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~ un site consacré à la musique, analyse musicale, concerts, composition.

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Archives de Catégorie: Cours

Le rapport texte-musique.

23 mercredi Jan 2019

Posted by Pascal Rabatti in Cours, Non classé

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le figuralisme en musique, Le rapport texte-musique, texte et musique

Cette thématique concerne toute œuvre musicale faisant appel à un texte, avec ou non présence de celui-ci. Les exemples à étudier peuvent être puisés dans l’opéra, la musique religieuse, le lied (pièce vocale allemande consistant en la mise en musique d’un poème), la mélodie (équivalent français du lied) la chanson. 

Dans le cas d’une absence de texte, il existe de très nombreuses œuvres pour orchestre avec support littéraire. Ce sont des œuvres de musique à programme (musique descriptive) appelées poèmes symphoniques. Parmi les plus fameux : Mazeppa, de Franz Liszt, d’après un poème de Victor Hugo, et Ainsi parlait Zarathoustra de Richard Strauss, d’après l’œuvre de Nietszche, ceci pour ne citer que deux exemples.

Cet article ne traitera en revanche que des oeuvres musicales avec présence de texte.

Il existe plusieurs manières d’illustrer un texte par la musique.

Quand un compositeur met en musique un texte, il va en souligner le sens par différents moyens.

–Rapport entre texte et ligne mélodique : 

le figuralisme

Un figuralisme est une représentation, parfois au premier degré, des idées littéraires par la musique. Les figuralismes sont très présents dans la musique religieuse, l’opéra et certaines chansons. Cette notion s’est affirmée durant le 16eme siècle, notamment grâce au madrigal italien. Ce que l’on a appelé madrigalisme est en effet une imitation du mot par la musique, qui peut se faire de différentes manières:

-D’un point de vue symbolique tout d’abord. Par exemple, pour décrire le ciel, une mélodie peut monter dans l’aigu. Pour décrire la terre, elle peut descendre. En témoigne l’exemple suivant, dans le thème principal du Libera me du Requiem de Gabriel Fauré. 

Cette image a un attribut alt vide ; son nom de fichier est libera-me-1.jpg

Comme autre exemple, on pourrait citer l’air du catalogue de l’opéra Don Giovanni de Mozart, au moment où Leporello évoque deux types de femme, la petite et la grande. « La piccina » est dit en valeurs très brèves, « la granda maestosa » en valeurs longues. Le figuralisme rajoute ici au côté burlesque de la scène.

Henry Purcell, dans une pièce intitulée Hear my prayer, (Hear my prayer oh Lord and let my crying come unto thee : entends ma prière oh Seigneur et laisse mes pleurs venir à Toi), illustre son texte de la manière suivante:

Hear my prayer: mélodie rectotonale, supplication psalmodique.

My crying: « mes pleurs » est évoqué par une ligne torturée hésitant entre si bémol et si bécarre.

Enfin l’idée globale du texte (laisse mes pleurs venir à Toi), est évoquée par une ligne mélodique ascendante.

Ecoutons cette (trop) brève pièce dans son intégralité. L’ensemble est une polyphonie vocale à huit voix qui monte progressivement vers un climax (sommet expressif), véritable architecture sonore qui pourrait évoquer les coupoles de certains édifices religieux, qui portent toujours le regard vers le point central où siège la lumière. Cette montée progressive rend ici compte du sens global du texte.

Comme dernier exemple, restons avec Henry Purcell dans une autre polyphonie vocale, Man that is born of a woman, pièce extraite de la musique pour les funérailles de la reine Mary. Dans la seconde partie, les ténors énoncent:

He cometh up (il grandit): ligne mélodique ascendante.

And is cut down like a flower (et est fauché comme une fleur): ligne mélodique descendante.

Concernant le symbolisme musical, il va de soi qu’il en existe une infinité d’exemples. Il suffit d’en comprendre le principe pour pouvoir remarquer ce procédé dans d’autres partitions. 

Dans cette pièce, l’écriture participe également à l’évocation du texte. En effet, lorsque le choeur entonne la phrase: « he fleeth as it were a shadow, and never continueth ». (Il fuit comme s’il était une ombre et ne se maintient jamais en un séjour), le contrepoint se resserre, en donnant l’impression d’une fuite perpétuelle ne trouvant sa résolution que dans l’accord final. Nous sommes ici en présence d’une métaphore musicale, qui donne un rapport très profond entre texte et musique.

La métaphore est un procédé sans doute plus abstrait que le symbolisme. Une dissonance, par exemple, peut traduire la souffrance. Pour illustrer cette idée, je propose un extrait de la cantate 137 de Bach. Aus der Tiefe rufe ich Herr zu Dir. (De l’abîme, je crie Seigneur vers toi).

Après une évocation symbolique de l’abîme, avec une ligne vocale qui part de l’aigu pour chuter vers le grave, (aus der Tiefe), l’expression « je crie » (rufe ich) est illustrée par un retard, une dissonance qui par la tension qu’elle génère va participer de manière très subtile à une évocation en profondeur du sens de ce texte.

Ce procédé se retrouve dans la pièce de Purcell citée plus haut, (Hear my prayer), avec un accord dissonant à chaque apparition du mot « crying ».

–Rapport entre texte et harmonie.

Un accord, une succession harmonique peuvent à leur tour souligner une idée littéraire. Une modulation (changement de tonalité) peut renforcer un sentiment ou une situation. L’arrivée d’un nouveau personnage sur scène, par exemple, peut être marquée par un changement de tonalité.

En voici un magnifique exemple, avec une modulation par enharmonie dans le septuor du deuxième acte de Don Giovanni. Pour résumer la scène, Leporello cherche à s’enfuir. Il trouve une porte dans l’obscurité et va pour l’ouvrir. Cependant cette porte s’ouvre sur Don Ottavio et Donna Anna. La musique va ainsi moduler de façon très surprenante de si bémol majeur vers ré majeur, modifiant totalement l’éclairage de la scène.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2019/01/septuor-dg-1.mp3

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-Rapport entre texte et rythme.

Une mesure, une cellule rythmique peuvent également être en adéquation avec un texte. Pour reprendre le Libera me de Fauré, on trouve au début un rythme obstiné (noire-noire-soupir-noire, décomposition de ce qui pourrait être un rythme iambique, une longue suivie d’une brève) qui donne à la musique un caractère très sombre et implacable.

–Rapport entre texte et orchestration. 

Une phrase jouée par un hautbois n’évoquera pas les mêmes sentiments qu’une phrase de flûte, clarinette, basson, etc.. Dans un opéra, l’orchestration tient une très grande place. Bizet, comme Mozart, associe par exemple la flûte traversière à l’idée de la séduction. Il est fréquent aussi qu’une voix aigüe se trouve doublée par un instrument grave, le contraire étant valable. 

Dans cette rubrique, les modes de jeu instrumentaux sont également à considérer avec attention. Un trémolo de cordes dans un opéra sera toujours synonyme de situation tendue, d’incertitude. Des pizzicati de basses posent le discours.

Dans un opéra, l’arrivée d’un personnage marquant est généralement accompagnée par une instrumentation spécifique. Voyez par exemple la véritable trouvaille orchestrale qui marque l’arrivée du grand inquisiteur dans l’opéra Don Carlos de Verdi.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/12/Don-Carlos.-1.mp3

Un mélange des timbres les plus graves de l’orchestre (contrebasses, violoncelles, contrebasson et basson) sur un motif pesant de marche lente, soutenu par des accords aux trombones. La musique est ici lourde de sens, inquiétante et caverneuse, dans la tonalité de fa mineur.

-Rapport entre texte et type d’écriture. Ecriture horizontale, verticale. (Notion déjà entrevue plus haut avec la deuxième pièce de Purcell).

Prenons comme exemple une chanson polyphonique de la renaissance: La Guerre de Clément Janequin. Dans cette chanson, l’écriture peut être horizontale, verticale, très dense, plus dépouillée, dépendante du sens du texte et de ce que veut en faire comprendre le compositeur. Ecoutons les King’s Singers.

Le premier mot, « écoutez! » est tout d’abord lancé comme un appel, mélangé entre les différentes voix par une entrée en imitations dans la tonalité très claire de fa majeur. (Certaines versions de cette chanson sont en la).

Certains mots sont dits en homorythmie. « Aventuriers, bons compagnons, ensemble croisez vos bâtons ». En jeu de réponse entre deux groupes de chanteurs et en mesure ternaire très entraînante, dynamique et d’esprit guerrier. Cette mesure ternaire se retrouvera d’ailleurs à la fin de la chanson lors de la victoire, alors que les chanteurs disent « ils sont perdus ».

 « Et orrez si bien écoutez les coups ruez de tous côtés ». Les mots « de tout côtés » se trouvent répétés en écho par le groupe de chanteurs, de tous les côtés de l’ensemble vocal, dans un esprit figuraliste.

« La fleur de lys, fleur de haut prix, y est en personne », chanté par le ténor et accompagné par une polyphonie claire. Il va de soi que le compositeur cherche ici à flatter le monarque et qu’il désire que son texte soit compris, c’est pourquoi Janequin cherche ici à rendre le texte bien intelligible. La ligne mélodique est d’ailleurs à ce moment très caressante. (Dans le même ordre d’idée, il insiste aussi au début de la chanson sur les mots « du noble Roy François »).

Dans la seconde partie, le vacarme et la pagaille du champ de bataille sont rendus par une polyphonie en revanche très dense, avec de nombreuses onomatopées, imitant la charge des chevaux, les bombardes, les clairons et les armes qui s’entrechoquent.

La musique cherche à créer des images fortes. Il s’agit d’une véritable fresque sonore qui fait revivre au roi la victoire qu’il a obtenue sur les milanais à Marignan en 1515, et tous les moyens vocaux sont ici employés dans ce but.

Dans cette version, il faut apprécier comment les King’s Singers rendent la charge avant le fracas final, (sur les onomatopées « vom, vom, patipatoc »), en un accelerando qui laisse pantois. On ne peut être qu’admiratif devant tant de virtuosité et d’aisance.

Cette chanson de Janequin fut dit-on à son époque une oeuvre extrêmement célèbre. Le compositeur était, et reste toujours, considéré comme l’un des plus grands de son temps, en particulier dans le domaine de la chanson imitative que l’on peut assimiler à la chanson de gestes.

A la fin de la chanson, c’est le mot « Victoire » qui sera lancé dans le même esprit que le mot « écoutez », au début de la pièce, terminant la pièce en apothéose.

Trois liens pour davantage de précisions sur cette oeuvre:

https://transharmoniques.wordpress.com/2014/04/20/clement-janequin-la-guerre-ca-1530/

http://www.tard-bourrichon.fr/musique%20JANEQUIN%20Bataille.html

https://conseildansesperanceduroi.wordpress.com/2016/03/15/la-guerre-de-clement-janequin/

Voici donc quelques exemples qui peuvent étayer une argumentation sur la thématique du rapport entre texte et musique. Il s’agit d’un domaine très vaste, mais dans lequel de nombreuses manières de procéder se retrouvent. A l’auditeur de pouvoir les appliquer.

Nota bene

Concernant le rapport texte-musique, il existe sur ce même site trois articles qui parlent de ce thème à travers des oeuvres précises et que l’on peut consulter grâce aux liens suivants:

https://marenzo-ars-musica.com/2017/05/14/premiere-scene-de-lopera-dramma-giocoso-en-francais-drame-joyeux-don-giovanni-de-mozart/

https://marenzo-ars-musica.com/2017/01/15/le-rapport-texte-musique-dans-le-concerto-duo-seraphim-extrait-des-vepres-de-claudio-monteverdi/

https://marenzo-ars-musica.com/category/analyses-musicales/le-voyage-dhiver-de-schubert/

Voici également un lien vers un site intéressant:

http://musique.tice.ac-orleans-tours.fr/php5/site/rapports_texte.htm

La musique instrumentale durant la période baroque.

16 mercredi Jan 2019

Posted by Pascal Rabatti in Cours, Non classé

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Musique instrumentale à l'époque baroque

La période baroque correspond dans l’histoire de la musique au développement et à l’émancipation de la musique instrumentale. En effet, de nombreux genres instrumentaux tels que la sonate, la suite de danses ou le concerto verront le jour durant cette ère qui s’étend de 1600 à 1750. Cette émancipation est due à de nombreux facteurs.

La naissance du style concertant.

Au début du 17eme siècle s’ouvre donc en musique une ère nouvelle. Ce renouveau est en partie dû à la naissance de l’opéra en Italie. Un style va se développer que l’on va appeler style concertant (stile concertato), expression appliquée au début tant aux œuvres vocales qu’aux œuvres instrumentales. Le style concertant confère à chaque partie un rôle bien défini, contrairement aux œuvres de la renaissance dans lesquelles les différentes voix se fondent en un tout dans lequel chacune possède un rôle similaire.

Monteverdi parlera de « stile nuovo », ou style nouveau, par opposition au « stile antico », ou style ancien. Le « stile nuovo » va donner la primauté à une voix, le superius, chargée de traduire musicalement les textes poétiques. La musique instrumentale reprendra ce principe en mettant en avant une ou plusieurs lignes principales soutenues par un accompagnement fait d’une ligne de basse que l’on va appeler continuo ou bien basse continue. Sont alors posés les jalons du style musical qui va s’épanouir durant toute cette ère baroque, l’une des plus longues de l’histoire de la musique puisqu’elle durera de 1600 à 1750 (mort de Jean Sébastien Bach).

Petite parenthèse

La rupture avec le style dit ancien ne s’est pas faite de manière brutale. Le stile antico va en effet perdurer pendant la période baroque, et de nombreux compositeurs vont persister dans le domaine polyphonique à la manière des maîtres de la renaissance, notamment dans leur musique religieuse.

La basse continue

La basse continue est donc l’une des grandes innovations de la période baroque. Ce principe consiste à jouer sous la partie de superius une ligne de basse toujours instrumentale avec ou non des chiffrages permettant à un instrument polyphonique tel qu’un clavier ou un luth de réaliser les accords. Il est très rare que ces accords soient écrits par le compositeur, et ils sont laissés au soin de l’interprète. Le principe perdure encore de nos jours. Les clavecinistes que l’on entend dans les orchestres de musique baroque sont en effet rompus à la réalisation des basses chiffrées. (On retrouve d’ailleurs le même principe dans le jazz, musique dans laquelle les accords sont représentés par des lettres et des chiffres permettant aux pianistes et guitaristes de jouer les harmonies). Les accords chiffrés permettent une grande simplification de la notation. Les partitions peuvent alors être réduites à deux lignes : la partie supérieure et la partie de basse chiffrée. Il était fréquent à la période baroque que les parties intermédiaires soient de simples parties de remplissage dont le compositeur se déchargeait volontiers. Lully dans ses ouvertures d’opéra n’écrivait que le dessus et la basse chiffrée, et il laissait alors à ses secrétaires le soin d’écrire les parties d’alto (haute contre), de taille et de quinte de violon, instruments longtemps tombés dans l’oubli mais que l’on cherche à faire revivre de nos jours.

Le fait de concevoir la musique en deux plans, un dessus virtuose soutenu par un accompagnement en basse chiffrée, va permettre l’épanouissement de la mélodie, celle ci pouvant alors se développer beaucoup plus librement que lorsqu’elle est soumise à un tissu polyphonique. Cette conception permettra notamment aux instrumentistes d’augmenter leurs capacités expressives. Les violonistes par exemple, vont de plus en plus s’aventurer dans les différentes positions, accroissant ainsi leurs possibilités techniques. Répertoire vocal et répertoire purement instrumental vont alors se développer de manière bien distincte. C’est là que commence la réelle émancipation de la musique instrumentale, liée aussi bien aux progrès de la facture qu’aux progrès techniques des instrumentistes.

Différents genres de musique instrumentale durant la période baroque. Sonate, suite, concerto.

La sonate tient dans l’histoire de la musique une place à part. Il s’agit en effet d’un genre très important qui va être le creuset de nombreuses recherches et d’aboutissements dans le domaine instrumental et dans l’écriture musicale. Le terme issu du verbe « suonare » (jouer, en italien), apparaît dans la seconde moitié du 16eme siècle avec la canzona da sonar, genre instrumental inspiré de la polyphonie vocale, dont voici un exemple de Giovanni Gabrieli.

On va distinguer deux types de sonates : la sonata da chiesa (sonate d’église) et la sonata da camera (sonate de chambre, c’est à dire destinée au concert). Dans les deux genres l’on va trouver une recherche constante de virtuosité, qui correspond comme il a été dit plus haut aux progrès réalisés dans le domaine de la lutherie. Le violon, notamment, atteint à cette époque son sommet avec des luthiers comme Amati ou Maggini. Il n’a pas changé depuis.

Voici des sonates de l’un des virtuoses de cette période, le violoniste Uccellini.

La sonate pour trois violons et continuo de Gabrieli


Pour la virtuosité, voici le Capriccio Stravagante (caprice extravagant) de Carlo Farina, oeuvre à rapprocher du concerto pour soliste, objet du paragraphe suivant. On y utilise des pizzicati, des sons harmoniques et même le jeu avec le bois de l’archet. (col legno). On retrouvera ce mode de jeu bien plus tard, notamment dans la Symphonie Fantastique d’Hector Berlioz !


Le concerto

Loin de l’acceptation moderne du terme, qui désigne un instrument soliste en dialogue avec un orchestre, le terme concerto au début de l’ère baroque réfère à toute oeuvre musicale faisant intervenir des groupes d’instruments différant soit par le timbre, soit par la dynamique. Monteverdi utilise également le terme pour désigner certaines pièces vocales donnant à entendre des voix en dialogue. (Concerto « Duo Seraphim » extrait des Vêpres). Dans la première moitié du 17eme siècle, le terme « concerto » va se réduire peu à peu à la musique instrumentale. Le véritable genre ne va se fixer que vers 1680, avec les concertos (concerti serait plus juste!) de Torelli, Corelli, et enfin Vivaldi.

Quelques exemples.

Les concerti ecclesiasticci de Viadana. Oeuvres destinées à l’église.

Les Sacrae Symphoniae de Gabrieli présentent également un caractère concertant.

Le concerto pour deux violons en sol majeur de Torelli, alors que commence à se fixer le genre « concerto pour soliste ».


Un concerto pour hautbois de Corelli.

Enfin, le concerto pour quatre violons de Vivaldi.

Arrangé pour quatre claviers par Bach. Il était fréquent à l’époque baroque que des compositeurs s’inspirent mutuellement.

A l’origine pour quatre clavecins, mais j’ai toujours aimé la version pour piano ! J’ai d’ailleurs eu l’occasion de le jouer dans une version pour quatre guitares.

Revenons en à Torelli et Corelli. C’est bien à eux, représentants de l’école de Bologne que revient la paternité du genre concerto pour soliste et orchestre. Les 12 concerti op 6 de Corelli furent composés vers 1682. Il s’agit de concerti grossi dans lesquels un petit groupe de solistes (le concertino) se trouve en dialogue avec un ensemble instrumental plus fourni (tutti ou ripieno). Dans cet ensemble, le premier violon tient déjà un rôle privilégié, ce qui laisse augurer de ce que sera la suite de l’évolution du genre.

Ces concertos restent cependant étroitement proches de la sonate, da camera ou bien da chiesa. L’on va trouver des préludes, des successions de danses, et l’esprit du concerto y figure surtout dans une alternance entre des masses sonores en écho.

Avec Torelli vont se préciser à la fois les formes et styles concerto. Tout d’abord, le plan en trois mouvements (vif-lent-vif) se fixe. Dans son opus 8, Torelli compose six concerti grossi et six concerti de soliste dans lesquels un seul violon se trouve opposé au tutti. Ce dernier propose les idées alors que le soliste les développe de manière virtuose.

C’est avec Vivaldi que la forme concerto en trois mouvements va réellement s’imposer. Celui que l’on appelait « le prêtre roux » va composer près de 470 concerti dont la plupart mettent en scène des instruments solistes divers : violon, hautbois, flûte, basson ou même mandoline. Chez Vivaldi, le concerto devient plus dramatique. Les contrastes sont très marqués, notamment entre l’allegro et l’adagio central. Les premiers mouvements de concerto chez Vivaldi possèdent généralement des thèmes bien marqués, avec des contours mélodiques précis et affirmant bien la tonalité. Dans les mouvements lents en revanche, il est fréquent que le soliste développe une sorte de cantilène sur un accompagnement harmonique de l’orchestre, à la manière d’un air d’opéra. Voici un exemple avec le concerto pour deux mandolines.

Certains concertos chez Vivaldi sont descriptifs, ce qui est également une marque d’originalité. Ces oeuvres à programme comportent donc des titres tels que La Chasse, La Tempête ou pour citer le recueil le plus connu, Les Saisons.

Vivaldi a beaucoup apporté dans le domaine de la technique instrumentale, en développant la notion de virtuosité de manière assez personnelle. Pour ce qui concerne l’orchestre, il y utilise parfois toutes les cordes en unisson, en pizzicato, ou avec sourdine. Par la suite, des compositeurs comme Albinoni, Tartini ou Locatelli continueront dans cette voie.

Petite parenthèse : le concerto pour soliste supplante le concerto grosso.

Avec Torelli et Vivaldi en effet, le genre concerto pour soliste va s’épanouir à tel point que le concerto grosso va peu à peu tomber en désuétude. Cette notion d’opposition entre masse orchestrale et individu est à rapprocher de l’opéra, tant elle est d’essence dramatique. L’un des premiers compositeurs à avoir appréhendé cette dualité est Lully, qui en 1666 dans son Ballet des Muses introduisait un menuet sur basse obstinée dans l’esprit d’une chaconne, avec un violon soliste en parfait dialogue avec l’orchestre.

Vers 1700, Alessandro Scarlatti mettra en évidence la virtuosité du premier violon de l’orchestre. Voici un exemple qui mérite que l’on s’y attarde : le second mouvement de ce concerto grosso (à 1’56 »), sorte de fugato qui à un moment expose une très belle partie de violon solo. Ne pas hésiter à écouter l’intégralité de cette musique toute de grâce.

On constate ainsi que la notion de concerto pour soliste est déjà contenue en germe dans des oeuvres antérieures à Torelli. Mais c’est avec ce dernier que la distinction entre soliste et orchestre se fera de manière systématique.

Fin de la parenthèse.

Trois grands maîtres de la période baroque: Bach, Haendel et Telemann.

Avec Bach, le genre concerto va s’adapter de différentes manières. Les Suites pour orchestre sont composées dans un esprit concertant, avec présence d’une flûte soliste dans la seconde (très célèbre Badinerie en si mineur), deux hautbois et un basson dans la première. D’autre part, les suites 3 et 4 sont dans l’esprit d’un concerto pour orchestre, à la manière des italiens du début du 17eme siècle.

Le concerto pour soliste adopte chez Bach le modèle vivaldien, avec une coupe en trois mouvements et des rapports identiques entre soliste et orchestre mais dans un esprit plus contrapuntique. Voici le fameux concerto pour violon en la mineur.

Il faut également écouter les concertos pour clavecin et orchestre. Voici par exemple le très puissant concerto en ré mineur.

Chez Bach, il faut s’attarder dans les concertos sur les mouvements lents qui développent toujours une très grande poésie.

Enfin, pour une synthèse entre concerto grosso et concerto pour soliste, les six Concertos Brandebourgeois, qui constituent une véritable somme de trouvailles orchestrales, d’invention mélodique et de virtuosité.

Voici le cinquième de ces concertos, qui contient notamment une très célèbre cadence pour clavecin à la fin du premier mouvement. Dans ce mouvement, le dialogue instauré entre la flûte et le premier violon mène le jeu.

On constate à l’écoute de cette vertigineuse cadence de clavecin que la virtuosité au clavier n’est pas l’apanage des grands pianistes de l’époque romantique !

Georg Friedrich Haendel, se réservait dans ses concertos pour orgue alors qu’il tenait la partie soliste des plages d’improvisation, notamment dans les mouvements lents. Cet esprit donne à ses concertos un caractère très spontané peut être moins réfléchi que chez son contemporain Bach. Voici le concerto en la majeur.

Le concerto grosso en sol majeur


Une page très connue: le concerto en si bémol pour harpe.

Telemann est un compositeur extrêmement original, dépassant en quantité d’oeuvres ses illustres contemporains. Sa production est en effet immense, et comprend des pièces aux sonorités souvent très particulières. Voici pour écouter un concerto pour quatre violons.

Le concerto pour deux altos.

Enfin, voici le concerto Da Camera, avec une brillante partie de flûte à bec.

Tous ces exemples prouvent à quel point l’écriture instrumentale a évolué durant cette période baroque. Un article suivant traitera de l’évolution d’un autre genre important de l’histoire de la musique instrumentale : la symphonie.

La fugue. Cours donné dans le cadre d’une option musique en lycée.

21 vendredi Sep 2018

Posted by Pascal Rabatti in Cours

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évolution de la fugue, de Bach à Bartok

Une fugue est une pièce musicale généralement à thème unique (mais nous verrons que cela n’est pas toujours le cas), basée sur le principe des entrées en imitations et sur l’écriture contrapuntique. Une fugue est donc une pièce toujours polyphonique, dont le nombre de voix peut aller de deux à six.

Pourquoi ce terme de fugue ? Ce mot contient l’idée de fuite, cette impression étant donnée par le jeu des voix entre elles, qui se répondent sans cesse, qui dialoguent en s’échangeant notamment le thème (appelé sujet) et différents motifs, ceci jusqu’à l’accord final.

Quelques définitions

-Contrepoint : technique d’écriture musicale difficile et complexe qui consiste à superposer différentes lignes mélodiques. L’écriture contrapuntique est également appelée écriture horizontale.

-Entrée en imitations : entrée successive de différentes voix dont chacune reprend ce qu’a dit la précédente. C’est le principe de ce que l’on appelle le canon. Il ne faut cependant pas confondre une entrée de fugue avec une entrée en canon, nous verrons pourquoi par la suite.

-Polyphonie : superposition de différentes voix. La polyphonie rejoint bien entendu l’écriture contrapuntique, mais une pièce polyphonique peut également être non contrapuntique, dans le cas d’une écriture en accords (écriture verticale).

Les compositeurs qui illustrent l’écriture fuguée

Commençons par un lieu commun : Jean Sébastien Bach est considéré comme le maître absolu en la matière. Nous n’insisterons pas trop là dessus, cependant nous puiserons chez lui de nombreux exemples, ce qui semble inévitable dans la mesure où l’écriture fuguée a été pour Bach le creuset dans lequel il a accompli ses prouesses contrapuntiques les plus vertigineuses.

Avant Bach, Buxtehude, après lui, Mozart, contrapuntiste hors pair qui utilisera la fugue notamment dans sa musique religieuse et également dans l’ouverture de la Flûte Enchantée. Mozart compose également un Adagio et fugue en ut mineur  pour cordes. Il a aussi réalisé des arrangements pour quatuor à cordes de fugues de Bach extraites du Clavier bien Tempéré. Beethoven utilise la fugue dans certains quatuors, et propose une entrée fuguée dans un passage de sa 5eme symphonie. Berlioz, également excellent contrapuntiste, utilise l’écriture fuguée dans son Te Deum, dans le dernier mouvement de la Symphonie Fantastique et dans la Damnation de Faust, dans une fugue parodique lors de la scène de la taverne. Dans son opéra Carmen, Bizet fait entendre une entrée fuguée à la fin du premier acte, alors que Carmen va s’enfuir (rapport texte musique intéressant). Au XXeme siècle Bela Bartok compose une magistrale fugue atonale à 6 voix pour ouvrir Musique pour cordes, percussions et célesta . Dmitri Chostakovich compose quant à lui 24 préludes et fugues pour piano, en hommage vraisemblablement à Bach.

Il ne s’agit pas ici de fournir une liste exhaustive mais de donner quelques exemples, sur lesquels nous reviendrons par la suite.

Deux précisions nécessaires

Il ne faut donc pas confondre fugue et canon. Dans un canon en effet, les différentes voix font rigoureusement la même chose de manière décalée. Dans une fugue, après son entrée, chaque voix suit son chemin propre. Cependant on peut dire que le canon est à l’origine de la fugue. L’entrée en imitations est en effet un procédé extrêmement ancien. En témoigne cette pièce en canon strict de Guillaume de Machault (14eme siècle):

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/canon-Machault-2.mp3

Il est fréquent que la fugue soit présentée comme une forme musicale. C’est une erreur. La fugue n’est pas une forme mais un procédé d’écriture. Les formes musicales telles que forme ABA, forme sonate, forme rondo, sont des cadres immuables dans lesquels se fond l’inspiration du compositeur. La fugue est avant tout une manière de concevoir l’écriture. Il n’y a pas deux fugues qui se ressemblent, hormis les principes de composition cités plus haut. On ne peut en aucun cas parler de « forme fugue ». (Cela sonne d’ailleurs très mal, comme une mauvaise dissonance).

Exemples et analyses.

Premier exemple : fugue en ut mineur de Bach, extraite du clavier bien tempéré volume 2. Cette pièce possède l’avantage d’être très claire, et surtout très belle. Elle est ici précédée d’un prélude et se trouve sur cet enregistrement à 1’39 ».

fugue ut m 1.jpg

fugue ut m 2.jpg

Quelques détails sur cette pièce.

Pour commencer voici le thème au début, exposé par la première voix. Ce thème est appelé le sujet de la fugue.  Exemple 1:

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/le-sujet-ex1-1.mp3

le sujet ex1.jpg

A la mesure 2, la seconde voix donne ce que l’on appelle la réponse, c’est à dire le sujet mais transposé une quarte au dessus, ici dans le ton de sol, dominante de do. Exemple 2:

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/rc3a9ponse-ex-2-1.mp3

réponse ex 2..jpg

Cependant que la première voix continue avec ce que l’on appellera le contresujet. Voici les deux voix en même temps. Exemple 3:

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/2-voix-dc3a9but-ex-3.mp3

2 voix début ex3.jpg

Il s’ensuit un bref passage d’une mesure, donnant la part belle aux retards. exemple 4

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/ex3-mesure-3.mp3

ex 3 mes 3.jpg

Puis la main gauche entonne le sujet mesure 4. Exemple 5:

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/ex4-entrc3a9e-basse.mp3

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Trois voix sont entrées en jeu. Les deux mesures qui vont suivre donnent alors à entendre un moment plus libre. Exemple 6:

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/div-1.mp3

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Une fugue comporte toujours une alternance entre des moment d’écriture rigoureuse et des moments plus libres que l’on nomme divertissements.

Concernant le début de la pièce on constate que le sujet se trouve exposé dans le ton principal alors que la réponse est dite dans le ton de la dominante. Ce balancement entre les deux degrés contribue à relancer la musique pour lui donner son élan.

Ecoute globale de la fugue. 

A partir de maintenant, réécoutez la pièce en essayant de retrouver le sujet ou sa réponse disséminés dans les autres voix. Ils apparaissent régulièrement et plusieurs écoutes seront nécessaires avant de tout percevoir.

                                                 ________________________________________

Je souhaiterais insister sur un passage situé en bas de la première page, au cinquième système. Exemple 7:

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/bas-page-1.mp3

bas page 1.jpg

En quoi ce passage est-il remarquable? Si l’on regarde bien, la voix du haut (en noir ici) donne le sujet. La voix intermédiaire (ici en rouge) donne ce même sujet mais en valeurs plus longues, c’est à dire en augmentation. Enfin la ligne de basse (ici en vert) joue le sujet inversé, comme une image que l’on regarderait dans un miroir.

Dans ce passage, qui reste une très belle combinaison des voix, Bach se permet tout de même une faute de contrepoint, avec une octave par mouvement direct dans la première mesure. Elle est ci-dessous soulignée en bleu (ex 8). Il faut savoir que l’apprentissage du contrepoint nécessite la connaissance de règles très strictes, et qu’arriver sur une octave (ou une quinte), ne peut se faire suivant ces règles que par mouvement contraire. Or, ici, les deux voix montent ensemble sur cette note fa. L’apparition du thème en valeurs augmentées peut justifier cette faute, même s’il est vrai qu’une octave abordée de cette manière peut sonner assez platement. 

Citons Debussy, dans une phrase extraite de Monsieur Croche:

« Le vieux Bach, qui contient toute la musique, se moquait, croyez le bien, des formules harmoniques. Il leur préférait le jeu libre des sonorités, dont les courbes, parallèles ou contrariées, préparaient l’épanouissement inespéré qui orne d’impérissable beauté le moindre de ses innombrables cahiers ».

Cette citation pourrait étayer une argumentation en faveur de cette faute de contrepoint. Exemple ci dessous.

Exemple 8: faute ctpt.jpg

Pour terminer, je souhaiterais montrer deux extraits, au sixième système et à la fin, aux neuvième et dixième systèmes. Il s’agit de deux passage en strettes. Très souvent en effet, on entend à la fin d’une fugue un moment dans lequel les entrées du sujet se resserrent. (en italien stretto signifie serré). On en a deux exemples ici. Pour des raisons de commodité de lecture, j’en ai enlevé tout ce qui n’est pas le sujet ou sa réponse. Dans le dernier extrait, (couleur bleue), Bach donne à entendre le sujet inversé, en une fort belle combinaison des voix.

Voici donc le premier passage en strette. Exemple 8.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/1ere-strette.mp3

1ere strette.jpg

Et le second, avec des entrées encore plus rapprochées.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/2eme-strette-1.mp3

2eme strette.jpg

J’ai choisi cette pièce pour tout ce qu’elle contient d’instructif (outre que même Bach peut commettre des fautes d’écriture) sur les manières de faire lorsque l’on compose du contrepoint suivant le principe de la fugue. Un sujet, sa réponse à la dominante, sa présentation en valeurs augmentées, en inverse, en strettes, tout ceci de manière particulièrement limpide. On retrouvera tous ces procédés dans le testament musical du maître, cette œuvre incroyable et inachevée qu’est L’Art de la Fugue.

Considérons maintenant ce procédé chez d’autres musiciens.

Nous avons évoqué Mozart au début de l’article. Celui ci utilisera la fugue à maintes reprises. N’hésitez pas à consulter sur ce site l’analyse de l’adagio et fugue en ut mineur. Je n’y reviens bien entendu pas ici, et souhaite seulement citer l’ouverture de La Flûte Enchantée. Après une introduction majestueuse en accords, nous entendons ceci :

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/ouv-flute.mp3

Ouv flute 1.jpg

ouv flute 2.jpg

ouv flute 3.jpg

Par l’écriture fuguée Mozart illustre le côté initiatique de son oeuvre. La fugue est en effet considérée comme un procédé difficile à maîtriser car il fait appel à une certaine intelligence musicale afin de pouvoir combiner dans l’harmonie les différentes lignes mélodiques, avec toutes les contraintes imposées. Chacun sait que la Flûte Enchantée correspond dans la vie de Mozart à son entrée dans la franc-maçonnerie, et à son époque, cette entrée comportait des épreuves, l’une des épreuves que les musiciens avaient à subir étant la composition d’un canon ! La partie fuguée de cette ouverture n’est donc vraiment pas là par hasard, elle reflète les aspirations du compositeur à ce moment de sa vie.

Chez Beethoven, l’écriture fuguée peut être extrêmement ludique, comme en témoigne l’exubérant finale du troisième quatuor de l’opus 59.

On retrouve cet esprit dans le scherzo de la 5eme symphonie, alors que les basses entonnent ce passage endiablé:

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/scherzo-5eme-1.mp3

scherzo 5eme 1.jpg

scherzo 5eme 2.jpg

Dans l’un de ses derniers quatuors, Beethoven compose une fugue conclusive, mais son éditeur convaincra le compositeur de la considérer comme un mouvement à part. (Il dure en effet plus de 15 minutes). C’est ici le rythme qui est roi, au détriment de la ligne mélodique. On est en effet à mille lieues de la fluidité de Bach. L’oeuvre peut paraître ardue, mais comme disait Hector Berlioz : « il est monté si haut que l’air commence à manquer ». Voici donc « La grande Fugue » pour quatuor.

Berlioz a vis à vis de l’écriture fuguée une attitude quelque peu ambigüe. En effet, il critiquait volontiers les fugues religieuses dans lesquelles on répète inlassablement « Kyrie Eleison ». Il propose donc une parodie de fugue dans sa Damnation de Faust, avec un choeur d’hommes qui chante sur le mot « Amen » sur le thème de la chanson de Brander.

Comme souvent dans ses oeuvres, Berlioz fait passer un message sur ses goûts musicaux. Juste avant cette fugue, Méphistophélès déclare qu’il s’agit de « la bestialité dans toute sa candeur ».

Au début de son Te Deum, en revanche, Berlioz utilise l’écriture fuguée, avec deux thèmes superposés, et donc une double entrée en imitations. Pour information, on trouve un procédé similaire chez Mozart avec le Kyrie du Requiem, ce sur quoi nous allons revenir à la fin de cet article. Ecoutons donc le début du Teum de Berlioz.

Concernant la symphonie Fantastique, voici l’entrée fuguée lors du mouvement intitulé Le Songe d’une nuit de Sabbat. Le principe de la fugue rajoute ici au côté diabolique de la scène.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/fugue-sabbath.mp3

fugue sabbath 1.jpg

fugue sabbath 2.jpg

Georges Bizet lui aussi va utiliser le procédé de la fugue pour illustrer une idée littéraire. Dans son opéra Carmen, il fait entendre ceci, à la fin de l’acte 1:

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/bizet-carmen-fuite.mp3

bizet carmen fuite.jpg

La musique anticipe ainsi l’action puisque dans l’histoire, elle correspond au moment ou Carmen s’apprête à prendre la fuite après avoir été arrêtée. La fugue possède donc ici une connotation très forte, et cette idée de fuite en avant évoquée plus haut prend ici tout son sens.

Deux exemples de musiciens du XXeme siècle qui ont composé des fugues. 

Je souhaiterais bien entendu citer Bela Bartok et sa monumentale fugue à six voix qui ouvre l’oeuvre intitulée Musique pour cordes, percussions et célesta. Les entrées des voix se font suivant le cycle des quintes, (la, mi, ré, si sol, fa dièse), et la musique est ici très chromatique et donc atonale. Ecoutons ce chef d’oeuvre.

Un peu plus tard, Dimitri Chostakovitch a composé pour le piano 24 préludes et fugues. On peut les écouter dans une très belle version de Keith Jarret. On peut aussi écouter l’hallucinant passage en écriture fuguée de sa quatrième symphonie. Il arrive à 15’15 » dans le premier mouvement.

_________________________________________________________________________

Pour terminer, je voudrais revenir sur le plurithématisme dans l’écriture fuguée.

Considérons les deux exemples cités plus haut, Te Deum de Berlioz, Kyrie du Requiem de Mozart.

Le début du Te Deum (entrée des voix : soprano, ténor basse)

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/te-deum-b.mp3

te deum Berlioz.jpg

Le début du Kyrie du Requiem de Mozart.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/kyrie-mozart-1.mp3

kyrie Mozart.jpg

Pour chaque exemple, on trouve donc deux motifs distincts qui se trouvent superposés.

Il faut remarquer que dans ces deux cas, chaque motif supporte un texte différent.

Chez Berlioz, le motif A chante « Te Deum laudamus » (Nous te louons, Dieu), alors que le motif B chante « Te veneratur omnis terra » (Toute la terre te vénère).

Chez Mozart, le motif A chante « Kyrie Eleison » (Seigneur prends pitié), alors que le motif B chante « Christe Eleison » (Christ prends pitié). Il est d’ailleurs assez rare de faire chanter les deux textes ensemble puisque dans l’ordinaire de la messe, on chante le kyrie, le Christe puis le kyrie de nouveau en alternance.

Toujours dans cette notion de plurithématisme, revenons à Bach.

Le plus fameux exemple à proposer est le dernier contrepoint de l’Art de la Fugue. Il est intitulé « Fugue à trois sujets ». Les voici dans l’ordre. Il conviendra ensuite d’écouter cette pièce qui a la particularité d’être inachevée, Bach étant vraisemblablement décédé avant d’avoir pu la terminer, ce qui à vrai dire reste une énigme. On a également remis en doute l’appartenance de cette fugue au recueil de l’Art de la Fugue du fait que l’on n’y entende pas le thème principal de l’oeuvre.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/adf-3-sujets-2.mp3

adf 3 sujets.jpg

Le troisième sujet permet à Bach de signer sa musique de son nom. En effet il faut savoir qu’en Allemagne les notes sont désignées par des lettres. Ici on entend donc ce fameux B-A-C-H. Ecoutons la toute fin de cette pièce, avec les trois thèmes qui se trouvent superposés.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/09/art-fugue-fin.mp3

art fugue fin.jpg

Il est évident que l’écriture fuguée est surtout l’apanage de la période baroque, et on a l’habitude de dire qu’avec la mort de Bach en 1750 cette manière de concevoir la musique va quelque peu tomber en désuétude. Cependant tous les exemples cités ici prouvent à quel point cette écriture a quand même perduré à travers les âges en s’adaptant aux différents styles. La musique populaire s’est également emparée de ce mode d’écriture. En 1968, Astor Piazzolla compose Fuga y misterio, qui va mêler en un tout  intéressant le tango à l’écriture fuguée. Il s’agit cependant d’un exemple assez rare, ce mode de composition restant généralement cantonné au domaine de la musique savante.

Une vision de l’esthétique de Bach.

17 dimanche Juin 2018

Posted by Pascal Rabatti in Analyses musicales, Cours

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analyse Kyrie Bach, messe en si mineur Kyrie

Il y a dans le livre « Relevés d’apprenti » de Pierre Boulez, (l’une de mes bibles alors que j’étais étudiant), un texte sur Bach qui m’a toujours frappé. Ce texte n’est pas de lui, mais il cite François Florand dans son livre « Jean Sébastien Bach ». Voici ce texte:

« Pour bâtir un développement, il arrive à Bach de préférer un moyen, qui consiste à développer le concert des voix sans sortir de la tessiture qu’il leur a assignée au départ, les maintenant de force dans les mêmes limites -guère plus d’une octave pour chaque partie- et amenant une progression venue tout entière du courant mélodique lui même, à peu près comme un fleuve que l’on verrait grossir sans cause extérieure apparente, ni affluents, ni glaciers, ni orages, mais par le seul apport de mystérieuses sources souterraines. C’est là autre chose qu’une simple esthétique de répétition, à la manière orientale ou hindoue. C’est un procédé très particulier à Bach, qui est fait d’une accumulation intérieure d’énergie, de force émotive, jusqu’au point où l’auteur et l’auditeur sont saturés et comme enivrés. Il n’y faut chercher, assurément, rien  de brutal, ni de grossier. Mais enfin, il vient alors un moment où, à force de tourner et retourner son motif, la tête semble tourner à l’auteur lui même. « Es schwindelt… » Et c’est cela le sommet de l’oeuvre ».

J’ai aimé cette évocation d’un fleuve qui ne grossirait que par l’apport de sources invisibles. Pour François Florand, il semblerait en effet que la tension, l’énergie qui se dégagent de la musique de Bach soient le résultat d’une polyphonie dans laquelle le musicien contraint ses voix, à la manière d’une personne qui chercherait à canaliser un débordement. Ainsi, la tension inhérente au discours musical serait le résultat inévitable de cette contrainte, une sorte de respiration profonde qui amènerait la musique vers des sommets d’expression trouvant leur résolution naturelle dans des moments de détente.

Un exemple pourrait illustrer cette idée de manière assez claire. Il s’agit du Kyrie qui débute la Messe en si mineur. Nous allons tenter d’en expliquer la teneur à la lumière du texte de François Florand.

Pour commencer, écoutons ce Kyrie :

(Dans la très belle version de Philippe Herreweghe).

Les éléments qui composent ce Kyrie. (Passons l’introduction). 

-Le thème principal, un sujet de fugue, en si mineur. Thème de courbe globalement ascendante donnant à entendre de grands intervalles disjoints d’esprit plus instrumental que vocal. Le do bécarre de la fin est à analyser comme un second degré rabaissé (napolitain) de si. Comme la basse à ce moment fait entendre un mi, nous nous trouvons sur l’accord de sixte napolitaine mi-sol-do, qui mène logiquement au 5eme degré fa dièse, pour la réponse (voir exemple numéro 2).

Exemple numéro 1

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/06/sujet-fugue-1.mp3

Sujet fugue

-Comme second élément, une marche harmonique descendante sur une noire liée à quatre croches, à partir de laquelle toute la tension accumulée va se résoudre. Cette marche débute sur une note qui peut correspondre au sommet d’expression dont parle François Florand dans son texte. C’est ce que nous tenterons d’expliquer dans cet article. Cette marche se trouve exposée dès le début dans l’introduction d’orchestre, (exemple ci-dessous à la mesure 6), et se trouvera par la suite considérablement amplifiée par le choeur, ce que nous verrons par la suite.

Voici donc comme deuxième exemple l’introduction orchestrale avec le sujet, sa réponse, et la note sol dièse, qui sert ici de point culminant à partir duquel va se résoudre la tension, surlignée en bleu. Ce sol dièse est à analyser sur la mesure 6 comme un retard de tonique sur l’accord de fa dièse mineur, note dissonante donc très expressive.

Exemple numéro 2

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/06/dc3a9but-kyrie-1.mp3

intro orchestre 1.jpg

 

début fugue 2.jpg

-Enfin, dans les motifs principaux de ce Kyrie, un motif en croches directement issu du thème principal, puisqu’il en reprend en les développant les intervalles disjoints descendants. Ce motif est utilisé lors des passages de transition. On l’entendra en effet joué par l’orchestre entre les deux plus grandes sections de choeur de cette pièce.

Exemple numéro 3

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/06/motif-secondaire.mp3

motif secondaire.jpg

 

Pour reprendre le texte de François Florand, en voici des extraits:

(…..)sans sortir de la tessiture qu’il leur a assignée au départ, les maintenant de force dans les mêmes limites -guère plus d’une octave pour chaque partie-(….)

L’ambitus de chaque voix se situe ici globalement dans un intervalle de neuvième.

(..)une progression venue tout entière du courant mélodique lui même(..)

Le « courant mélodique » rejoint bien entendu l’idée du fleuve, en décrivant bien  cette musique qui prend l’auditeur dès les premières notes pour le mener inexorablement aux dernières.

 

Considérons maintenant le développement de cette fugue, à partir de l’entrée du choeur. qui suit l’introduction orchestrale. 

(En raison des sonorités de voix synthétique non convaincantes, j’ai choisi de faire entendre ce choeur par une imitation de quintette à vents).

Ce sont tout d’abord les ténors (ici le basson), qui donnent le sujet, suivis par les voix d’alto pour la réponse, (ici la clarinette).

Entrent ensuite les sopranos 1 qui vont entonner le sujet, suivies par les sopranos 2 sur la réponse. Voici tout le début du choeur, jusqu’à l’entrée des basses. Cette fugue est en effet à cinq voix, ce qui reste assez rare, mais qui correspond à son aspect monumental. Appréciez au passage comment cette entrée des basses est préparée de manière à produire un effet maximal.

Exemple numéro 4

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/06/entrc3a9e-fugue-choeur-1.mp3

entrée fugue choeur 1.jpg

entrée fugue choeur 2.jpg

entrée fugue choeur 3.jpg

entrée fugue choeur4.jpg

Toutes les voix sont à présent entrées en jeu. Voyons comment la musique va évoluer.

A partir de ce moment, le texte de François Florand prend tout son sens.

Dans le passage qui suit, la voix d’alto se trouve sur la réponse, en fa dièse mineur. Mais sur la mesure 3, les sopranos entrent sur une autre réponse, en do dièse mineur, quinte de fa dièse, (réponse à la réponse?), qui amène une surenchère de tension musicale arrivant à un apogée sur la mesure 5 (note surlignée en bleu), à partir duquel cette tension accumulée va se résoudre dans la tonalité du second degré de si mineur, à savoir do dièse mineur, suivant le principe de la marche harmonique descendante énoncé à l’exemple 2. Comme il a été dit plus haut, tout ceci se trouve à l’état embryonnaire dans l’introduction d’orchestre, et amplifié ici dans ce passage choral.

(Ce principe de marche harmonique descendante pour résoudre la tension musicale me rappelle d’ailleurs mon professeur d’harmonie, Jean Louis Lusignan, alors que j’étais étudiant au conservatoire de Nice. Il nous disait : « il est plus difficile de faire monter la musique que de la faire descendre. Naturellement, la musique descend ». De ce fait il est logique qu’une montée soit génératrice de tension et qu’une descente soit synonyme de résolution de cette tension). 

Exemple numéro 5

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/06/suite-choeur-1-1.mp3

Suite choeur 1.jpg

suite choeur 2.jpg

 

 

Je vous propose maintenant d’écouter le tout, depuis l’entrée du choeur jusqu’au passage précédemment entendu. Réécoutez ensuite l’original.

Exemple numéro 6

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/06/le-tout.mp3

Rappelons ici le texte de François Florand:

« C’est un procédé très particulier à Bach, qui est fait d’une accumulation intérieure d’énergie, de force émotive, jusqu’au point où l’auteur et l’auditeur sont saturés et comme enivrés ». 

« Es schwindelt… » Et c’est cela le sommet de l’oeuvre ».

 

Petite parenthèse sur la dynamique chez Bach 

Du point de vue de la dynamique, la musique de Bach ne possède pas la richesse, la palette de nuances que l’on trouvera plus tard dans le classicisme, et surtout dans le romantisme. Pas de crescendo ici, pas d’alternance forte piano. En fait cette musique n’en a pas besoin, l’énergie qu’elle dégage étant générée par la seule force de l’écriture. Le délire de Bach, son ivresse musicale, sont absolument contrôlés, et c’est ce qui en fait la force. Au moment du climax (point culminant souligné plus haut) dû à la répétition obsessionnelle du sujet, en si puis en fa dièse (réponse) puis en do dièse (réponse à la réponse), on a l’impression d’un crescendo de nuance alors qu’il s’agirait plutôt d’un crescendo de tension, qui impose de manière obligée l’expression musicale. Il ne faut rien forcer dans cette musique, il suffit de la laisser faire!

Pour citer un exemple opposé, lorsque bien plus tard Beethoven débute sa neuvième symphonie, il commence pianissimo pour s’acheminer vers le fortissimo, en un crescendo orchestral dont il est d’ailleurs un peu l’inventeur. L’expression musicale, l’écriture, sont dans le début de cette symphonie tributaires de ce crescendo. Chez Bach, c’est le contraire. La nuance découle logiquement et implacablement de l’écriture.

La suite du Kyrie. 

Lors de la seconde grande entrée du choeur, il faudra apprécier l’entrée des voix dans l’ordre suivant : basse-ténor-alto-soprano 2-soprano 1. La tension musicale va s’accumuler et se résoudre de la même manière que dans la première partie, pour mener la musique à l’accord final, en tierce picarde. (Accord de si majeur).

Il est inutile je pense de décrire cette suite dans le détail, essayez de tout retrouver à l’écoute. Laissez vous entraîner dans le fleuve!

 

 

 

 

 

 

 

Option musique au bac. En liaison avec la thématique sur Germaine Tailleferre: histoire résumée de l’opéra de sa naissance au XVIIIeme siècle.

13 mardi Mar 2018

Posted by Pascal Rabatti in Cours, Non classé

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histoire de l'opéra

Résumé de l’histoire du genre mettant en lumière quelques points essentiels.

Les débuts.

L’opéra est un genre qui prend naissance en Italie au début du 17eme siècle, grâce notamment à des compositeurs tels que Peri, Caccini ou Monteverdi.

L’opéra débute à Florence avant de se propager dans l’Italie entière. (Rome, Venise puis Naples).

Claudio Monteverdi termine en 1607 son Orfeo, considéré comme l’un des premiers chef d’oeuvre du genre.

Auparavant, Peri et Caccini avaient déjà écrit les deux Euridice, entre 1600 et 1603.

Avec Orfeo, Monteverdi réalise une véritable réussite qui contribuera à l’épanouissement du genre.

Par la suite, il composera d’autres opéras tels que Arianna (dont seul subsiste le très célèbre Lamento) ou Le Couronnement de Poppée (écrit pour l’opéra de Venise).

Par la suite, de très nombreux compositeurs vont se consacrer au genre, et chaque ville y apportera sa contribution. Par exemple, Rome va permettre le développement de l’aria alors que Florence a plus apporté au niveau du récitatif. Venise va apporter le faste des décors, avec des machineries incroyables. (Il faut aussi mentionner qu’à Rome avait été construit au sein d’un palais un théâtre de 3000 places décoré par Le Bernin!).

Les voix les plus appréciées au 17eme siècle en Italie sont celles des castrats dont la mode durera jusqu’au 19eme siècle.

Quelques noms de compositeurs qui ont marqué le genre : Cavalli, Cesti Scarlatti.

En France, il faudra attendre les années 1670 pour que l’opéra s’impose réellement. Lully inaugure en 1672 son théâtre avec « les fêtes de de l’Amour et de Bacchus ». En 1674, c’est la création d’Alceste. Puis arrivera Isis, Phaeton, etc..

Le point de départ de l’opéra en France, c’est la tragédie en musique. L’opéra français va ainsi très vite se démarquer de l’opéra italien, (ce qui peut sembler paradoxal puisqu’il a été inauguré par un italien, mais Lully avait très tôt quitté son pays d’origine). Ce terme d’opéra concernant le goût français est d’ailleurs inadapté. On parle plutôt de tragédie lyrique. Ce genre évoluera très peu de Lully à Rameau car ses canons esthétiques seront fixés dès le début, et feront d’ailleurs l’admiration des autres nations pour leur équilibre et la parfaite adéquation texte-musique.

Avec Rameau commencera une ère nouvelle qui débutera par une querelle entre les partisans de Lully (les lullystes) et ceux de Rameau (les rameauneurs ou ramistes). Ce qui différencie surtout les deux créateurs, c’est que chez Rameau, la musique va supplanter le poème alors que chez Lully, elle lui est totalement inféodée. Il faut dire que les librettistes de Rameau (Fuselier ou Cahusac) n’ont absolument pas le talent de ceux de Lully (Houdard et surtout Quinault), et que Rameau avait bien compris cette nécessité de palier un certain manque de qualités littéraires par sa musique.

Dans la série des quatre mini-opéras de Germaine Tailleferre, c’est « La fille d’opéra » qui est écrit dans le style de Rameau. De nombreux éléments musicaux y font en effet référence.

Les opéras de Rameau ont obtenu un succès immense. Entre 1737 et 1785, Castor et Pollux va connaître 254 représentations, ce qui est assez colossal pour l’époque.

Rameau va également aborder la comédie lyrique avec Platée, véritable ballet bouffon avec cris d’animaux, onomatopées et farces, qui pourrait être mis en parallèle avec l‘opéra bouffe qui va s’épanouir surtout après 1750.

La querelle des bouffons, qui constitue l’une des plus célèbres querelles du monde musical sera déclenchée par une représentation en France en 1752 de La servante maîtresse (la Serva padronna) de Pergolèse. Deux clans se formèrent alors : les partisans de Rameau et de la musique française et les partisans de l’art italien. Cette querelle a servi de catalyseur pour la création d’un véritable opéra comique en France, ce très fameux opéra bouffe qui va grandement s’épanouir durant tout le 19eme siècle.

Le Dies Irae dans l’histoire de la musique

15 jeudi Fév 2018

Posted by Pascal Rabatti in Cours, Non classé

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Dies Irae, Le Requiem

Le Dies Irae

Thème important dans l’histoire de la musique, le thème du Dies Irae fait partie de la messe des morts, le Requiem. Important parce que privilégié par les compositeurs qui se sont consacrés à ce beau texte qu’est celui du Requiem.

Voici un extrait du texte de la messe des morts

Requiem æternam dona eis, Domine, et lux perpetua luceat eis.

Te decet hymnus Deus, in Sion, et tibi reddetur votum in Jerusalem.

Exaudi orationem meam; ad te omnis caro veniet.

Requiem æternam dona eis, Domine, et lux perpetua luceat eis.

 

« Donne-leur le repos éternel, Seigneur, et que la lumière éternelle les illumine.

Dieu, il convient de chanter tes louanges en Sion ; et de t’offrir des sacrifices à Jérusalem.

Exauce ma prière, toute chair ira à toi.

Donne-leur le repos éternel, Seigneur, et que la lumière éternelle les illumine ».

 

Le texte du Requiem est en fait un texte d’espoir et d’apaisement. Le Dies Irae conserve cependant un caractère assez effrayant.

Le texte du Dies Irae

 Dies iræ, dies illa,                                             

Solvet sæclum in favílla,

Teste David cum Sibýlla !

Quantus tremor est futúrus,

quando judex est ventúrus,

cuncta stricte discussúrus !

Tuba mirum spargens sonum

per sepúlcra regiónum,

coget omnes ante thronum.

Mors stupébit et Natúra,

cum resúrget creatúra,

judicánti responsúra.

Liber scriptus proferétur,

in quo totum continétur,

unde Mundus judicétur.

Judex ergo cum sedébit,

quidquid latet apparébit,

nihil inúltum remanébit.

 

Traduction

Jour de colère, que ce jour-là

Où le monde sera réduit en cendres,

Selon les oracles de David et de la Sibylle.

Quelle terreur nous saisira,

lorsque la créature ressuscitera

pour examiner rigoureusement.

L’étrange son de la trompette,

se répandant sur les tombeaux,

nous jettera au pied du trône.

La Mort, surprise, et la Nature,

verront se lever tous les hommes,

pour comparaître face au Juge.

Le livre alors sera produit,

où tous nos actes seront inscrits ;

tout d’après lui sera jugé.

Lorsque le Juge siégera,

tous les secrets apparaîtront,

et rien ne restera impuni.

Ce texte correspond dans la liturgie au jugement dernier, thème qui a également été traité par de nombreux peintres et sculpteurs. 

https://www.google.fr/search?q=jugement+dernier&source=lnms&tbm=isch&sa=X&ved=0ahUKEwiQlc7vzqfZAhXQGuwKHZcsBKEQ_AUICigB&biw=1280&bih=918&safe=active&ssui=on

On trouve notamment le jugement dernier sur le tympan de l’Abbatiale de Conques. On peut également en voir une fresque à la cathédrale Ste Cécile d’Albi. 

Voici la mélodie grégorienne du Dies Irae. Elle sera reprise tout au long de l’histoire de la musique par de très nombreux compositeurs. (Charpentier, Lully, Berlioz (dernier mouvement de la Symphonie fantastique), Dvorak, Tchaïkovsky, Ysaye, etc…). Il serait inutile et fastidieux de donner une liste exhaustive tant les exemples foisonnent. Cette pléthore  est due d’une part à la grande force expressive qui se dégage de ce thème, et d’autre part aux grandes possibilités de variation et de développement qu’il offre. Cette mélodie telle qu’on la connait aujourd’hui date du XIIIeme siècle, époque à laquelle elle commence à faire partie du corpus grégorien.

Pour plus de précisions, consulter l’article wikipedia à ce sujet.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Dies_ir%C3%A6

 

L’utilisation de la mélodie grégorienne du Dies Irae dans d’autres oeuvres. 

Lorsque Hector Berlioz reprend ce thème, il en fait une parodie, destinée à décrire le moment où celle qu’il aime rejoint la danse infernale des sorcières, alors qu’il est en plein délire. Ce thème servira en partie à conclure la Symphonie Fantastique. La mélodie du Dies Irae apparaît après un célèbre coup de cloche.

Voici un autre exemple, la Danse Macabre pour piano et orchestre de Franz Liszt.

 

Serge Rachmaninov en propose une variation au début de sa première symphonie

 

La Danse des morts d’Arthur Honegger.

 

Le Dies Irae dans le Requiem 

Il existe un grand nombre de Requiem célèbres. Parmi eux il faut citer celui de Mozart, de Berlioz, de Verdi, de Dvorak et de Fauré.

Dans la séquence du Dies Irae, ces compositeurs n’ont cependant pas repris la mélodie grégorienne originale mais ils en ont conservé le texte qu’ils ont mis en musique à leur manière. Façon souvent similaire d’ailleurs puisque le moment du Dies Irae dans un Requiem est généralement tourmenté, sonore, dans un tempo rapide et une orchestration fournie. (Gabriel Fauré faisant toutefois exception à cette règle).

Auditions 

-Dies Irae extrait du Requiem de Mozart. Véritable concentré de musique qui produit toujours beaucoup d’effet.

 

-Dies Irae extrait du Requiem de Berlioz. (Pour le coté spectaculaire : quatre fanfares disposées en quatre coins se répondent au moment du Tuba Mirum!). L’un des moments préférés de son illustre auteur. L’un des plus bruyants aussi. Il faut prendre le temps d’écouter ces douze minutes, cela vaut la peine!

 

-Dies Irae du Requiem de Verdi. (L’un des plus connus, très spectaculaire également, avec des percussions particulièrement affirmées).

 

-Dies Irae du requiem de Dvorak.

 

Le Dies Irae de Fauré est inclus au milieu de la séquence du Libera me. Ce Requiem reflète un grand apaisement par rapport à l’idée de la Mort. Même le Dies Irae n’a pas un caractère véritablement effrayant comme c’est le cas chez les autres.

« (…) Voilà 40 ans que j’accompagne à l’orgue des services d’enterrement, j’ai voulu faire autre chose« , a dit Fauré à propos de son Requiem.

Pour la littérature contemporaine, il existe le très étonnant Requiem de Ligeti

 

Voici enfin le Dies Irae extrait du War requiem de Benjamin Britten.

 

 

Dans la musique plus ancienne, il existe des pages magnifiques de compositeurs qui ont mis en musique le texte du Requiem.

En rapport avec Fauré, voici Libera me, extrait de Officium Defunctorum de Tomas Luis de Victoria.

 

Voici le Dies Irae de Cristobal de Morales (1500-1553), qui reprend le thème textuel pour le traiter ensuite de manière personnelle.

 

Il ne faut donc pas hésiter à aller écouter toutes ces pages qui prouvent à quel point la Mort a de tous temps inspiré les artistes. Par l’art, l’homme cherche des réponses à ses questions, ce qui peut expliquer en partie que le texte du Requiem ait pu être aussi souvent utilisé dans des oeuvres musicales, depuis la renaissance jusqu’à la période contemporaine.

 

L’univers modal. Explications et exemples.

10 samedi Fév 2018

Posted by Pascal Rabatti in Cours, Non classé

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la modalité en musique au XXeme siècle, les modes ecclésiastiqyes, musique modale

PREMIERE PARTIE 

Les modes ecclésiastiques 

Pendant environ trois siècles, de 1600 à 1900, la musique occidentale savante a principalement fonctionné sur deux couleurs modales, le majeur et le mineur. En effet, à partir du moment où s’installe la notion de tonalité, les compositeurs écrivent sur la base de la gamme de do majeur et son relatif mineur la.

Mais à la fin du XIXeme siècle, le système tonal a besoin d’être renouvelé. De nombreux musiciens vont alors se tourner vers d’autres gammes, et en particulier vers ce que l’on a appelé les modes ecclésiastiques, ainsi nommés car ils étaient utilisés au moyen age, notamment dans le chant grégorien. Ces musiciens se nomment Franck, Fauré, Debussy, Ravel, Sibelius, pour ne nommer qu’eux.

Obtenir ces modes sur un clavier est très facile. Il faut tout d’abord monter la gamme de do majeur, appelée mode ionien. Ce mode a triomphé durant trois siècles du fait de la très forte attraction que l’on trouve entre la note si appelée sensible et la note do appelée tonique. Cette attraction permet d’obtenir la cadence parfaite, qui peut servir à terminer un morceau de musique de manière très affirmée. La gamme de do majeur est le fondement de la musique dite tonale.

Le mode Ionien 

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/02/ionien.mp3

ionien

Que se passe-t-il maintenant si l’on monte cette même gamme en partant d’une autre note que le do? On obtient une autre gamme. Exemples ci-dessous:

Le mode Dorien 

Si l’on part du ré, on obtient le mode dorien, mode mineur qui possède deux particularités: faire entendre une sixte majeure (ré-si), et un intervalle d’un ton entre la septième note et la note fondamentale (do-ré). Voici ce mode, suivi d’une cadence de même type que la cadence parfaite en do:

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dorien

Le mode phrygien 

Si l’on part du mi, on obtient le mode phrygien, autre mode mineur possédant un caractère particulièrement mélancolique car il débute sur une seconde mineure (mi-fa). C’est la raison pour laquelle le mode phrygien est utilisé dans les musiques tziganes et dans le flamenco. Exemple ci-dessous, suivi d’une cadence à forte connotation « flamenca ». Ce mode possède des gammes dérivées dont nous parlerons plus tard.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/02/phrygien.mp3

mode de mi phrygien

Le mode lydien 

Si l’on part du fa, on obtient le mode lydien, très utilisé dans la musique polonaise. Il s’agit d’un mode majeur donnant à entendre la quarte augmentée fa-si naturel, la gamme de fa majeur faisant, elle entendre un si bémol. Ce mode est à rapprocher de la gamme harmonique ou gamme Bartok dont nous reparlerons également plus tard.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/02/lydien.mp3

mode de fa lydien

Le mode mixolydien

En partant du sol, on obtient le mode mixolydien, autre mode majeur, qui doit sa couleur particulière à la septième mineure sol-fa naturel. (La gamme de sol majeur fait entendre un fa dièse). Le mode de sol est très utilisé dans le jazz et le rock.

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myxo

Le mode éolien 

En partant du la, on obtient le mode éolien, mode mineur qui se rapproche du dorien mais qui comporte une sixte mineure la-fa.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/02/eolien.mp3

eolien

Le mode locrien

Enfin, en partant du si, on obtient le mode locrien très peu utilisé du fait de sa quinte diminuée si-fa qui lui confère un caractère particulièrement instable. On attend en effet toujours avec ce mode une résolution en mode ionien à la manière d’une cadence parfaite, tant il est évident que la quinte juste reste la base de toute notre musique, et qu’une quinte diminuée sonne toujours de manière « non finie ».

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mode de si locrien

SECONDE PARTIE 

La couleur modale 

L’un des grands intérêts de ces modes, c’est que chacun possède son caractère, sa personnalité propre. En musique tonale, il y a standardisation de l’ordre des intervalles. Que l’on joue en si majeur ou en ré bémol majeur, cet ordre est le même. (Ton-ton-demi ton, ton-ton-ton-demi ton). Mais en musique modale, cet ordre diffère d’une gamme à l’autre. C’est la raison pour laquelle chaque mode peut évoquer un sentiment ou un style de musique particuliers.

Le mode de ré ou mode dorien. 

Ce mode peut être associé à une certaine mélancolie du passé. Il suffit pour s’en convaincre d’écouter le sublime début de la sixième symphonie de Sibelius. Dans ce début, les cordes seules jouent en effet sur ce mode en conférant à la musique une couleur très particulière.

Sibelius

Il est très facile dans le mode dorien d’improviser dans le style de musiques très anciennes.

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impro dorien

Le mode de mi ou mode phrygien

Ce mode est associé à des cultures populaires à la fois tristes et festives. Le mode phrygien est la base d’une certaine musique espagnole. Voici un exemple de ce qui pourrait être une « falseta » de guitariste andalou:

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falseta

Comme il a été dit plus haut, le mode phrygien possède des dérivés très intéressants dont voici quelques exemples, parmi lesquels le mode phrygien espagnol, ou gamme andalouse. Mais toutes ces gammes sont également utilisées dans les pays de l’est dans les musiques tziganes.

On y entend des chromatismes, mais également pour certaines des secondes augmentées au caractère bien oriental.

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dérivés mode de mi

Au début de son poème symphonique Mazeppa, le grand Franz Liszt utilise l’un de ces modes dans son introduction, pour situer l’action qui se déroule en Ukraine. Voici la ligne jouée par les violons. Elle est ici suivie du mode utilisé, transposé en la. Noter la seconde augmentée si bémol-do dièse.

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Mazeppa.jpg

Le mode de fa ou mode lydien. 

Le mode de fa, avec sa quarte augmentée fa-si bécarre, possède lui aussi une couleur très particulière. On le trouve beaucoup dans la musique polonaise. Chopin d’ailleurs, dans l’une de ses polonaises, l’utilise de manière très évidente.

Moussorgski joue lui aussi avec ce mode lorsqu’il compose « Polonaise » dans son opéra Boris Godounov.

Il existe une gamme qui se rapproche du mode lydien: la gamme harmonique ou gamme Bartok. Elle est très utilisée en jazz car elle colle parfaitement avec les accords de septième et neuvième de dominante, base du blues. Maurice Ravel la donne à entendre dans le passage central de son Concerto pour la main gauche, passage fortement inspiré par le jazz.

Voici tout d’abord cette gamme:

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Bartok

Et voici ce qu’en fait Ravel, alors que le piano entonne ce passage endiablé. Il va par la suite mêler cette gamme à d’autres modes. Elle est ici transposée en mi. (Mi-fa dièse, sol dièse, la dièse, si, do dièse, ré, mi).

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solo milieu impro

Il faut remarquer que Ravel utilise différents modes dans ce passage, le seul dont nous n’ayons pas encore parlé étant la gamme pentatonique, sur laquelle nous reviendrons plus tard.

PETITE PARENTHESE SUR LES MELANGES DE MODES

Voici un autre exemple de mélange de modes, avec le premier thème du second concerto pour violon de Bela Bartok.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/02/concerto_bartok.mp3

concerto Bartok.jpg

Un thème possédant un caractère tzigane assez marqué, et qui va osciller entre trois modes: éolien, dorien et mixolydien. En effet, il commence sur un sol naturel, issu du mode éolien. Par la suite, on entendra un sol dièse, issu du dorien. Mais n’oublions pas que les modes de ré et de la sont assez proches. Il s’agit de deux modes mineurs dont la différence est la sixte, majeure pour le mode de ré, mineure pour le mode de la.

Si l’on veut pousser un peu l’analyse, on constate d’ailleurs que cette alternance entre sol bécarre et sol dièse est pour beaucoup dans la couleur du passage. En effet, le sol naturel est contenu dans les accords des mesures 2 et 4 comme une septième sur un accord de la (avec la neuvième si). A partir de la mesure 5, ce sol naturel disparaît puis revient sur la ligne de basse mesure 7 et enfin sur un accord de mi mineur en quarte et sixte mesure 8.

La mélodie donne également à entendre un ré parfois bécarre, parfois dièse. Le ré dièse est issu du mode mixolydien.

Comme on peut le constater, tout ceci est assez compliqué. L’analyse modale est souvent plus difficile à appréhender que l’analyse tonale.

Fin de la parenthèse.

Le mode de sol ou mode mixolydien. 

Ce mode, très utilisé en jazz et en rock, est aussi présent dans la musique dite classique. Voici La Cathédrale Engloutie, pièce pour piano de Debussy. Le thème principal, qui apparaît après deux pages d’introduction, est une succession grandiose d’accords, en do majeur. Au second système de la partition ci-dessous, on trouve un si bémol, qui nous oriente vers ce mode mixolydien, mode de sol donc, transposé sur do.  La musique est censée décrire l’apparition d’une cathédrale. Le mode ancien utilisé participe donc à la description de l’édifice, ainsi que cette écriture en accords parfaits parallèles volontairement archaïque. On pourrait imaginer un orgue très ancien.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/02/cath_drale.mp3

cathédrale

De toutes les pièces pour piano, celle ci reste ma préférée..

Dans la musique populaire, le mode mixolydien tient une grande place.

Voici par exemple une phrase de cornemuse écossaise. Cet instrument ne peut jouer qu’en si bémol et en mi bémol. Sa gamme de base est la suivante:

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/02/gamme_cornemuse.mp3

gamme cornemuse

Gamme mixolydienne en si bémol.

Voici donc une phrase typique:

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/02/parade_cornemuse.mp3

Parade cornemuse

Noter l’insistance sur la note la bémol.

Pour terminer avec ce mode, une petite visite dans le monde du rock: You really got me des Kinks:

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/02/you_realy_got_me.mp3

You realy got me

Les exemples de ce type sont innombrables.

Le mode éolien ou mode de la 

Avec ce mode, continuons dans le monde du rock. Le mode éolien est en effet l’un des plus usités par les « guitar heroes » de tout bord.

Lorsque l’on entend ce type de grille:

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Dylan, Hendrix

Ou ce type de phrase:

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/02/page.mp3

plan Page

On se trouve en mode éolien. Il en existe une infinité d’exemples. On peut pour rester dans les grands standards écouter des morceaux comme Stairway to Heaven de Led Zeppelin ou le magnifique Child in Time de Deep Purple.

Bien entendu, ce mode éolien ne se trouve pas que dans le rock et de nombreux compositeurs de musique savante l’ont également utilisé. L’un des pionniers de la musique modale, Gabriel Fauré, le donne par exemple à entendre au début de sa mélodie intitulée Clair de lune, sur un poème de Verlaine.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/02/clair_de_lune.mp3

clair de lune

Il faut ici noter l’ambiguïté entre la main droite qui joue donc en mode de la (avec des do et fa naturels), et l’accompagnement en arpèges de la main gauche qui donne à entendre des fa dièse et do dièse. (Pour des raisons de commodité de lecture, la musique est ici transposée en la, l’original étant en si bémol mineur). C’est là que réside l’intérêt des modes, mariage réussi entre tradition ancestrale et modernité, à la croisée entre les 19eme et 20 siècles.

Il existe une foule d’autres gammes, dont certaines feront l’objet d’un prochain article.

Olivier Messiaen s’est intéressé à ces gammes en tant que modes à transposition limitée, qui correspondaient à sa philosophie musicale sur laquelle nous ne nous attarderons pas ici.

La gamme par tons, utilisée également par Debussy, qui est une gamme à 6 notes.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/02/gamme_par_tons.mp3

gamme par tons

Comme exemple, la pièce intitulée « Voiles » de Debussy

Et les gammes diminuées, assez fréquentes en jazz.

https://marenzoarsmusica.files.wordpress.com/2018/02/gammes_diminu_es.mp3

gammes diminuées

Il existe des dizaines de modes différents, qui représentent la combinaison de plusieurs tétracordes. Je pense qu’il est très difficile de les connaître tous. C’est à chacun de s’y intéresser en fonction de ses goûts, de ses aspirations musicales. Les modes extra européens peuvent être une source d’inspiration pour certains, d’autres peuvent rester cantonnés aux modes ecclésiastiques. Dans tous les cas, c’est à chacun de trouver dans cet univers insondable son propre langage. La musique est infinie.

Aperçu sur le jazz-rock (dans le cadre des programmes du bac 2018). Oeuvre de référence: Birdland de Weather Report.

12 jeudi Oct 2017

Posted by Pascal Rabatti in Analyses musicales, Cours, jazz fusion, Non classé

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Birdland Bac 2018, jazz rock, weather report

 

Le Jazz-rock ou jazz fusion

Style musical qui apparait vers 1970 et qui mêle des éléments du langage du jazz avec d’autres courants musicaux issus du funk et du rock. Les particularités de ce style sont nombreuses.

Tout d’abord, le jazz-rock est presque exclusivement une musique instrumentale, d’un niveau technique généralement très élevé. Les morceaux sont longs, laissant une large part à l’improvisation. Les métriques sont souvent complexes, ainsi que les motifs thématiques. D’autre part, le jazz-rock se démarque du jazz « traditionnel » par l’utilisation d’ instruments électriques tels que guitares et synthétiseurs.

Les origines.

Un des grands pionniers : le trompettiste Miles Davis.

Trompettiste et compositeur, Miles Davis fait partie de ces musiciens qui ont ressenti le besoin de faire fusionner les styles différents que sont le jazz et le rock.

Miles Davis est avant tout l’un des acteurs qui ont popularisé des styles de jazz tels que le jazz modal et le cool jazz. L’un de ses plus fameux albums est Kind of blue en 1959.

https://www.youtube.com/results?search_query=kind+of+blue

A partir de 1964, Davis va fonder un quintette avec les musiciens Wayne Shorter (Saxophone), Ron Carter (contrebasse), Herbie Hancock (clavier), et Tony williams (batterie). En 1966, ce quintette enregistre l’album Miles Smiles dans lequel se trouvent les prémisses de ce qui sera plus tard le jazz fusion.

C’est en 1967 que Miles Davis va modifier l’orientation de sa musique en y incorporant des instruments électriques,  notamment la guitare.  Il faut savoir pour l’histoire que Miles Davis a été particulièrement impressionné par Jimi Hendrix, ce qui a pu influencer ses orientations musicales du moment.

En 1968, l’album Miles in the Sky inclut des instruments électriques comme les claviers joués par Herbie Hancock (Stuff) et la guitare électrique de George Benson (Paraphernalia).

 

 

 

C’est en 1969 que va naître l’album In a Silent Way qui est considéré comme le premier album de jazz fusion de Miles Davis, avec le claviériste Joe Zawinul. Puis l’album Bitches Brew sort environ un an plus tard, avec de nouveau comme musiciens Joe Zawinul, John Mac Laughlin et Wayne Shorter (entre autres). Dans ce dernier album, Miles Davis va réellement abandonner le langage du jazz traditionnel pour adopter un style plus proche du rock pour ce qui concerne l’ improvisation. Par la suite, Miles Davis va créer de nouveaux albums jusqu’en 1975, avant de se retirer de la scène jusqu’en 1981.

 

 

 

 

 

Dans les années 70, le jazz-rock va s’épanouir avec une pléthore d’artistes parmi lesquels d’anciens collaborateurs de Davis sur les deux albums phare In a silent Way et Bitches Brew. On peut citer les guitaristes Larry Coryell, Pat Matheny et John Mac Laughlin, les batteurs Billy Cobham et Tony Williams, les clavieristes Herbie Hancock, Chick Corea (Return to Forever). Enfin, Joe Zawinul et Wayne Shorter avec le groupe Weather Report. Ce groupe est à ses débuts tourné vers l’avant-garde et la fusion, avec des plages durant parfois près de 30 minutes. Avec le morceau Birdland, le ton sera plus « commercial » mais le groupe remportera grâce à ce titre un grand succès.

Voici deux beaux albums: Return to forever de Chick Corea et American Garage de Pat Metheny

 

 

 

Le morceau Birdland de Weather Report 

Pour le bac 2018, plusieurs versions de ce morceau sont proposées.

Voici celle de l’ensemble Hyperion

Particularités : version acoustique. Avec Flûte, hautbois, violon, alto, violoncelle et contrebasse.

Cette version s’éloigne de la version originale tout en s’en rapprochant par de nombreux aspects. L’arrangement est de Stephano Cabrera.

Commentaire détaillé, période par période 

-Introduction jouée par la contrebasse en pizzicato. Cette introduction n’est jouée ici que deux fois avant l’apparition du motif A. (Trois fois dans l’original). Sur la seconde apparition de l’introduction apparaissent des batteries de croches jouées par le violon. Ces batteries sont omniprésentes dans l’extrait, dans l’esprit de l’ écriture classique. Elles servent à compenser l’absence de percussions.

-Apparition du motif A, joué en harmoniques au violoncelle auquel se joint plus tard l’alto (0.26) en tierces parrallèles. Ces sons harmoniques (joués sul ponticello) cherchent à se rapprocher de la basse de Jaco Pastorius qui dans la version originale fait son entrée sur des harmoniques artificielles.

-Sur le motif B, (0.38) les batteries de croches vont cesser, mettant bien en valeur la richesse rythmique et harmonique de l’ensemble. Accords descendants d’esprit « Big band » joués par les vents le violon et l’alto et soutenus par une ligne de basse ascendante en contretemps. Ce contrepoint rythmique ne nécessite pas de batteries de croches, l’écriture en contretemps suffisant à faire avancer le discours.

-A la 48eme seconde reprennent les batteries de croches auxquelles vont se superposer des doubles croches, laissant apparaître à 0.58 le motif C. Ici ce sont les vents qui jouent le thème, alors que les cordes les soutiennent par le rythme en batteries. A 1.09 apparaît un contrechant de contrebasse reprenant la version d’origine avec ses notes longues et ses glissandos. Il est tout d’abord joué par la contrebasse, à laquelle se joint plus tard le violoncelle, ce qui correspond bien entendu aux doubles cordes qu’utilise à ce moment là Jaco Pastorius dans la version originale.

-A 1.22 survient le motif C a la flûte et au hautbois et soutenu par des batteries et un contrechant joué par l’alto. D’autre part, se rajoute un rythme joué en « Chicharra »c’est-à-dire en martelant avec l’archet les cordes entre le chevalet et le cordier. Ce mode de jeu spécifique est très utilisé par les joueurs de tango. (Chicharra signifie cigale). On peut obtenir un effet similaire en étouffant les cordes avec la main gauche et en les martelant avec l’archet.

-A 1.33 survient le motif de basse d’esprit « funky » joué par la contrebasse et le violoncelle. Contrairement à la version originale dans laquelle il est joué legato, il est ici d’esprit staccato. D’ailleurs, le staccato est dans la version Hyperion l’une des articulations privilégiées. Hommage aux grands classiques ?

-Le refrain est amené par un passage de transition sur des batteries de croches auxquelles se rajoutent des trilles.

-A 1.46 arrive donc ce que l’on pourrait appeler le refrain, d’esprit léger joué par les vents. Sur des batteries de violoncelles, cependant que la contrebasse reprend la ligne originale de Pastorius, flûte et hautbois entonnent la mélodie, soutenue par le violon et l’alto.

-Un passage de transition donnant à entendre des sons harmoniques (2.27) et des chicharras (2.29) mène au moment suivant, sur un motif répété d’esprit pentatonique. (2.33). L’élément mélodique est ici joué par la contrebasse et le violoncelle.

-A 2.52 apparaissent ces fameux accords de septième diminuée chromatiques descendants répétés 7 fois, sorte de climax du morceau qui soutient ici un solo de violon délirant dans l’esprit d’une improvisation de Jimi Hendrix ! Puis retour au calme.

 

La version de Quincy Jones

Commentaire détaillé de Birdland version Quincy Jones (1989).

Tout d’abord, voici les musiciens présents sur le disque « Back on the Block »duquel est extrait l’arrangement :

Ella Fitzgerald (chant), Miles Davis et Dizzy Gillespie (trompettes solistes), Gary Grant et Jerry Hey (trompettes), Bill Reichenbach Jr. (trombone), James Moody (saxophone soliste), Georges Benson (guitare soliste), Nathan East (basse), Joe Zawinul (synthétiseur), Michael Boddicker et Michael C. Young (programmations synthétiseurs), Quincy Jones et Rod Temperton (arrangements, frappements de mains), Ian Prince (arrangements, claviers), Ian Underwood (frappements de mains) et Larry Williams (claviers, saxophone)

Introduction dite deux fois avant le thème A, tout comme dans la version Hyperion. Présence de percussions lors de cette introduction. (Congas). Sur le deuxième énoncé de cette introduction arrive une percussion mélodique sur les notes fa-sol.

Entrée du motif A soutenu par une percussion en « after beat ». Ceci est différent des autres versions. En effet, dans la version originale, les quatre temps de la mesure sont marqués. Le tempo est d’ailleurs ici un peu plus lent que dans les autres versions.

A 0.43, c’est le motif B de type big band qui apparait. Percussion en after beat très marquée, typique des années 80-90.

A 0.57 c’est la partie C avec rajout de basse en slap et en contretemps. Peu après sur cette partie se rajoutent des voix en chœur (1.13) (yeah ! Birdland !)

A 1.27, autre passage orchestral qui donne la part belle aux instruments à vent tels que cuivres et saxophones.

A 1.46, solo de trompette par Miles Davis au style très aisément reconnaissable. Ce solo est précédé du motif de basse en octaves de type funky qui va être utilisé comme ostinato dans cette version. Juste après l’intervention improvisée de Davis arrive le saxophone (à 2.00) en improvisation également.

Puis retour au motif entendu à 1.27 suivi d’une brillante improvisation à la guitare par George Benson. La collaboration entre Benson et Miles Davis n’est pas nouvelle.  N’oublions pas que le guitariste est présent en 1968 sur le morceau « Paraphernalia » du disque « Miles Smile », (album cité plus haut comme l’un des premiers à intégrer dans le jazz des instruments électriques).

A 3.00 arrive ce que nous appelons le refrain. A 3.29 on entend un bref passage de transition avec improvisation scat à la voix d’Ella Fitzgerald. Cette improvisation va se prolonger a 3.36 sur les accords chromatiques descendants de septième diminuée.

Le morceau se termine sur des phrases très virtuoses jouées par Benson.

 

Et la version de Manhattan Transfert

 

Que l’on pourrait rapprocher par exemple de cette version de Moanin’ de Bobby Timmons.

 

Ou pourquoi pas de la version assez réussie de Smells Like Teen Spirit de Nirvana par l’ensemble vocal The Flying Picketts.

 

Jaco Pastorius (1951-1987)

La carrière du groupe Weather Report s’épanouit vraiment à l’arrivée de ce bassiste emblématique et charismatique, en 1976. Il faut dire que ce musicien a influencé nombre de ses contemporains en imposant la basse électrique non plus comme un simple soutient du discours, mais comme un instrument soliste à part entière.

La basse « fretless » : sur une basse Fender, Pastorius a enlevé les frettes afin de retrouver le toucher propre à la contrebasse.

La technique instrumentale : Jaco Pastorius a permis l’épanouissement d’une technique très virtuose dans laquelle alternent phrases rapides, sons harmoniques naturels et artificiels, doubles cordes, jeu en accords, glissandos.. On lui doit notamment une version pour basse de la Fantaisie Chromatique de J.S.Bach (du moins dans son début).

Les influences : il s’est dit influencé par des musiciens de jazz tels que Herbie Hancock, Luis Armstrong, Charlie Parker, mais également par des compositeurs tels qu’Igor Stravinsky ou Paul Hindemith. Les musiciens de rock, et notamment de rock progressif figurent également parmi ces influences. On peut ainsi citer Jimi Hendrix (qu’il singe parfois en concert en jouant de la basse avec ses dents..) ou Frank Zappa, pour n’en citer que deux.

La sonorité: immédiatement reconnaissable, le son de la basse de Pastorius n’est pas un son sourd et enveloppant. Il est au contraire très clair et c’est ce qui permet au musicien de mettre son instrument au même plan que les autres. On trouve des sonorités similaires dans le très fameux « Tutu » de Marcus Miller et Miles Davis.

Le succès commence pour Pastorius en 1970 avec le guitariste Pat Metheny (né en 1954) et le pianiste Paul Bley (1932-2016).

Il enregistre en 1975 un album intitulé « Jaco Pastorius » qui va lui apporter la célébrité et dans lequel il impose réellement sa manière de concevoir la basse électrique.

En 1976, il rejoint donc Weather Report aux côtés de Jo Zawinul (1932-2007) et Wayne Shorter (né en 1933) ce qui va permettre au groupe de connaître un succès planétaire. Zawinul le surnomme « Jaco the catalyst » tant il est vrai que le musicien catalyse réellement l’attention du public par son jeu de scène et sa seule présence.

Pastorius participe également à de très nombreux enregistrements avec Pat Metheny, Herbie Hancock et même Michel Polnareff !

C’est à cette période qu’il commence à souffrir de symptômes tels que psychose maniaco-dépressive dus en partie à une trop forte consommation de drogues et d’alcool.

Il publie en 1981 son dernier album avec Weather Report, album qui sortira en 1982. Mais ses troubles du comportement vont empirer et le mener peu à peu vers la folie, folie qui va lui fermer nombre de portes. (Les anecdotes abondent mais n’ont pas leur place ici). En 1986, il se retrouve SDF. Le 11 septembre 1987, il est violemment battu par le responsable du Midnight Bottom Club et sombre dans un coma d’où il ne ressortira pas. Il meurt 10 jours plus tard.

Quelques morceaux qui ont jalonné sa carrière :

« Chiken », avec ici le guitariste John Scofield.

Le même dans la version Maceo Parker

 

Plus « expérimental », le morceau « Third stone from the Sun », avec Weather Report.

On peut le voir dans cette vidéo où il reprend Purple Haze de Jimi Hendrix:

Un film documentaire sur Jaco Pastorius a été réalisé en 2014, produit notamment par Robert Trujillo, bassiste du groupe Metallica.

Un autre bassiste de cette époque peut être comparé à Jaco Pastorius. Il s’agit de Stanley Clarke. Peut être moins expérimental que Pastorius mais tout aussi virtuose. Voici une morceau assez réussi intitulé « East River Drive », suivi de « Beyond the seventh galaxy » de Corea. On appréciera ici la virtuosité extrême du bassiste, et sa technique de main droite au jeu en buté extrêmement rapide.

 

Voici pour conclure un petit aperçu de solos de basse qui prouvent à quel point la technique de l’instrument a pu évoluer durant toutes ces décennies.

 

 

 

Le Mahavishnu Orchestra.

Fondé par le guitariste virtuose John Mac Laughlin, le Mahavishnu Orchestra fait partie des formations incontournables lorsqu’il s’agit d’évoquer ce courant musical qu’est le jazz fusion. Cet ensemble comprend le batteur Billy Cobahm, le claviériste Jan Hammer, le violoniste Jerry Goodman et le bassiste Rick Laird. La musique du groupe est globalement marquée par le rock progressif psychédélique et les musiques indiennes traditionnelles dont John Mac Laughlin parfait la connaissance grâce à Sri Chinmoy. Du point de vue rythmique, on entend ici une métrique complexe. Les thèmes sont souvent répétitifs, et guitare et violon sont souvent en dialogue sur des improvisations étourdissantes.

Voici pour écouter le très fameux morceau « Birds of Fire », extrait de l’album éponyme de 1973.

Tout aussi fameux, le morceau Meeting of the Spirits, de 1971. Basé sur un ostinato à la guitare bien typique du style de John Mac Laughlin.

(Article en cours d’élaboration).

Baccalauréat option musique facultative. Essai de synthèse sur L’Affaire Tailleferre

13 samedi Mai 2017

Posted by Pascal Rabatti in Cours

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Bac musique 2017, l'affaire Tailleferre, la fille d'opéra, la pauvre Eugénie, le bel ambitieux

Cette thématique est assez vaste, c’est pourquoi il est nécessaire d’y avoir les idées claires, à partir d’exemples précis tirés des oeuvres. Voici quelques suggestions.

(Cet article est en fait en cours d’élaboration et va évoluer au fil du temps).

Tout d’abord, quelques questions et leurs réponses.

Qui est Germaine Tailleferre ? Une compositrice française qui couvre la fin du 19eme et une grande partie du Xxeme siècle. (Ses dates : 1892-1983).

De quelle groupe célèbre a-telle fait partie ? Du groupe des 6. Ce groupe était composé avec elle de : Georges Auric, Francis Poulenc, Darius Milhaud, Arthur Honegger, Louis Durey.

Dans quel contexte ont été composés les quatre mini-opéras ? Pour la radio. Il s’agit en effet d’une commande de 4 opéras radiophoniques par l’ORTF.

En quelle année ? 1955

Quelle est la particularité stylistique de cette œuvre ? Chaque mini-opéra est écrit dans le style d’un compositeur. La fille d’opéra : dans le style de Rameau. Le bel ambitieux : dans le style de Rossini. La pauvre Eugénie : dans le style de Gustave Charpentier. Monsieur Petitpois achète un château : dans le style d’Offenbach.

Qui a écrit le livret de ces opéras ? Denise Centore, nièce de Germaine Tailleferre.

Concernant les arguments, Existe-t-il un lien entre les quatre mini opéras ? Non. Absolument aucun. Cependant, la mise en scène réalisée par Marie Eve Signeyrole réunit ces quatre pièces sous la forme d’un procès, quatre « affaires ».

Y a-t-il cependant une recherche d’unité musicale? Oui. Par exemple le motif de l’ouverture que l’on trouve dans le premier opéra se retrouve varié dans les deux suivants, servant également d’introduction. Il existe aussi des éléments thématiques que l’on peut retrouver d’un opéra à l’autre, mais cela est loin d’être évident ,demande analyse, et reste assez rare (Voir plus loin).

Citer d’autres œuvres de Germaine Tailleferre : les Mariés de la tour Eiffel (en collaboration avec le groupe des 6), Concertino pour harpe et orchestre.

Quelles sont les deux manières de chanter dans un opéra ? Le récitatif et l’air. Le récitatif est proche de la langue parlée alors que l’air est plus mélodique. Chez Mozart et tous les classiques par exemple, récitatifs et airs sont très différenciés. Ce clivage entre les deux manières est au coeur d’une problématique inhérente à toute l’histoire de l’opéra. Au 19eme siècle en effet, les compositeurs vont chercher à estomper la différence entre air et récitatif au profit d’une sorte de mélodie continue qui sera un compromis entre les deux. Dans la série des mini-opéras de Tailleferre, ce sera le troisième, La Pauvre Eugénie, qu’il faudra analyser dans cette optique. Il faut savoir également qu’il existe différents types de récitatifs tels que le récitatif « secco », très proche du parler, et le récitatif « arioso » plus mélodique.

Pour un commentaire des oeuvres.

La Fille d’opéra, dans le style de Rameau.

Oeuvre à rapprocher de la tragédie lyrique française.

Deux extraits significatifs:

Trio de la Bastille. Dans l’histoire ce trio est chanté alors que l’inspecteur veut embastiller Mistouflet. Ce trio fait intervenir l’inspecteur, Mistouflet et Pouponne.

Cette pièce écrite dans la sombre tonalité d’ut mineur fait référence au chant « Tristes apprêts » de la tragédie lyrique Castor et Pollux de Rameau.

Description du trio de la Bastille. 

Tempo lent adapté au caractère de la lamentation, valeurs longues sur les mots importants, mélodie très lyrique et contenue. On trouve ici une basse obstinée dans l’esprit d’une chaconne ou d’une passacaille, danses à 3 temps basées sur le principe du thème et variations. Cette pièce pourrait aussi être une sarabande, autre danse lente à 3 temps.

Carrures de 8 mesures en deux périodes de 4. Très classique. Première carrure avec demi cadence, seconde avec cadence parfaite. Très classique également.

Lorsque chante l’inspecteur, il fait une ligne chromatique descendante. Les accords restent sensiblement les mêmes qu’au début, mais disposés différemment. Aussi sur deux carrures de 8 mesures.

La pièce se termine de manière polyphonique, les trois acteurs chantant en même temps tout d’abord sur des textes différents puis sur un texte identique. C’est Pouponne qui chante le thème.

Si l’on écoute l’air ‘Tristes apprêts » de Rameau on constate quelques différences : on n’est pas en ut mineur mais en mi bémol majeur. D’autre part cet air est un monologue et non un trio. Et il est écrit en mesure à 4 temps. 

Forlane 

Danse baroque en mesure ternaire basée sur une omniprésence du rythme de sicilienne. La forlane de Pouponne est à rapprocher d’une chanson populaire. 

Tonalité de sol mineur.

Phrases chantées sur des carrures de 8 mesures (4 par strophe, les 3 et 4 avec modulation en ut mineur). Intro par contre de 6 mesures, qui donne à entendre le thème du chant.

Forme strophique. Chaque strophe est séparée de la suivante par une brève ritournelle de 2 mesures.

Pour comparaison, on peut écouter des forlanes de Couperin, Campra, Bach, Ravel..

Ecoutons également des extraits de tragédies lyriques de Lully.

La très belle passacaille « les plaisirs ont choisi pour asile » extrait d’Armide.

Voici le monologue d’Armide « Enfin il est en ma puissance »

Voici l’ouverture de Cadmus et Hermione, toujours de Lully, illustrant ce principe d’ouverture à la française.

Voici le finale de cette même oeuvre

 

GLOBALITE DE LA PIECE « LA FILLE D’OPERA »

Brève ouverture instrumentale sur un rythme « à la française ». (Rythme pointé). Si bémol majeur. Deux phrases de 4 mesures chacune, la première se terminant sur une demi-cadence, la seconde sur un Cadence parfaite. Le thème de cette ouverture se retrouvera par la suite de manière variée, en introduction aux deux opéras suivants. (Le bel ambitieux et la Belle Eugénie).

  1. Le duo qui suit est d’un esprit léger. Forme rondo. Fa majeur.

L’introduction donne le thème sur 8 mesures. Pouponne entonne donc ce thème très chantant. Les vents le doublent. Tout le morceau est basé sur des carrures de 8 mesures.

Deux périodes : Le financier (…) de t’aimer, est dit en fa majeur sur la phrase jouée au début par l’orchestre. Chiffre 1 : Et croyant (..) la félicité, module en do (si bécarre). Cette seconde phrase est reprise par les deux chanteurs de manière polyphonique et homorythmique.

Au chiffre 2 survient le refrain. En si bémol majeur. Chanté par les deux en homorythmie. Ce refrain se termine sur une cadence parfaite en si bémol. Le motif d’accompagnement du refrain passe en batteries de croches, pour ses quatre premières mesures.

Puis Mistouflet reprend le thème principal. Même construction.

L’orchestre conclut en reprenant la phrase du début.

  1. Trio. Pouponne, ses parents, Mistouflet.

Introduction de caractère champêtre jouée par l’orchestre. Fa majeur. (Référence probable, la chanson populaire « nous n’irons plus au bois »).

La mère reprend ce thème naïf mettant l’accent sur les notes de l’arpège de fa.

Le père chante sur des notes répétées avec un saut d’octave, doublé par les basses de l’orchestre.

Puis Pouponne entonne ce qui pourrait être un refrain, dans l’esprit donc d’une chanson populaire. (« Mon père, ma mère, (…) allez donc soigner vos boeufs »). L’orchestration est dans tout ce passage assez subtile. Doublure des voix, batteries de croches, accords..

La scène se termine en récitatif (sortez d’ici, manants..) Puis Pouponne conclut sur un élément qui pourrait être un mélange de l’ouverture (rythmes pointés) et du refrain de ce trio. Sol majeur. (« Mon père, ma mère, je suis bien votre servante »).

  1. Retour au duo du début, mais avec introduction en do majeur.
  2. Pouponne, Mistouflet, le bottier, le merlan.

Introduction en fanfare par l’orchestre en mode de fa transposé sur ré. Intervention de Mistouflet en récitatif suivie de la fanfare. Par la suite cette pièce va mêler deux duos : Pouponne et Mistouflet, le merlan et le bottier.

 

Le Bel ambitieux.

Ecrit dans le style de Rossini.

Deux extraits significatifs.

Duo d’amour Alphonse-Clémentine

Après avoir déclamé leur texte à la manière d’un mélodrame, Alphonse et Clémentine entament leur chant, prenant tour à tour la parole avant d’unir leur voix sur le texte « une divine harmonie ». Groupes de 5 croches aboutissant sur une appogiature longue très expressive. La tonalité est globalement la bémol majeur mais on va trouver des modulations assez surprenantes, héritage du romantisme.

Accompagnement en accords martelés en mesure ternaire. Tonalité majeure (La bémol). Commence sur la dominante mi bémol. Puis sur pédale de tonique la bémol.

Quelques doublures voix-orchestre.

Forme AABA’

Sur le B on va trouver un langage plus modulant. Tons éloignés du ton d’origine.

Au chiffre 4 reprise du thème avec les 2 voix. Contrepoint.

Pour ce qui concerne le texte, il y est question de souffrance, mais la musique accentue par une certaine surenchère un caractère comique qui fait que l’on n’y croit pas vraiment.

Pour comparaison : duo « oui c’est toi que j’aime » extrait de Faust de Gounod.

Trio valse

Trio numéro 6 : valse, autre danse de salon en vogue au 19eme. Forme rondo dans laquelle le refrain encadre les couplets de solistes. Trois textes différents en même temps sur ce refrain.

Matériau thématique : introduction avec glissades en octaves ascendantes, puis quartes, quintes et sixtes dans le refrain à la voix de Clémentine.

Ton de mi bémol.

Alphonse, Clémentine et la baron entonnent donc cette valse. Chacun au début chante sur un texte différent mais par la suite, ils se rejoignent tous sur le même texte.

Insistance sur le premier temps de la mesure. Rythme de valse donc très marqué.

Le thème principal commence sur un saut de quinte ascendant, chanté par la soprano.

Forme rondo. Le refrain à 3 voix les couplets à une voix (en ut mineur), chantés alternativement par les 2 voix masculines. De la même manière que pour le refrain, le couplet commence sur un saut ascendant de quinte. (Sol-ré).

Pour le refrain, écriture globalement homorythmique.

Dans cette valse, Tailleferre tourne en dérision la soif d’ambition des protagonistes.

Pour comparaison, on peut écouter la valse extraite de Faust de Gounod, ou bien Brindisi extrait de la Traviata de Verdi.

 

LA PAUVRE EUGENIE 

Ecrit dans le style de Gustave Charpentier. Références en effet à son opéra naturaliste « Louise ».

La pauvre Eugénie est découpé en 5 tranches de vie qui s’enchaînent sans interruption. Pas de différence entre récitatif et air, ce qui est typique de l’opéra de la fin du 19eme et du début du 20eme siècle (voir les questions en première partie). L’opéra naturaliste recherche une action proche de la vie de tous les jours avec des personnages généralement issus des classes moyennes.

Carmen de Bizet pourrait appartenir à ce genre.

En Italie, un courant similaire au courant naturaliste va naître à la fin du 19eme siècle avec l’opéra vériste dont les plus grands chefs d’oeuvre sont Tosca ou la Bohême de Puccini. Dans son opéra Pagliacci, Le compositeur Leoncavallo expose dans son prologue une sorte de manifeste de l’opéra vériste. Un opéra donc plus proche du peuple et de la vie quotidienne.

Deux extraits significatifs.

Première tranche de vie.

Après une ouverture particulièrement tragique (reprenant en le variant le motif mélodique inhérent aux deux opéras précédents), début l’oeuvre dans un ton tragico-populaire.

Présence de silences dramatiques à l’orchestre, musique décousue calquée sur la déclamation du texte, caractère changeant de manière rapide et incessante. Le langage est très modulant avec des chromatismes, des trémolos.. La pulsation est imperceptible puisque calquée sur le rythme de la langue parlée.

La manière de chanter oscille ici entre récitatif et air, comme dit plus haut, faisant référence à Wagner, Bizet, Charpentier ou Debussy.

Cela va se traduire musicalement par des passages avec des notes répétées (chant recto tono) et de temps en temps un saut d’intervalle important pour souligner un mot.

Lorsque Eugénie raconte comment elle est tombée amoureuse, son chant va se situer davantage dans l’esprit d’un air. L’accompagnement est alors plus calme, plus posé. Ce passage fait directement référence à l’air Depuis le jour extrait de Louise de Charpentier.

 

On peut également écouter des extraits de Pelléas et Mélisande de Debussy, ou Tristan et Isolde de Wagner. Wagner est effet l’un des grands compositeurs d’opéra à l’origine de ce principe de mélodie continue.

Deuxième extrait : Cinquième tranche de vie.

Quatuor. Eugénie, Paule, Titine, Gégène.

Caractère fiévreux, trépidant. Pour l’histoire, tout le monde est scandalisé que Mme Phémie (rôle tenu par une voix d’homme) se fasse livrer un boa et mette Eugénie à la porte pour un morceau de saucisson (à l’ail).

Accompagnement en batteries de doubles croches alternant cordes et bois. Contrechant à prédominance chromatique joué par les bassons. Tonalité de ré mineur. Discours tendu et modulant.

Le chant est fait de nombreuses notes répétées (mélodies recto tonales) et certains mots sont mis en valeur par des sauts sur de plus grands intervalles. (C’est la VIE, c’est honTEUX).

Fin du passage à trois voix alors qu’Eugénie dit « C’est moi », sur deux voix homorythmiques de Titine et Paula.

Il s’ensuit le duo d’amour entre Eugénie et Gégène, dans le caractère d’une mélodie sentimentale en ré majeur, sur un accompagnement très posé en accords.

Le motif utilisé peut rappeler celui que nous entendions dans le bel ambitieux lors du duo « Tu souffres et je meurs », notamment par l’utilisation du rythme donnant à entendre un demi soupir suivi de 5 croches. Par la suite, Eugénie reprend ce thème, et le passage va s’achever par le duo.

Pour comparaison : Au secours!  extrait de Carmen de Bizet.

Monsieur Petipois achète un château 

Ecrit dans le style de Jacques Offenbach 

Ouverture : répétée plusieurs fois sur texte déclamé. Cette ouverture bien dans le style de l’opérette est en ut majeur sur des harmonies assez simples. Ecriture verticale en accords martelés avec le thème au registre aigu. Au chiffre 1, un motif de basse typique. Le thème de cette ouverture sera repris dans les deux derniers choeurs ( numéro 7 : signez Monsieur Petitpois et numéro 8 final).

  1. Un joli hussard. Forme strophique avec refrain. Dans un esprit de marche militaire. Ton de si bémol Majeur. Ligne mélodique simple d’esprit militaire sur les notes de l’accord au début (fa sib ré). Accompagnement en accords martelés par l’orchestre auquel se rajoutent des motifs de type fanfare.

Le refrain est dit en mesure à deux temps, par les trois autres personnages dans un tempo plus rapide. Répétition humoristique de la syllabe « tan » du prénom Adelestan, bien dans l’esprit d’Offenbach.

  1. Valse tyrolienne. Début sur Veme degré. Introduction avec rythme de valse et arpèges dans l’aigu. Forme rondo également. Le refrain reprend vocalement les arpèges du début. Eloge de la moustache. Texte assez drôle et dérisoire, dans le style de certaines pages de Jacques Offenbach. (Voici le sabre, ah que j’aime les militaires, etc..). Cette valse ferait référence à la valse tyrolienne extraite de La Vie Parisienne.

Elément musical comique : les sixtes ascendantes jouées par les vents et notamment la clarinette.

  1. La galerie des ancêtres. Forme rondo. Mesure à 3 temps. Noter ici l’orchestration subtile qui donne à entendre des phrases assez drôles jouées par les vents. L’introduction instrumentale est basée sur les motifs du refrain. Thème principal très simple.

Le texte est ici marqué par l’utilisation de syllabes à l’effet comique, (d’avoir des an (z)an, d’avoir des ancêtres), bien dans le style humoristique de Jacques Offenbach qui aime lui aussi jouer sur les mots de cette manière. (Se référer aux couplets des rois de la Belle Hélène : « je suis l’époux de la reine, poux de la reine,.., le roi barbu qui s’avance, bu qui s’avance.. »).

Le refrain est dit par Petitpois tout d’abord, puis par le tutti, dans lequel Petitpois répète  deux fois la même phrase. Le tempo est dans le refrain lui aussi accéléré.

4.Duo. Héloïse-Adelestan.

Duo d’amour d’opérette. Ton de la majeur, mesure ternaire à six-huit.

-Quatre mesures servent à l’introduction sur pédale de mi (Veme degré). Sur la mesure deux, un chromatisme.

-Le chant débute sur la levée de la mesure 5 sur un accompagnement posé en arpèges par les cordes. Ces arpèges vont être omniprésents tout a long de la pièce, mais ils seront enrichis de contrechants joués par les bois. Héloïse commence seule la première strophe. Harmonie simple, avec les degré 1, 5 et 4 tout d’abord. Puis mesure 9 survient une modulation en fa dièse mineur (par le mi dièse) qui va mener mesures 11 et 12 à une demi cadence reprenant le motif de l’introduction et correspondant à l’entrée vocale d’Adelestan.

-Chiffre 1, la seconde strophe est dite à deux voix, chacune chantant un texte différent.

-Au chiffre 2 en revanche, les deux voix chantent le même texte. L’accompagnement est ici enrichi. C’est la troisième apparition du thème principal.

-A partir de la mesure 31 commence une coda qui débute sur une marche harmonique.

-C’est l’orchestre qui conclut la pièce en reprenant en écho une variation du thème.

Voici maintenant quelques extraits d’oeuvres de Jacques Offenbach, parmi lesquels deux valses tyroliennes.

 

 

Pour la pratique au clavier des bases de l’harmonie classique.

05 dimanche Mar 2017

Posted by Pascal Rabatti in Cours

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accord dom de dom, enchainement 2-5-1, enchainements d'accords, harmonie classique

Etudier l’harmonie, c’est apprendre à enchaîner les accords de la manière la plus élégante possible. Pour cela, il peut être très utile de se mettre au clavier et de travailler de manière systématique et dans toutes les tonalités des enchaînements types. On trouvera ici quelques exemples qui peuvent permettre à un étudiant de se mettre dans les doigts, et donc dans l’oreille des positions fondamentales dont la connaissance est indispensable pour une bonne pratique de l’harmonie.

Ce cours s’adresse à des étudiants censés connaître le solfège. La lecture des notes y est indispensable.

Généralités

Voici tout d’abord la base de tout, la gamme de do (mode ionien):

la gamme.jpg

Ainsi que la mineur, sa gamme relative:

gamme-la-m

Les deux degrés fondamentaux d’une gamme, et donc d’une tonalité sont le premier (la tonique) et le cinquième (la dominante). Occupons nous tout d’abord de ces deux degrés.

L’accord parfait de tonique et ses deux renversements.

Pour construire cet accord, on part de la note do, puis on empile des notes à distance de tierce. (Do ré mi, mi fa sol).

Un accord est dit renversé lorsque l’on trouve à la basse une autre note que sa note fondamentale. Exemple : l’accord de do est composé des notes do, mi et sol. A l’état fondamental, le do sera à la basse, pour le premier renversement, ce sera le mi, pour le second ce sera le sol. Exemple ci dessous, avec les chiffrages de chaque accord.

acc parf renv.jpg

Petite explication pour les chiffrages figurant sur chaque accord:

A l’état fondamental, on chiffre 5 car il s’agit de l’accord de quinte (do ré mi fa sol). Le premier renversement est chiffré 6 car accord de sixte (mi fa sol la si do). Le second renversement est chiffré 6 4 car cet accord donne à entendre la quarte sol-do et la sixte sol-mi. Les chiffrages sont à connaître absolument par coeur.

L’accord de septième de dominante et ses trois renversements.

Pour construire cet accord, on part de l’accord parfait de sol (sol, si, ré) et on y rajoute une tierce (le fa). Pour obtenir la septième, on peut aussi compter 7 notes en montant la gamme à partir de la note fondamentale d’un accord. (Sol la si do ré mi fa, par exemple).

Exemple ci dessous. La septième est en rouge, pour des raisons de clarté.

7eme-dom-av-renv

Explication des chiffrages: 7 +: accord de septième (sol-fa) avec la sensible (+). En do, la note sensible est le si. 6 5/ (se dit six cinq barré) donne à entendre la sixte si-sol et la quinte diminuée si-fa. +6 veut dire que la sensible est une sixte au dessus de la basse (ré-si). +4 veut dire que l’on entend dans l’accord l’intervalle de triton fa-si, le si étant la sensible.

Enchaînements entre ces deux accords.

La tonique et la dominante s’enchaînent naturellement et constituent la base du système tonal. Nous allons voir ici les différentes manières d’enchaîner ces deux degrés. Important: la sensible monte sur la tonique et la septième descend sur la tierce. Cela est valable dans la plupart des cas.

Voici tout d’abord l’enchaînement de base, la cadence parfaite, présentée de trois manières différentes.

CP.jpg

Ce type d’enchaînement est à pratiquer régulièrement sur un clavier dans toutes les tonalités possibles. Voici quelques exemples:

CP en plusieurs tons.jpg

Il y a 24 possibilités ! A vous de les trouver dans chaque tonalité, majeure ou mineure.

Enchaînements avec renversements d’accords

Une fois ces réflexes acquis, voyons ce qui va se passer avec les accords renversés. Cela décuple bien entendu les possibilités. En voici quelques unes.

Dans l’exemple suivant, l’accord de dominante est utilisé dans son premier renversement. Les trois premières mesure sont en do majeur, les trois dernières en la mineur. Notes en rouge: les septièmes.

6 5 barré 5.jpg

Ce type d’enchaînement, d’esprit romantique, a été très utilisé par Robert Schumann. Il est également à travailler dans tous les tons possibles. La présentation de l’accord de dominante est ici idéale car elle donne à entendre la septième dans l’aigu en mouvement contraire avec la sensible à la basse. Cela sonne vraiment parfaitement.

Voici un autre exemple, très « schumannien » lui aussi:

6 5 barré 5.jpg

On remarquera le mouvement conjoint descendant à l’aigu, la ligne de basse réalisant l’enchaînement des sensibles vers les toniques.

L’accord +4.

C’est un accord extrêmement important. Il s’agit du troisième renversement de l’accord de dominante, dont la particularité est de faire entendre la septième à la basse. Voici trois manières de présenter ce renversement:

4-3-pos

Cet accord est à enchaîner avec un accord de sixte. Voici également trois possibilités:

+4 6 3 pos.jpg

A maîtriser dans toutes les tonalités possibles. On peut travailler ces tonalités séparément, mais également en les enchaînant à la manière d’une marche harmonique. Voici tout d’abord une possibilité qui est en quelque sorte l’inverse de l’enchaînement « schumannien » cité plus haut. En effet, la gamme descendante se trouve à la basse, cependant que l’aigu réalise le passage des sensibles vers les toniques.

+4 6 diato.jpg

Voici un autre exemple, avec basse chromatique. Le discours est ainsi très modulant.

+4 6 chroma.jpg

Avec des tonalités mineures (très modulant):

tons mineur +4 6 prems.jpg

Autre exemple, avec mouvement ascendant dans le registre aigu:

marche montante +4 6..jpg

Voici une marche qui va mélanger un enchaînement +4 – 6 et un enchaînement 6 5/ – 5.

+4 melangé av 65.jpg

 Autre exemple, permettant de moduler dans des tons éloignés:

mélange av +4 et 6 5 modulant.jpg

Un exemple de marche « en boucle » qui permet de revenir à la tonalité de départ:

marche en boucle 1.jpg

Enfin, une marche avec mouvement mélodique ascendant dans le registre aigu, qui nous permet une nouvelle disposition de l’accord 6 5/:

marche av mvt mel asc.jpg

Il va de soi que les possibilités sont multiples, voire infinies ! A vous de les appliquer et même d’en découvrir d’autres.

L’accord +6

Le second renversement de l’accord de dominante est moins utilisé que les deux autres. Il est souvent entendu comme accord de passage.

le +6.jpg

Remarquer que dans cet enchaînement, la septième monte. Cela est possible car les deux voix extrêmes se retrouvent en sixtes parallèles.

Il ne faut donc pas hésiter à se mettre au clavier et travailler de manière systématique, comme on travaille la technique instrumentale par le biais des gammes et des arpèges.

Une seconde partie va traiter maintenant des enchaînements dit 1-2-5-1

Le 1-2-5-1

Il existe en effet un degré qui amène naturellement l’accord de dominante. Pour quelle raison? Cela est très logique. Lorsque l’on se trouve dans le ton de la dominante d’une tonalité, on s’aperçoit que le cinquième degré est en fait le second de la tonalité d’origine. Explication ci-dessous:

gammes de do et sol.jpg

En do majeur, l’accord de second degré sera composé des notes ré, fa et la. On peut y rajouter une septième: le do. Voici tout d’abord différentes manières de présenter cet accord de second degré:

le second degré..jpg

Voici en suite quelques exemples d’enchaînement 1-2-5-1.

En tonalité majeure:

2-5_1 maj.jpg

Puis en tonalité mineure:

2-5_1 min.jpg

En do majeur, quand on rajoute un dièse sur la note fa du second degré, on donne à entendre la note sensible de sol. De ce fait, le second degré devient la dominante de la dominante. En jargon musical, on appelle cet accord « dom de dom ». Il est le résultat d’un  emprunt au ton de la dominante.

Il conviendra de transposer les exemples ci-dessus dans toutes les tonalités possibles, majeures et mineures. Ce travail peut s’avérer très payant. L’harmonie peut paraître souvent comme quelque chose de très abstrait. En réalisant les accords sur un clavier, on peut mieux se rendre compte de ce qui se passe. Pour ma part, j’ai compris ce qu’était l’harmonie grâce à la pratique quotidienne de ce genre d’exercice.

Concernant l’enchaînement 1-2-5-1, il existe sur ce site un article traitant de ce que l’on appelle la sixte napolitaine. N’hésitez pas à le consulter.

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