ou un style de musique particuliers.

Le mode de ré ou mode dorien. 

Ce mode peut être associé à une certaine mélancolie du passé. Il suffit pour s’en convaincre d’écouter le sublime début de la sixième symphonie de Sibelius. Dans ce début, les cordes seules jouent en effet sur ce mode en conférant à la musique une couleur très particulière.

Sibelius

Il est très facile dans le mode dorien d’improviser dans le style de musiques très anciennes.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/impro_dorien1.mp3

impro dorien

Le mode de mi ou mode phrygien

Ce mode est associé à des cultures populaires à la fois tristes et festives. Le mode phrygien est la base d’une certaine musique espagnole. Voici un exemple de ce qui pourrait être une « falseta » de guitariste andalou:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/falseta.mp3

falseta

Comme il a été dit plus haut, le mode phrygien possède des dérivés très intéressants dont voici quelques exemples, parmi lesquels le mode phrygien espagnol, ou gamme andalouse. Mais toutes ces gammes sont également utilisées dans les pays de l’est dans les musiques tziganes.

On y entend des chromatismes, mais également pour certaines des secondes augmentées au caractère bien oriental.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/d_riv_s_du_mode_de_mi.mp3

dérivés mode de mi

Au début de son poème symphonique Mazeppa, le grand Franz Liszt utilise l’un de ces modes dans son introduction, pour situer l’action qui se déroule en Ukraine. Voici la ligne jouée par les violons. Elle est ici suivie du mode utilisé, transposé en la. Noter la seconde augmentée si bémol-do dièse.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/mazeppa.mp3

Mazeppa.jpg

Le mode de fa ou mode lydien. 

Le mode de fa, avec sa quarte augmentée fa-si bécarre, possède lui aussi une couleur très particulière. On le trouve beaucoup dans la musique polonaise. Chopin d’ailleurs, dans l’une de ses polonaises, l’utilise de manière très évidente.

Moussorgski joue lui aussi avec ce mode lorsqu’il compose « Polonaise » dans son opéra Boris Godounov.

Il existe une gamme qui se rapproche du mode lydien: la gamme harmonique ou gamme Bartok. Elle est très utilisée en jazz car elle colle parfaitement avec les accords de septième et neuvième de dominante, base du blues. Maurice Ravel la donne à entendre dans le passage central de son Concerto pour la main gauche, passage fortement inspiré par le jazz.

Voici tout d’abord cette gamme:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/bartok.mp3

Bartok

Et voici ce qu’en fait Ravel, alors que le piano entonne ce passage endiablé. Il va par la suite mêler cette gamme à d’autres modes. Elle est ici transposée en mi. (Mi-fa dièse, sol dièse, la dièse, si, do dièse, ré, mi).

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/th_me_jazz_ravel.mp3

solo milieu impro

Il faut remarquer que Ravel utilise différents modes dans ce passage, le seul dont nous n’ayons pas encore parlé étant la gamme pentatonique, sur laquelle nous reviendrons plus tard.

PETITE PARENTHESE SUR LES MELANGES DE MODES

Voici un autre exemple de mélange de modes, avec le premier thème du second concerto pour violon de Bela Bartok.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/concerto_bartok.mp3

concerto Bartok.jpg

Un thème possédant un caractère tzigane assez marqué, et qui va osciller entre trois modes: éolien, dorien et mixolydien. En effet, il commence sur un sol naturel, issu du mode éolien. Par la suite, on entendra un sol dièse, issu du dorien. Mais n’oublions pas que les modes de ré et de la sont assez proches. Il s’agit de deux modes mineurs dont la différence est la sixte, majeure pour le mode de ré, mineure pour le mode de la.

Si l’on veut pousser un peu l’analyse, on constate d’ailleurs que cette alternance entre sol bécarre et sol dièse est pour beaucoup dans la couleur du passage. En effet, le sol naturel est contenu dans les accords des mesures 2 et 4 comme une septième sur un accord de la (avec la neuvième si). A partir de la mesure 5, ce sol naturel disparaît puis revient sur la ligne de basse mesure 7 et enfin sur un accord de mi mineur en quarte et sixte mesure 8.

La mélodie donne également à entendre un ré parfois bécarre, parfois dièse. Le ré dièse est issu du mode mixolydien.

Comme on peut le constater, tout ceci est assez compliqué. L’analyse modale est souvent plus difficile à appréhender que l’analyse tonale.

Fin de la parenthèse.

Le mode de sol ou mode mixolydien. 

Ce mode, très utilisé en jazz et en rock, est aussi présent dans la musique dite classique. Voici La Cathédrale Engloutie, pièce pour piano de Debussy. Le thème principal, qui apparaît après deux pages d’introduction, est une succession grandiose d’accords, en do majeur. Au second système de la partition ci-dessous, on trouve un si bémol, qui nous oriente vers ce mode mixolydien, mode de sol donc, transposé sur do.  La musique est censée décrire l’apparition d’une cathédrale. Le mode ancien utilisé participe donc à la description de l’édifice, ainsi que cette écriture en accords parfaits parallèles volontairement archaïque. On pourrait imaginer un orgue très ancien.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/cath_drale.mp3

cathédrale

De toutes les pièces pour piano, celle ci reste ma préférée..

Dans la musique populaire, le mode mixolydien tient une grande place.

Voici par exemple une phrase de cornemuse écossaise. Cet instrument ne peut jouer qu’en si bémol et en mi bémol. Sa gamme de base est la suivante:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/gamme_cornemuse.mp3

gamme cornemuse

Gamme mixolydienne en si bémol.

Voici donc une phrase typique:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/parade_cornemuse.mp3

Parade cornemuse

Noter l’insistance sur la note la bémol.

Pour terminer avec ce mode, une petite visite dans le monde du rock: You really got me des Kinks:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/you_realy_got_me.mp3

You realy got me

Les exemples de ce type sont innombrables.

Le mode éolien ou mode de la 

Avec ce mode, continuons dans le monde du rock. Le mode éolien est en effet l’un des plus usités par les « guitar heroes » de tout bord.

Lorsque l’on entend ce type de grille:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/dylan_hendrix.mp3

Dylan, Hendrix

Ou ce type de phrase:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/page.mp3

plan Page

On se trouve en mode éolien. Il en existe une infinité d’exemples. On peut pour rester dans les grands standards écouter des morceaux comme Stairway to Heaven de Led Zeppelin ou le magnifique Child in Time de Deep Purple.

Bien entendu, ce mode éolien ne se trouve pas que dans le rock et de nombreux compositeurs de musique savante l’ont également utilisé. L’un des pionniers de la musique modale, Gabriel Fauré, le donne par exemple à entendre au début de sa mélodie intitulée Clair de lune, sur un poème de Verlaine.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/clair_de_lune.mp3

clair de lune

Il faut ici noter l’ambiguïté entre la main droite qui joue donc en mode de la (avec des do et fa naturels), et l’accompagnement en arpèges de la main gauche qui donne à entendre des fa dièse et do dièse. (Pour des raisons de commodité de lecture, la musique est ici transposée en la, l’original étant en si bémol mineur). C’est là que réside l’intérêt des modes, mariage réussi entre tradition ancestrale et modernité, à la croisée entre les 19eme et 20 siècles.

Il existe une foule d’autres gammes, dont certaines feront l’objet d’un prochain article.

Olivier Messiaen s’est intéressé à ces gammes en tant que modes à transposition limitée, qui correspondaient à sa philosophie musicale sur laquelle nous ne nous attarderons pas ici.

La gamme par tons, utilisée également par Debussy, qui est une gamme à 6 notes.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/gamme_par_tons.mp3

gamme par tons

Comme exemple, la pièce intitulée « Voiles » de Debussy

Et les gammes diminuées, assez fréquentes en jazz.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2018/02/gammes_diminu_es.mp3

gammes diminuées

Il existe des dizaines de modes différents, qui représentent la combinaison de plusieurs tétracordes. Je pense qu’il est très difficile de les connaître tous. C’est à chacun de s’y intéresser en fonction de ses goûts, de ses aspirations musicales. Les modes extra européens peuvent être une source d’inspiration pour certains, d’autres peuvent rester cantonnés aux modes ecclésiastiques. Dans tous les cas, c’est à chacun de trouver dans cet univers insondable son propre langage. La musique est infinie.

Pour la pratique au clavier des bases de l’harmonie classique.

05 dimanche Mar 2017

Posted by Pascal Rabatti in Cours

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

accord dom de dom, enchainement 2-5-1, enchainements d'accords, harmonie classique

Etudier l’harmonie, c’est apprendre à enchaîner les accords de la manière la plus élégante possible. Pour cela, il peut être très utile de se mettre au clavier et de travailler de manière systématique et dans toutes les tonalités des enchaînements types. On trouvera ici quelques exemples qui peuvent permettre à un étudiant de se mettre dans les doigts, et donc dans l’oreille des positions fondamentales dont la connaissance est indispensable pour une bonne pratique de l’harmonie.

Ce cours s’adresse à des étudiants censés connaître le solfège. La lecture des notes y est indispensable.

Généralités

Voici tout d’abord la base de tout, la gamme de do (mode ionien):

la gamme.jpg

Ainsi que la mineur, sa gamme relative:

gamme-la-m

Les deux degrés fondamentaux d’une gamme, et donc d’une tonalité sont le premier (la tonique) et le cinquième (la dominante). Occupons nous tout d’abord de ces deux degrés.

L’accord parfait de tonique et ses deux renversements.

Pour construire cet accord, on part de la note do, puis on empile des notes à distance de tierce. (Do ré mi, mi fa sol).

Un accord est dit renversé lorsque l’on trouve à la basse une autre note que sa note fondamentale. Exemple : l’accord de do est composé des notes do, mi et sol. A l’état fondamental, le do sera à la basse, pour le premier renversement, ce sera le mi, pour le second ce sera le sol. Exemple ci dessous, avec les chiffrages de chaque accord.

acc parf renv.jpg

Petite explication pour les chiffrages figurant sur chaque accord:

A l’état fondamental, on chiffre 5 car il s’agit de l’accord de quinte (do ré mi fa sol). Le premier renversement est chiffré 6 car accord de sixte (mi fa sol la si do). Le second renversement est chiffré 6 4 car cet accord donne à entendre la quarte sol-do et la sixte sol-mi. Les chiffrages sont à connaître absolument par coeur.

L’accord de septième de dominante et ses trois renversements.

Pour construire cet accord, on part de l’accord parfait de sol (sol, si, ré) et on y rajoute une tierce (le fa). Pour obtenir la septième, on peut aussi compter 7 notes en montant la gamme à partir de la note fondamentale d’un accord. (Sol la si do ré mi fa, par exemple).

Exemple ci dessous. La septième est en rouge, pour des raisons de clarté.

7eme-dom-av-renv

Explication des chiffrages: 7 +: accord de septième (sol-fa) avec la sensible (+). En do, la note sensible est le si. 6 5/ (se dit six cinq barré) donne à entendre la sixte si-sol et la quinte diminuée si-fa. +6 veut dire que la sensible est une sixte au dessus de la basse (ré-si). +4 veut dire que l’on entend dans l’accord l’intervalle de triton fa-si, le si étant la sensible.

Enchaînements entre ces deux accords.

La tonique et la dominante s’enchaînent naturellement et constituent la base du système tonal. Nous allons voir ici les différentes manières d’enchaîner ces deux degrés. Important: la sensible monte sur la tonique et la septième descend sur la tierce. Cela est valable dans la plupart des cas.

Voici tout d’abord l’enchaînement de base, la cadence parfaite, présentée de trois manières différentes.

CP.jpg

Ce type d’enchaînement est à pratiquer régulièrement sur un clavier dans toutes les tonalités possibles. Voici quelques exemples:

CP en plusieurs tons.jpg

Il y a 24 possibilités ! A vous de les trouver dans chaque tonalité, majeure ou mineure.

Enchaînements avec renversements d’accords

Une fois ces réflexes acquis, voyons ce qui va se passer avec les accords renversés. Cela décuple bien entendu les possibilités. En voici quelques unes.

Dans l’exemple suivant, l’accord de dominante est utilisé dans son premier renversement. Les trois premières mesure sont en do majeur, les trois dernières en la mineur. Notes en rouge: les septièmes.

6 5 barré 5.jpg

Ce type d’enchaînement, d’esprit romantique, a été très utilisé par Robert Schumann. Il est également à travailler dans tous les tons possibles. La présentation de l’accord de dominante est ici idéale car elle donne à entendre la septième dans l’aigu en mouvement contraire avec la sensible à la basse. Cela sonne vraiment parfaitement.

Voici un autre exemple, très « schumannien » lui aussi:

6 5 barré 5.jpg

On remarquera le mouvement conjoint descendant à l’aigu, la ligne de basse réalisant l’enchaînement des sensibles vers les toniques.

L’accord +4.

C’est un accord extrêmement important. Il s’agit du troisième renversement de l’accord de dominante, dont la particularité est de faire entendre la septième à la basse. Voici trois manières de présenter ce renversement:

4-3-pos

Cet accord est à enchaîner avec un accord de sixte. Voici également trois possibilités:

+4 6 3 pos.jpg

A maîtriser dans toutes les tonalités possibles. On peut travailler ces tonalités séparément, mais également en les enchaînant à la manière d’une marche harmonique. Voici tout d’abord une possibilité qui est en quelque sorte l’inverse de l’enchaînement « schumannien » cité plus haut. En effet, la gamme descendante se trouve à la basse, cependant que l’aigu réalise le passage des sensibles vers les toniques.

+4 6 diato.jpg

Voici un autre exemple, avec basse chromatique. Le discours est ainsi très modulant.

+4 6 chroma.jpg

Avec des tonalités mineures (très modulant):

tons mineur +4 6 prems.jpg

Autre exemple, avec mouvement ascendant dans le registre aigu:

marche montante +4 6..jpg

Voici une marche qui va mélanger un enchaînement +4 – 6 et un enchaînement 6 5/ – 5.

+4 melangé av 65.jpg

 Autre exemple, permettant de moduler dans des tons éloignés:

mélange av +4 et 6 5 modulant.jpg

Un exemple de marche « en boucle » qui permet de revenir à la tonalité de départ:

marche en boucle 1.jpg

Enfin, une marche avec mouvement mélodique ascendant dans le registre aigu, qui nous permet une nouvelle disposition de l’accord 6 5/:

marche av mvt mel asc.jpg

Il va de soi que les possibilités sont multiples, voire infinies ! A vous de les appliquer et même d’en découvrir d’autres.

L’accord +6

Le second renversement de l’accord de dominante est moins utilisé que les deux autres. Il est souvent entendu comme accord de passage.

le +6.jpg

Remarquer que dans cet enchaînement, la septième monte. Cela est possible car les deux voix extrêmes se retrouvent en sixtes parallèles.

Il ne faut donc pas hésiter à se mettre au clavier et travailler de manière systématique, comme on travaille la technique instrumentale par le biais des gammes et des arpèges.

Une seconde partie va traiter maintenant des enchaînements dit 1-2-5-1

Le 1-2-5-1

Il existe en effet un degré qui amène naturellement l’accord de dominante. Pour quelle raison? Cela est très logique. Lorsque l’on se trouve dans le ton de la dominante d’une tonalité, on s’aperçoit que le cinquième degré est en fait le second de la tonalité d’origine. Explication ci-dessous:

gammes de do et sol.jpg

En do majeur, l’accord de second degré sera composé des notes ré, fa et la. On peut y rajouter une septième: le do. Voici tout d’abord différentes manières de présenter cet accord de second degré:

le second degré..jpg

Voici en suite quelques exemples d’enchaînement 1-2-5-1.

En tonalité majeure:

2-5_1 maj.jpg

Puis en tonalité mineure:

2-5_1 min.jpg

En do majeur, quand on rajoute un dièse sur la note fa du second degré, on donne à entendre la note sensible de sol. De ce fait, le second degré devient la dominante de la dominante. En jargon musical, on appelle cet accord « dom de dom ». Il est le résultat d’un  emprunt au ton de la dominante.

Il conviendra de transposer les exemples ci-dessus dans toutes les tonalités possibles, majeures et mineures. Ce travail peut s’avérer très payant. L’harmonie peut paraître souvent comme quelque chose de très abstrait. En réalisant les accords sur un clavier, on peut mieux se rendre compte de ce qui se passe. Pour ma part, j’ai compris ce qu’était l’harmonie grâce à la pratique quotidienne de ce genre d’exercice.

Concernant l’enchaînement 1-2-5-1, il existe sur ce site un article traitant de ce que l’on appelle la sixte napolitaine. N’hésitez pas à le consulter.

Le rapport texte-musique dans le Concerto Duo seraphim extrait des Vêpres de Claudio Monteverdi

15 dimanche Jan 2017

Posted by Pascal Rabatti in Analyses musicales, Cours

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

analyse du concerto duo seraphim de Monteverdi, Les Vepres de Monteverdi concert duo seraphim

 

Duo Seraphim clamabant alter ad alterum:                   Deux Seraphins craient l’un à l’autre
Sanctus Dominus Deus Sabaoth:                                       Saint est le Seigneur des armées
Plena est omnis terra gloria eius.                                      Toute la terre est pleine de sa gloire.
Tres sunt qui testimonium dant in coelo:                       Ils sont trois qui règnent aux cieux
Pater, Verbum, et Spiritus Sanctus:                                  Le Père, le Verbe et le Saint Esprit
Et hi  tres unum sunt.                                                             Et ces trois ne sont qu’un

Les Vêpres composées en 1610 sont considérées comme l’un des sommets de la production de Claudio Monteverdi dans le domaine de la musique religieuse.

Dans l’église catholique, les vêpres font partie des heures de l’Office divin. Il s’agit de la prière solennelle du soir.

Monteverdi réalise avec son oeuvre une synthèse entre « stile antico » ou « prima pratica » (style ancien) et « stile nuovo » ou « seconda pratica » (style nouveau). Le style ancien fait référence aux compositeurs du 16eme siècle et l’écriture polyphonique, alors que le style nouveau, lui fait référence à la mélodie accompagnée sur basse continue. Ce dernier style étant en partie apparu grâce à l’avènement de l’opéra .

L’oeuvre est composée pour double choeur, chanteurs solistes, deux violons, deux cornets à bouquin et un ensemble instrumental avec basse continue.

Le concerto duo seraphim est écrit pour trois voix de ténor et basse continue.  Il s’agit dans la partition du numéro 7. Nous allons y étudier le rapport entre le texte et la musique du point de vue de l’harmonie et du figuralisme.

Généralités sur la pièce « Concerto duo seraphim

La première partie est à deux voix (deux séraphins) et la seconde partie à trois voix (ils sont trois).

La tonalité globale du morceau est sol mineur. L’écriture, qui oscille entre modalité et tonalité, donne à entendre de nombreuses vocalises (écriture pour soliste, proche de l’opéra) des passages contrapuntiques (canons) et des passages homorythmiques. Le terme « concerto » contenu dans le titre évoque le dialogue des différentes voix. (Ecriture concertante). Il ne faut pas le confondre avec le concerto pour instrument soliste et orchestre, si ce n’est le principe identique qui consiste à instaurer un dialogue musical entre différentes parties.

Pour des raisons de clarté auditive, les exemples audios seront ici donnés avec des sons de violoncelle, ceux ci étant préférables aux sons de voix synthétiques.

Première grande section

Tout commence sur un unisson des deux voix, qui se scindent ensuite sur la seconde moitié de la première mesure par le retard très expressif de note sensible.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2017/01/d_but_2_voix_.mp3

Début 2 voix.jpg

Sur le mot « clamabant » commence le jeu de réponses entre les deux chanteurs, ce qui illustre de manière très évidente l’idée du texte « deux séraphins criaient l’un à l’autre ». Nous avons ici un premier exemple de figuralisme. L’idée est également exprimée par une  ascension vers un apogée sur la mesure 6. L’écriture donne ici la part belle aux retards, ce qui rend la musique intensément expressive. Pour ce qui est de la tonalité, nous passons ici en si bémol majeur, ton relatif majeur de sol mineur, ce qui apporte à la musique cette clarté particulière. L’apparition du mi bécarre confère, elle, une couleur modale. (Voir accords sur partition).

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2017/01/duo_clamabant.mp3

duo clamabant 1.jpg

duo clamabant 2.jpg

Voici maintenant l’accompagnement joué par un luth et une contrebasse (virtuels..):

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2017/01/duo_clamabant_instr.mp3

C’est absolument magnifique. Les accords avec retard donnent une harmonie d’une très grande richesse.

Les deux voix se trouvent réunies sur la mesure 11.

Le mot « Sanctus » est mis en valeur par une vocalise bien particulière donnant à entendre de nombreuses notes répétées.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2017/01/vocalise_sanctus_duo.mp3

vocalise sanctus 1.jpg

vocalise sanctus 2.jpg

Cette vocalise va passer d’une voix à l’autre. Il en sera de même dans la seconde partie avec les trois chanteurs.

Mesures 18 à 21, sur les mots « Deus Sabaoth » (le Seigneur des armées), on va trouver une  ascension vers le second point culminant du passage, avec modulation en si bémol majeur. Une clarté incroyable émane de ce passage, qui sera repris dans la seconde partie avec les trois voix.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2017/01/sabaoth_duo.mp3

Sabaoth duo.jpg

Une nouvelle vocalise nous mène à la dernière phrase de cette première partie ; « toute la terre est pleine de sa gloire ». Pour illustrer cette idée de plénitude, Monteverdi va utiliser le canon comme principe d’écriture. Mesure 24, la première voix lance ce canon en ré mineur modal (éolien), puis la seconde fait ensuite son entrée dans la même mesure en sol mineur modal également (éolien également). Canon « à la quarte », la première voix débutant sur ré, la seconde sur sol.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2017/01/duo_canon1.mp3

duo canon.jpg

Cette première section se termine par une cadence parfaite en tonalité de sol mineur.

Deuxième grande section

Ils sont trois, qui témoignent au ciel

Un ténor se rajoute donc pour former la Trinité avec trois voix polyphoniques homorythmique, sur l’accord de sol mineur. Il s’ensuit une entrée en imitations à la quinte entre ces trois voix, sur le texte « qui testimonium dant in coelo », qui mène à une demi-cadence mesure 24.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2017/01/trio-dc3a9but.mp3

Trinité début.jpg

Puis sur une vocalise ascendante, les trois voix réalisent une seconde imitation sur les mots « Pater, Verbum, et Spiritus sanctus ».

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2017/01/vocalise_trinit_.mp3

vocalise Trinité.jpg

« Et hi tres unum sunt ». « Et ces trois » est dit sur un accord à trois sons. « Ne sont qu’un » est dit sur un unisson parfait, et cela sur les deux fois. Nous avons ici un bel exemple d’illustration très évidente des idées du texte par la musique.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2017/01/et_hi_tres.mp3

et hi tres.jpg

La suite sera une répétition avec amplification de ce qui a été dit dans la première partie à deux voix, la vocalise sur la mot « Sanctus » passant d’une voix à l’autre.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2017/01/sanctus_3_voix_audio.mp3

sanctus 3 voix 1.jpg

sanctus 3 voix 2.jpg

Revoici ensuite ce passage si intensément expressif sur les mots ‘Deus Sabaoth », amplifié également par rapport à la première partie puisque chanté par les trois voix.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2017/01/sabaoth_3_voix.mp3

sabaoth 3 voix.jpg

Pour terminer, Monteverdi reprend l’écriture en canon sur les mots « plena est omnis terra gloria eius ». Les entrées sont toujours à la quarte. (Ré, sol puis do). Le canon rigoureux se trouve entre les ténors 2 et 3. A la fin, on trouve une vocalise jubilatoire sur le mot « gloria ».

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2017/01/canon_3_voix.mp3

canon 3 voix 1.jpg

canon 3 voix 2.jpg

Voici maintenant la fin de cette pièce, avec un emprunt à la tonalité du quatrième degré do par la note si bécarre qui mène à une cadence plagale de de do mineur vers sol majeur, cet accord de sol majeur étant obligatoire du fait de cet emprunt.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2017/01/la_fin.mp3

la fin.jpg

Qu’est ce que la sixte napolitaine?

27 mardi Déc 2016

Posted by Pascal Rabatti in Cours

≈ 9 Commentaires

Étiquettes

La sixte napolitaine

La sixte napolitaine. Explication.

En musique, qu’est ce qu’une sixte napolitaine?

La réponse : un second degré rabaissé présenté en accord de sixte.

Explication

Tout d’abord il faut savoir que la musique occidentale est basée sur les enchaînements d’accords. Ces accords sont construits à partir d’une gamme. La gamme qui a servi de base à notre musique dite classique pendant plus de deux siècles est le mode ionien ou gamme de do majeur. Elle constitue le fondement de la musique  tonale, qui s’est épanouie  du début du 17eme siècle au début du 20eme. Il existe dans le système tonal deux type de gammes : les gammes majeures et les gammes mineures. Voici deux exemples ; la gamme de do majeur et son homonyme, la gamme de do mineur.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2016/12/les-gammes.mp3

les gammes.jpg

Cette gamme est constituée de degrés, au même titre qu’une échelle. D’ailleurs lorsque l’on parle de gamme, le terme d’échelle est aussi très souvent utilisé.

A partir de cette gamme, on va construire des accords parfaits qui correspondent à chacun de ses degrés. Pour construire un accord parfait, il suffit d’empiler des notes à distance de tierce les unes des autres. (Do ré mi, mi fa sol, etc..). 

Exemple ci dessous : les accords parfaits de tonique, second degré et dominante.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2016/12/accords.mp3

accrds de 2 5 et 1 séparés.jpg

Enchaînement qui n’est pas sans évoquer une célèbre pièce pour piano de Debussy..

Un enchaînement entre les premier et cinquième degrés avec retour sur le premier peut servir à terminer un morceau de musique. On le nomme cadence parfaite. Lorsque l’on prend un temps d’arrêt sur la dominante, on appelle cela une demi-cadence. La musique est alors en suspension.

Exemples ci dessous : une demi cadence suivie d’une cadence parfaite. Dans cet exemple, l’accord de sol (V) est présenté avec une septième, à savoir un fa. Il en sera de même pour les exemples suivants. 

 https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2016/12/dei-cad-cp.mp3

demi cad CP.jpg

Il existe un degré qui amène très souvent l’accord de dominante. Il s’agit du second degré de la gamme. Pour quelle raison? Cela est très logique. Lorsque l’on est dans le ton de la dominante, on s’aperçoit que le cinquième degré est en fait le second de la tonalité d’origine. Explication ci dessous.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2016/12/gammes-do-et-sol.mp3

gammes de do et sol.jpg

En ce qui concerne la sixte napolitaine, c’est ce second degré qui va nous intéresser ici. En jargon musical,il existe un terme que l’on utilise souvent, c’est le 1-2-5-1. Cela signifie que l’on donne à entendre un enchaînement d’accords qui part du premier degré (la tonique) pour aller sur le second degré puis le cinquième (la dominante) pour enfin se résoudre sur un retour au premier degré. Il existe plusieurs manières de présenter un 1-2-5-1. En voici quelques exemples dans lesquels pour des raisons de clarté seul le second degré est présenté différemment à chaque fois. Il va de soi que les possibilités sont multiples, et que cette multiplicité va s’accroître avec les différentes manières de présenter chaque accord.

Exemples d’enchaînements 2-5-1 en tonalité majeure

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2016/12/2-5-1-maj.mp3

2 5 1 majeur.jpg

Exemples d’enchaînements 1-2-5-1 en tonalité mineure

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2016/12/2-5-1-min.mp3

2 5 1 mineur.jpg

Dans le cas de la sixte napolitaine, le second degré se trouve rabaissé d’un demi ton, pour des raisons expressives. Exemple: en do, le second degré est la note ré. Pour obtenir un second degré rabaissé, on va donc faire entendre un ré bémol. Voici un exemple d’enchaînement  1-2-5-1, tout d’abord sans puis avec sixte napolitaine, en tonalité majeure puis mineure. Le ré bémol est dans la voix du haut.

Exemples d’enchaînements 2-5-1 avec sixte napolitaine

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2016/12/6te-napo.mp3

avec 6te napo.jpg

Il faut maintenant donner une explication supplémentaire. En effet, pourquoi ce terme de sixte ? Tout simplement parce que l’accord de second degré rabaissé est présenté dans son premier renversement.

Les choses se compliquent..

Mais cela est en fait assez simple. Il faut savoir qu’un accord parfait peut être joué de trois manières différentes : état fondamental suivi de deux renversements. Prenons comme exemple l’accord de base, c’est à dire do majeur. On peut le présenter ainsi : do-mi-sol, mi-sol-do et sol-do-mi,.et chacune de ces présentations  peut se chiffrer. A l’état fondamental (do-mi-sol), on parle d’accord de quinte car on entend l’intervalle do (ré mi fa) sol, intervalle compris entre cinq notes. Dans le premier renversement (mi-sol-do), on parle d’accord de sixte car on entend l’intervalle mi (fa sol la si) do, intervalle compris entre six notes. (Pour des raisons de clarté, laissons de côté le second renversement, même s’il figure sur l’exemple ci-dessous).

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2016/12/renversements.mp3

renversements.jpg

Dans le cas de la sixte napolitaine, c’est donc le premier renversement qui est concerné. En do, l’accord de second degré est donc un accord de ré (ré-fa-la). Si on le baisse d’un demi-ton, on va obtenir un accord de ré bémol (ré bémol-fa-la bémol). Pour avoir enfin cette sixte napolitaine, on va présenter cet accord de ré bémol dans son premier renversement. (fa-la bémol-ré bémol). Exemple ci-dessous.

2eme degré renversé.jpg

Dans le cas de l’enchaînement 2-5-1 avec sixte napolitaine, le second degré rabaissé est donc présenté en premier renversement. (Accord de sixte).

Une dernière précision 

Il est très fréquent que l’accord de sixte napolitaine mène à un accord de premier degré dans son deuxième renversement, que l’on appelle la quarte et sixte. Voici deux exemples, en tonalité majeure puis mineure.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2016/12/6te-napo-av-64.mp3

6te napo av 64.jpg

Exemples d’utilisation de la sixte napolitaine.

Le premier est extrait de l’opéra Don Giovanni de Mozart. Pendant le deuxième acte, lors du septuor, Donna Anna dit à Don Ottavio son désir de vengeance, en une magnifique phrase dont voici la partie finale. (Ne pas hésiter bien entendu à écouter l’original). Cette phrase se termine en ut mineur avec une sixte napolitaine particulièrement parlante.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2016/12/donna-anna.mp3

Donna Anna 1.jpg

Donna Anna 2.jpg

Si l’on regarde bien, Mozart propose déjà l’accord dans les mesures qui précèdent. Essayez de le retrouver!

Un autre exemple, extrêmement connu : La chanson du « Toréador » de Carmen de Georges Bizet. En voici l’introduction. Ont été supprimées pour des raisons de clarté les notes ornementales.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2016/12/toreador_pour_6te_napo.mp3

toreador 1.jpg

toreador 2.jpg4

toreador 3.jpg

toreador 4.jpg

Enfin, un troisième exemple, fameux lui aussi, extrait de « La Danza » de Rossini:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2016/12/la_danza.mp3

la danza.jpg

Comme on peut le constater, l’enchaînement 1-2-5-1 avec sixte napolitaine est particulièrement expressif. Mozart et Schubert, pour ne citer qu’eux, en offrent de nombreux exemples mais ils ne sont pas les seuls. Il faut pouvoir reconnaître cet enchaînement à l’écoute. Pour indice, il est souvent proposé à la fin d’une phrase.

Bonne découverte!

Le rapport entre la musique et l’image. Trois exemples.

05 lundi Oct 2015

Posted by Pascal Rabatti in Cours

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

King Kong, Max Steiner, Morricone, Musique au cinema, rapport musique-image, Tom et Jerry

Musique et image.

Cours donné dans le cadre des thématiques de classe de seconde à option musique. 

Essai de synthèse.

Trois exemples ont été proposés pour illustrer la thématique. Une scène du film King Kong de 1933 (musique de Max Steiner), une scène du film Bird de Clint Eastwood (bande son faite de jazz Be-bop avec solos signés Charlie Parker), et un dessin animé de la série de courts métrages Tom et Jerry (musique de Scott Bradley).
Pour la scène de King Kong, (la tribu livre la jeune femme à Kong), jouée à une époque encore proche du cinéma muet, il va de soi que la musique va revêtir une importance capitale. Il s’agit en effet d’une scène où le dialogue est absent et dans laquelle seul va compter l’effet visuel. La musique de Steiner va donc chercher à renforcer les images en les illustrant de plusieurs manières.
Tout d’abord, la musique est là pour  grossir  les effets. Le thème tribal que l’on entend tout d’abord joué par les vents et en particulier les cuivres est à la fois diégétique (présence à l’image des percussions) et extra diégétique (présence hors champ d’un orchestre entier inconcevable bien entendu dans la situation). Ce thème est très rythmique, pesant et appuyé, en rapport avec la danse farouche qu’exécutent les membres de la tribu qui s’apprêtent à accomplir un rite païen, un sacrifice. Du point de vue de l’écriture, ce thème donne à entendre des notes tout d’abord descendantes très marquées, très accentuées, contrecarrées par un motif ascendant en arpèges, ce dernier motif menant à l’énoncé du thème associé à la jeune femme.

Voici donc ce premier thème:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2015/10/th_me_tribal_king_kong.mp3
Le second thème d’un caractère très différent est joué plutôt par les cordes. Il est globalement de courbe ascendante correspondant à l’état de panique psychologique dans lequel est plongée la protagoniste. Une succession en paliers de brèves phrases chromatiques dans un esprit de tension croissante, tant il est vrai qu’en musique, une montée vers l’aigu est souvent génératrice de tension. Ce thème de cordes peut ici être appelé leitmotiv, terme d’origine allemande désignant un motif musical associé à une idée, un sentiment, une action ou un personnage. C’est cette dernière association qu’il faut considérer ici. A chaque apparition à l’image de la jeune femme, on retrouve ce thème.

Voici donc pour pouvoir écouter ce thème indépendamment du reste:

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2015/10/king_kong_leitmotiv_2_1.mp3

Le principe du leitmotiv n’est bien entendu pas nouveau. Il a été durant le 19eme siècle extrêmement utilisé dans le domaine de l’opéra, par des compositeurs comme Georges Bizet ou Richard Wagner. L’illustration de l’image par ce procédé de leitmotiv correspond à une illustration  en profondeur , une mise en relief qui nécessite pour sa perception consciente un bon niveau d’écoute de la part du spectateur. Le thème tribal se situe davantage dans le domaine du premier degré. Il est plus aisément perceptible, ainsi que certaine autres illustrations telles que l’ascension ou la descente des marches, que la musique accompagne de montées ou de descentes chromatiques, ou encore l’arrivée de Kong, bien marquée par de gros accords en crescendo appuyés de notes tenues de trombones joués par l’orchestre.
Le rapport musique-image se situe dans cette scène entre l’illustration purement figurative et l’illustration psychologique, dans une corrélation finalement assez complexe.
Intéressante est la manière avec laquelle Max Steiner mêle ses deux thèmes de façon à bien montrer comment ces personnages se trouvent unis dans cette scène, ceci à la manière des grands compositeurs classiques qui dans leurs œuvres donnent en général à entendre plusieurs thèmes de caractère différent qui s’entremêlent et s’influencent mutuellement. (Ecouter les symphonies de Mozart ou de Beethoven par exemple). Dans la musique de Steiner, les deux thèmes sont alternés mais parfois ils se mélangent, dans un travail d’écriture de dimension symphonique. Max Steiner (1888-1971) connaît la musique. Il est à l’origine un compositeur autrichien né à Vienne qui a reçu l’enseignement de Gustav Mahler et de Johannes Brahms. Il a émigré aux Etats-Unis en 1914 où il a travaillé comme chef d’orchestre et arrangeur à New York. La musique de King Kong a véritablement lancé sa carrière, et il a par la suite signé les musiques de films cultes tels que Casablanca ou Autant en emporte le vent.

Voici cette musique magnifique. La scène du sacrifice qui a été commentée se trouve ici à 11 minutes et 15 secondes.

Dans la scène du film Bird, le rapport musique-image est un peu différent. Tout d’abord, il s’agit d’un film dont le sujet principal est la musique. (A la fin d’ailleurs, Clint Eastwood dédie son film à tous les musiciens).
Ici le dialogue est prépondérant. La scène débute par une conversation entre Charlie Parker et un inconnu (on saura par la suite qu’il s’agit du trompettiste Red Rodney) avec un fond sonore que l’on pourrait croire extra-diégétique, mais on ne tarde pas à s’apercevoir que cette musique est diégétique puisqu’elle sort du bar qui se trouve à coté alors que Bird sous l’emprise de la drogue est en train de monter son saxophone. Ici elle est juste hors champ.
L’entrée des deux hommes dans le bar est marquée par la musique plus forte, qui entre alors dans le champ. La porte se referme et nous pénétrons dans le lieu. Parker (incarné ici par l’excellent Forest Whitaker), joue tout d’abord hors de la scène. Il joue « out » pour préparer son entrée, comme s’il chauffait son instrument. Au moment de la cadence, il entre en scène et attaque un chorus endiablé, sous les applaudissements. D’un point de vue scénique, tout est fait pour que cette entrée soit la plus théâtrale possible. Ici, le spectateur doit être subjugué, et cela fonctionne.
Après un fondu enchaîné, on va changer totalement d’univers pour se retrouver le matin dans une chambre dans laquelle Bird et une jeune femme sont en train d’écouter un extrait de l’Oiseau de feu d’Igor Stravinsky. La musique est ici diégétique. L’intérêt du choix de l’extrait est très grand. Eastwood choisi ici l’un des moments les plus mélodiques de l’oeuvre, la Ronde des princesses, pour que la rupture avec la scène précédente soit maximale. (Il existe en effet dans l’oiseau de feu des moments extrêmement puissants et rythmiques qui ici n’auraient pas convenu à l’effet cinématographique voulu).
Après un dialogue (Lui :..Je parle de Stravinsky. Elle : moi aussi, nous allons chez le même dentiste.) , nous nous retrouvons en voiture sur le chemin du domicile de Stravinsky. Bird finit par sonner à la porte pour apercevoir le musicien. On entend à ce moment là l’extrait de l’Oiseau de feu en hors champ, qui correspond à l’état psychologique de Bird. En effet, le spectateur entend cette musique alors que Bird l’entend vraisemblablement dans sa tête. Le moment où apparaît Stravinsky est marqué par la musique en crescendo. La porte se referme et on entend alors une petite phrase de saxophone extra-diégétique qui semble rappeler que Parker est avant tout jazzman.
La musique semble ici mettre l’accent sur deux mondes inconciliables, vie bohème et confort bourgeois d’un musicien installé (« comment avoir une maison comme celle là » dit Bird à la fin de la scène). Il faut savoir cependant qu’Igor Stravinsky adorait le jazz et que ce style l’a même influencé dans certaines de ses œuvres. (Ebony concerto pour orchestre d’instruments à vent ou une pièce intitulée Ragtime, par exemple). Charlie Parker et Stravinsky se sont d’ailleurs rencontrés brièvement à plusieurs reprises. A la sortie du film Bird, Chan Parker, épouse du musicien racontait que son mari était tellement impressionné qu’il arrivait à peine à s’exprimer.

En ce qui concerne le court métrage de la série Tom et Jerry, on peut dire que la musique illustre l’action au premier degré avec parfois des subtilités que seule une analyse approfondie peut mettre en valeur.
La musique qui accompagne l’image est ici très narrative, avec une dominante jazzy et parfois des allusions à la comédie musicale, à la musique classique et à des thèmes préexistants. Elle utilise de très nombreux bruitages et effets instrumentaux (cuivres avec sourdines, glissando de trombone, pizzicati de cordes, bruits divers) ainsi qu’une très grande virtuosité de la part des instrumentistes (phrases très rapides de cordes et de xylophone lors des poursuites par exemple), tout ceci pour renforcer les effets comiques.
L’orchestration est ici extrêmement variée, ainsi que les tempi et la thématique, ceci en fonction des gags qui s’enchaînent. On passe en effet très facilement d’une orchestration très fournie à un instrument soliste, d’un tempo très alerte à un tempo lent, etc.. Ecoutons pour nous en rendre compte le John Wilson Orchestra qui interprète cette musique.

Dans l’extrait proposé est jouée une mélodie de berceuse qui apparaît plusieurs fois lors de la séquence. (Cette même mélodie est d’autre part souvent utilisée dans les dessins animés de cette période). Ce thème est au début suggéré par la clarinette puis par les cordes, au moment où une petite fille quelque peu cruelle joue avec le chat Tom en le considérant comme son enfant. Il apparaitra ensuite de manière diégétique, dans le champ, au moment ou la souris pose sur le lecteur un disque contenant cette musique. Les variations sur le thème de la berceuse correspondent à une subtilité d’écriture qui situe le rapport musique-image loin de l’illustration sonore au premier degré, et qui peut se rapprocher du thème de la jeune femme sacrifiée dans King Kong.
Entre diégèse et extra-diégèse, on trouve ici aussi de nombreux exemples parlants extrêmement faciles à percevoir. (Le tourne disque, les moustaches de Tom utilisées comme des cordes de guitare, etc..).
Dans le dessin animé enfin, une très grande importance est donnée aux mouvements, le rythme et le tempo des différentes musiques étant souvent calés sur les déplacements des protagonistes. (Marches, poursuites, statisme, etc..). Là aussi la perception du rapport musique-image est immédiate.

L’illustration sonore au cinéma est un domaine très vaste, qui a changé en fonction des époques et des styles mais de nombreux procédés restent les mêmes. Voici pour résumer différents moyens mis en œuvre par les auteurs de bande son.
– Effets instrumentaux. Orchestration.
-Thème. Leitmotiv.
– Ecriture. Variations sur thèmes.
– Bruitages.
– Rythme. Tempo.
– Changements de climats. Renforcement de l’action (poursuite, suspense, mouvement, etc..).
Liste non exhaustive

Actuellement de nombreuses super-productions (Pirates des Caraïbes, Le Seigneur des anneaux, Exodus, par exemple) ont opté pour une musique continue, un discours fleuve dans lequel apparaissent régulièrement des thèmes leitmotiv.
Certains films optent pour une absence presque totale de musique pendant l’action. (The Lunch Box, film indien de Ritesn Batra). Cet exemple mérite d’être signalé car il reste rare.
Depuis le pianiste qui joue en continu durant la projection d’un film muet à nos jours, la musique au cinéma a été l’objet d’une évolution qui a permis aux compositeurs qui s’y sont consacrés de produire de nombreux chefs d’oeuvre. Certaines œuvres ont même pu être extraites de leur contexte cinématographique pour devenir des pièces de concert (Mission, de Morricone), mais en général les musiques pensées pour l’illustration de l’image restent indissociables de celle ci.

Le concerto pour piano. Mozart et Ravel. Aperçu.

05 lundi Oct 2015

Posted by Pascal Rabatti in Cours

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

concerto numéro 23 de Mozart, concerto pour la main gauche, le concerto pour piano et orchestre

Le concerto pour piano et orchestre.

Genre important dans l’histoire de la musique dite classique, le concerto pour instrument soliste et orchestre naît au 17eme siècle pour s’épanouir durant le 18eme siècle et trouver une sorte d’apogée au 19eme. De nos jours il arrive que l’on compose encore des pièces de ce genre même si cela reste relativement rare. (Concerto pour violon de Mantovani par exemple).
Pendant l’ère romantique, le concerto pour piano permet à des compositeurs interprètes de leurs propres œuvres de se mettre en valeur, ceci notamment grâce au perfectionnement de l’instrument qui leur permet de jouer dans des salles de plus en plus grandes et donc des publics de plus en plus fournis. Parmi ces virtuoses, les plus célèbres seront Franz Liszt et Frédéric Chopin.

Petite histoire du piano. (A ses débuts appelé piano-forte)
Né au tournant des XVIIe et XVIIIe siècles, de l’atelier du facteur italien Bartolomeo Cristofari, le piano devient rapidement l’instrument-roi du XIXe siècle.
Sa facture n’a cessé d’évoluer afin de répondre aux besoins de puissance de son et de rapidité d’exécution exprimés par des pianistes de plus en plus virtuoses.
La pratique du piano, réservée au XVIIIe siècle à une élite aristocratique, se démocratise tout au long du siècle suivant. L’instrument orne les salons bourgeois et il est enseigné aux jeunes filles de bonnes familles.
Au XXe siècle, il offre aux compositeurs un moyen d’échapper à la tonalité pour développer d’autres langages musicaux.
La période entre 1830 et 1850 constitue l’âge d’or de la facture de piano en France. Celle-ci n’importe plus ses pianos d’Angleterre mais en produit et en exporte. Paris devient l’un des grands centres de la facture de pianos.
Sur les sept grand noms de facteurs français, trois dominent, tous parisiens : Erard, Pleyel, Pape.
En Allemagne, les grandes marques seront Bösendorfer et Steinway. Actuellement ce sont les modèles grand concert de Steinway and sons qui équipent les salles les plus prestigieuses.
La maison Erard s’impose par ses grands pianos à queue. Sébastien Erard met au point, entre 1820 et 1823, le piano à double échappement. Cette invention, qui permet une plus grande rapidité de jeu, place la maison Erard au premier plan des facteurs européens jusqu’au milieu du XIXe siècle.
En 1807, Ignace Pleyel fonde une manufacture de pianos et de harpes qui s’impose très vite comme la grande rivale d’Erard. Associé à son fils Camille (1788-1855) à partir de 1815, puis avec le célèbre Karlbrenner, il équipe ses instruments dès 1826 d’un cadre en fer et d’un sommier à pointes de cuivre, mais il reste fidèle à la mécanique à échappement simple.

Deux exemples de concerto pour piano et orchestre.

Tout d’abord le concerto numéro 23 en la majeur de Mozart.

Cette œuvre fut composée en 1786. Le compositeur est alors en pleine maturité. (Il décède en 1791).
Ce concerto est écrit suivant le schéma classique de trois mouvements bien distincts, le premier rapide, le second lent, et le troisième rapide tout comme le premier. Il faut savoir que la plupart des concertos pour soliste et orchestre obéissent à ce principe. Le mouvement lent du 23eme concerto fait partie des œuvres les plus connues de Mozart. Il a été notamment utilisé au cinéma. (ex: L’Incompris réalisé par Comencini ou Le nouveau monde de Terrence Malick)
A l’origine cette œuvre est écrite pour piano-forte (l’ancêtre du piano actuel) accompagné par un orchestre à cordes, deux clarinettes, deux bassons, deux cors et un flûte. De nos jours l’oeuvre est jouée sur des pianos bien entendu modernes accompagnés par un orchestre symphonique réduit. Certains interprètes ont tenté de retrouver les sonorités de l’époque de Mozart en l’interprétant sur un piano-forte.
Le 23eme concerto, œuvre dans l’ensemble lumineuse démarre dans son premier mouvement en une forme sonate qui permet au compositeur d’exposer ses deux thèmes à l’orchestre avant de les reprendre au piano. Le dialogue soliste orchestre qui suivra permettra le développement de ces thèmes. On sent en écoutant l’oeuvre que l’opéra n’est pas loin. Il arrive au détour d’une page que l’on s’attende à voir surgir un personnage. Il faut savoir que ce concerto a été composé par Mozart la même année que l’un de ses plus célèbres opéras, « Les Noces de Figaro ». Cela se ressent donc forcément dans son écriture purement instrumentale.

Voici quelques exemples en partition et en document audio.

Tout d’abord le thème A du premier mouvement de ce concerto. .

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2015/10/th-a-23eme.mp3

th a 23eme 1.jpg

th a 23eme 2.jpg

th a 23eme 3.jpg

th a 23eme4.jpg

Les annotations sur la partition permettront de suivre les caractéristiques de l’écriture.

 

Voici maintenant le thème B

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2015/10/th-b-23eme.mp3

thB 3eme 1.jpg

thB 23eme 2.jpg

thB 23eme3.jpg

thB 23eme 4.jpg

On ne peut ici qu’admirer la science de l’écriture alliée à une prodigieuse invention mélodique.

 

Comme il a été dit plus haut, l’opéra n’est jamais loin.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2015/10/passage-opera-23eme.mp3

moment theatre 1.jpg

moment theatre 2.jpg

moment theatre 3.jpg

 

Par la suite, le piano reprendra donc ces deux thèmes que Mozart développera dans son dialogue soliste-orchestre.

Voici tout d’abord le thème A lors de l’entrée du soliste

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2015/10/th-a-23eme-piano.mp3

th A 23eme piano.jpg

 

On remarque bien entendu que le piano est obligé de « remplir ». Mozart rajoute donc une basse d’Alberti, des arpèges et des gammes.

 

Voici maintenant le thème B, repris par le piano dans le ton de la dominante.

https://marenzo-ars-musica.com/wp-content/uploads/2015/10/th-b-23eme-piano.mp3

th B 23eme piano..jpg

 

Lors du développement l’on pourra entendre des passage absolument merveilleux issus de cette exposition. Mozart donnera même un troisième thème. Ne pas hésiter donc à écouter ce concerto dans son intégralité. Le mouvement lent fait partie des pages les plus bouleversantes écrites par Mozart. Le dernier mouvement est d’une très grande vitalité.

 

Quelques questions et leurs réponses.

Qu’est-ce qu’un concerto ? Une œuvre musicale donnant lieu à un dialogue entre un instrument soliste et un orchestre. Il arrive qu’un concerto n’aie pas d’instrument soliste. C’est le cas pour les concertos Brandebourgeois de J.S.Bach. Cela reste cependant rare. Le terme concerto vient du verbe concerter (en italien concertare) qui correspond bien à cette idée de dialogue.

A quelle époque nait le genre ? Au 17eme siècle. Ce genre est lié en grande partie à l’évolution de la facture et à l’émancipation de la musique instrumentale. Grâce notamment à l’avènement de l’opéra apparaissent les premiers orchestres. Les « sinfonias », sortes d’intermèdes instrumentaux joués lors des opéras seront les prémices des genres que l’on a appelé par la suite symphonie et concerto.

Qu’est-ce qu’une forme sonate ? Une forme très utilisée par les compositeurs germaniques au 18eme siècle qui consiste à exposer plusieurs thèmes de caractère différent (généralement 2) puis à développer ces thèmes avant de les réexposer de manière non textuelle. La forme sonate va perdurer pendant le 19eme siècle et même pendant le 20eme. Le concerto pour la main gauche de Ravel est écrit suivant ce principe.

Qu’est-ce qu’une cadence dans un concerto ? Un moment durant lequel l’orchestre s’arrête pour laisser place au soliste. C’est généralement là que le soliste doit donner la preuve de sa virtuosité. A l’époque de Mozart, les cadences étaient improvisées, le compositeur étant souvent le soliste. Au 19eme siècle avec Beethoven, les cadences seront écrites. Beethoven a d’ailleurs composé des cadences pour les concertos de Mozart.

Deuxième exemple : le concerto pour la main gauche de Maurice Ravel

Ici, changement d’univers. Une analyse très détaillée de ce concerto est proposée sur ce site. En voici tout de même un résumé.

Dans sa conception, le concerto pour la main gauche est une œuvre atypique puisqu’écrite en un seul mouvement.

Le concerto pour la main gauche est une oeuvre tourmentée, mouvante, tout en contrastes qui allie la noirceur à une lumière souvent blafarde et qui correspond à une époque où le monde s’apprête à replonger dans le désastre, à l’orée des années 30. Cette oeuvre est en effet composée entre 1929 et 1931. Ravel avait été profondément marqué par la guerre de 14-18 et cela s’est ressenti dans certaines de ses oeuvres dont ce concerto.
Tout débute par ce premier thème exposé dans les ténèbres de l’orchestre. Sur un motif tournant joué par les contrebasses sur les cordes à vide, il apparait au contrebasson. Après l’introduction orchestrale, en crescendo avec montée vers l’aigu, ce thème sera rejoué, appaisé, par le piano, lors de la cadence qui suit l’introduction d’orchestre.
Le second thème joué par les cors est exposé également dès le début de l’oeuvre. En effet, il succède immédiatement au premier, amenant un peu de couleur dans cette noirceur initiale. Ce passage pourrait évoquer la naissance du monde. Mais un monde quelque peu inquiétant. La suite de l’oeuvre confirmera ces éléments joués lors de l’exposition.
Après la première cadence de piano, l’orchestre reprend le premier thème en tutti. Moment grandiose qui se terminera quelques instants plus tard avec un rythme de Habanera (cher à Ravel) suivi d’un decrescendo.
Troisième idée. Ce troisième thème d’une infinie douceur est joué par le piano. Il faut ici admirer la science de l’écriture. On entend en effet un contrepoint dans lequel deux voix sont savamment entremêlées dans les cinq doigts de la main gauche de manière à donner réellement l’illusion que jouent les deux mains du soliste. Ce thème est amené par un changement de climat, du majeur au mineur, lors du passage orchestral qui le précède. Economie de moyen d’une très grande efficacité et d’une très grande expressivité. En une seconde à peine, la musique bascule et change d’univers.
Ce moment de calme, de respiration sera interrompu par une redite du premier thème, répété de manière inexorable en paliers ascendants. Ascension irrésistible vers un des climax de l’oeuvre qui va faire chuter de manière très brutale la musique dans le passage central, sorte de jazz démoniaque qui va donner lieu à une sorte de lutte entre le soliste et tout l’orchestre. Ce passage, non dénué d’humour (humour souvent grinçant typiquement ravélien) donne à entendre un soliste dans l’esprit d’une improvisation qui répond à des interventions d’orchestre en gammes descendantes. Au milieu de cette noirceur, de manière très surprenante survient un passage léger, presque enfantin, une sorte de boîte à musique dans laquelle le piccolo tient la partie principale. Puis c’est le retour au jazz. Le basson soliste reprend à son compte le thème B. Ce thème va se trouver répété lui aussi avec à chaque reprise un rajout d’instruments. Passage de plus en plus monstrueux, dissonant, mêlant en un tutti démoniaque le soliste et l’orchestre. Ce moment sera brusquement interrompu par le retour de la boîte à musique. Ravel brise ainsi une musique mécanique en la remplaçant par une autre, tout aussi mécanique mais de caractère radicalement différent.
Puis l’orchestre entame sa dernière ascension. Un motif répété de plus en plus fort qui va donner lieu pour finir à une sorte de désagrégation, une chute vers le grave qui amène l’oeuvre à la dernière cadence du soliste.
Cette cadence, l’un des plus beaux solos de piano jamais écrits, va être une sorte de récapitulation de tout ce qui a été dit précédemment, hormis le passage central. En effet, les trois thèmes vont se trouver successivement réexposés par le piano. Cela commence par le second thème, puis le troisième, et enfin le premier, qui par paliers ascendants va mener à la fin de l’oeuvre, par le biais d’un retour au second thème, une sorte de rappel du début alors qu’il était joué par les cors. Dans une telle œuvre, rien n’est laissé au hasard et une idée exposée à un moment donné réapparaîtra forcément à un autre moment.
Peu à peu, comme il avait disparu, l’orchestre se reconstitue. De nouveau, comme un dernier soubresaut, la musique va monter vers un climax puis en quelques secondes se terminer par le jazz central, sorte de coda qui amène le tutti en une dernière vision démoniaque à l’accord final. Nous sommes ici dans l’esprit de la fin du boléro du même auteur, musique dans laquelle on se dirige de manière inéluctable vers le chaos final. Il en est de même pour une autre œuvre du compositeur, La Valse.
Mozart et Ravel. Deux univers musicaux différents pour deux époques différentes. Du classicisme à la période moderne, le genre du concerto pour piano permet bien d’appréhender deux visions du monde à travers deux manières de concevoir l’écriture musicale. Pourtant des points communs subsistent, le principal étant l’utilisation de la forme sonate comme principe de composition. L’idée perdure à travers les ages, cette idée qui consiste en la rencontre de deux voire trois thèmes, trois entités qui se confrontent, se mélangent pour donner lieu à une œuvre. Ravel reprend à son compte ces schémas classiques pour les accommoder à sa manière moderne.
Comme tout compositeur, Ravel vénérait Mozart. Il a d’ailleurs prétendu s’être aidé de son quintette avec clarinette pour composer le second mouvement de son autre concerto pour piano (à deux mains celui là), le concerto en sol, autre œuvre incontournable de la période moderne.
Les époques passent, mais les genres et les structures perdurent. Les formes classiques (forme sonate, forme ABA, forme rondeau, etc..) restent des cadres dans lesquels peut se couler l’inspiration des musiciens. Peu d’entre eux ont écrit sans système. Certain ont révolutionné le langage en désagrégeant ces formes, d’autres s’y sont maintenus. Ravel fait partie de ces derniers.

Il existe sur ce même site une analyse très détaillée du concerto pour la main gauche. Il ne faut pas hésiter à aller la consulter. 

Souscrire

  • Articles (RSS)
  • Commentaires (RSS)

Archives

  • août 2021
  • avril 2020
  • mars 2020
  • septembre 2019
  • février 2019
  • janvier 2019
  • octobre 2018
  • septembre 2018
  • juin 2018
  • février 2018
  • juin 2017
  • mars 2017
  • janvier 2017
  • décembre 2016
  • novembre 2016
  • octobre 2016
  • septembre 2016
  • octobre 2015

Catégories

  • Actualité
  • Analyses musicales
    • Adagio et fugue en ut mineur de Mozart
    • Concerto pour la main gauche de Maurice Ravel
    • L'Offrande Musicale de Bach
    • Le voyage d'Hiver de Schubert
  • Compositions personnelles
  • Cours
  • Non classé

Méta

  • Créer un compte
  • Connexion

Propulsé par WordPress.com.

  • S'abonner Abonné
    • marenzo ars musica
    • Vous disposez déjà dʼun compte WordPress ? Connectez-vous maintenant.
    • marenzo ars musica
    • S'abonner Abonné
    • S’inscrire
    • Connexion
    • Signaler ce contenu
    • Voir le site dans le Lecteur
    • Gérer les abonnements
    • Réduire cette barre
 

Chargement des commentaires…