Le site Marenzo Ars Musica est consacré à la musique. Je le tiens depuis maintenant quelques années et m’en sers notamment pour mon métier d’enseignant, puisque je suis professeur de musique en lycée, dans le cadre d’une option musique.
On pourra y trouver différentes rubriques, entre analyses d’oeuvres, cours, pratique du clavier et présentation de composition personnelles. Il ne faut pas hésiter à aller fouiller pour découvrir ces différentes catégories. Certains articles concernent des oeuvres précises (concerto de Ravel par exemple), d’autres sont basés sur des thématiques (rapport texte-musique, rapport musique-image, modes, etc..), enfin d’autres un peu plus techniques peuvent intéresser des étudiants en harmonie.
Les articles apparaissant au début sont les derniers édités.
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J’espère en tous les cas que ce travail saura intéresser des personnes désireuses d’approfondir leurs connaissances dans ce vaste domaine qu’est la musique.
Voici une toute nouvelle composition que je tiens à présenter. Il s’agit de trois pièces pour deux violons. J’ai écrit la première en mai 2021 pour deux élèves violonistes de mon lycée. Les deux autres pièces ont été composées tout récemment, et lui font donc suite.
La première pièce est écrite dans l’esprit d’une danse et donne la part belle aux hémioles. (Accentuation à deux temps en fin de période dans une mesure à trois temps).
La seconde est un contrepoint, une sorte de dialogue entre les deux instruments.
Enfin, la troisième de ces pièces est basée sur une alternance permanente de mesures impaires et paires (5/8, 7/8, 6/8, 8/8, etc..). On pourra y déceler un petit hommage à un certain Bela Bartok..
Ces trois pièces ont été enregistrées par Christian Clavere, professeur de violon au CRDA de Rodez. Il les jouera très prochainement en public (le 4 septembre à Rodez) en compagnie de Frédérik Camacho.
Par la suite, d’autres pièces de ce type verront le jour. Le projet serait un recueil, une sorte de cahier d’esquisses qui regrouperait une série de courts morceaux pour deux violons. Une formation de ce type offre en effet beaucoup de possibilités, tout en invitant à un certain ascétisme. On est en effet loin d’un quatuor à cordes, qui propose une palette évidemment beaucoup plus vaste. Ici, l’écriture à deux voix reste prédominante et doit donner le maximum. J’espère y être parvenu dans ces pages !
Le Boléro de Maurice Ravel figurant dans les programmes de lycée d’option musique 2021, voici un aperçu de l’œuvre globale du maître, avec donc comme point de départ ce Boléro.
« En 1928, sur la demande de Mme Rubinstein, j’ai composé un Boléro pour orchestre. C’est une danse d’un mouvement très modéré et constamment uniforme, tant par la mélodie que par l’harmonie et le rythme, ce dernier marqué sans cesse par le tambour. Le seul élément de diversité y est apporté par le crescendo orchestral.»
Comment expliquer le Boléro ?
Tout d’abord, il s’agit d’une œuvre unique en son genre, une œuvre de musique symphonique répétitive et lancinante. Deux thèmes alternés, qui pourraient se rejouer à l’infini, en conservant l’inépuisable fascination qu’ils exercent, sur une pulsation bien installée dans une mesure à trois temps.
Ravel a déclaré que son Boléro, « vide de musique » selon lui, aurait pu être composé par n’importe qui, une fois trouvé le thème principal. Rien n’est moins certain. Et ces deux thèmes, il fallait quand même les inventer ! Seul un véritable coup de génie a pu permettre de produire des mélodies d’une telle évidence.
Il y a aussi le rythme, ce fameux rythme de la caisse claire, que l’on n’oubliera jamais une fois qu’on l’a assimilé. Ce rythme aussi qui appuie les deux derniers temps de la mesure, et qui donnerait envie de danser.
Et puis, il y a l’orchestration. A chaque itération du thème, un élément nouveau, infime parfois mais pourtant présent, survient, éveillant ainsi un regain d’intérêt. Des accords joués par une harpe, une flûte qui s’installe sur l’ostinato de la caisse claire, un basson solo dans le registre aigu, un saxophone, instrument assez rarement utilisé dans l’orchestre, qui reprend le thème, des doublures très dissonantes, polytonales, de ce même thème, les violons qui le reprennent en tutti, les mélanges de timbres.
Et puis il y a cette fin, tellement spectaculaire, avec cette modulation subite de do vers mi majeur, qui fait que tout se détraque, avant de s’effondrer en un cataclysme sonore, par un retour au do majeur initial.
Ravel était fasciné par les automates, les machines. Cela se ressent dans des œuvres telles que le Boléro. Une mécanique bien huilée, inexorable, et qui finit par s’autodétruire.
On trouve une fin similaire dans le Concerto pour la main gauche, alors que le jazz revient, pour quelques secondes avant de précipiter l’œuvre sur sa fin. La Valse, écrite aussi à l’origine pour un ballet, se terminera de la même manière.
Il faut avoir écouté en entier ce Concerto pour la main gauche, véritable défi avec l’impossible par lequel un pianiste sorcier, avec seulement une main, doit donner l’impression qu’il joue avec les deux !
Pour continuer, voici La Valse, composée à l’origine pour les Ballets Russes de Serge Diaghilev.
« espèce d’apothéose de la valse viennoise à laquelle se mêle dans mon esprit l’impression d’un tourbillon fantastique et fatal ».
En revanche, Diaghilev refusera l’œuvre pour les ballets russes. Selon lui, Ravel avait bien écrit un chef d’œuvre, mais pas une musique de ballet. Cela sera à l’origine d’une brouille indéfectible entre les deux hommes.
Cette fatalité dont parle Ravel dans la citation ci-dessus est assez fréquente dans sa musique. On trouve très souvent dans ses œuvres une issue définitive, inéluctable, comme la Mort. Les tragédies humaines ont profondément marqué Ravel. Le concerto pour la main gauche reflète ainsi en partie les horreurs de la Grande Guerre.
On trouve aussi chez Ravel le perpétuel émerveillement de l’enfance. Enfance grimaçante du Duo pour violon et violoncelle (scherzo, ici à 4’40’’)
Enfance fantasmagorique et quelque peu terrifiante de l’Enfant et les Sortilèges, sorte de mini opéra (Fantaisie lyrique), sur un livret de Colette, dans lequel un enfant rebelle se trouve en proie à la sorcellerie d’objets qui deviennent vivants et se révoltent contre lui.
La musique de Ravel peut également être très nostalgique. Il faut écouter le quatuor à cordes, le second mouvement du concerto en sol, la passacaille du trio pour piano, violon et violoncelle, composé en 1914.
Ravel, c’est aussi la nature. Nature merveilleuse, impressionniste, de Daphnis et Chloé
Nature des Histoires Naturelles, œuvre un peu curieuse mais non sans charme d’après Jules Renard.
Ravel, c’est aussi la virtuosité pianistique, alliée à la somptuosité harmonique. Voici le Tombeau deCouperin, suite de pièces écrite en hommage aux maîtres du passé, qu’il aimait beaucoup.
Voici une œuvre de 1901, les très fameux Jeux d’Eau.
Ravel, c’est aussi la brillance d’une harmonie complexe, souvent très chargée. Voici les Valses Nobles et Sentimentales.
Miroirs, l’une des suites les plus riches et les plus difficiles techniquement. Noctuelles, oiseaux tristes, Une barque sur l’océan, Alborada del Gracioso, la Vallée des cloches.
Ravel est également très influencé par les musiques populaires, qu’il transcende dans certaines de ses œuvres. Le début du trio, en mesure à 8/8, est inspiré de la musique du pays basque, dont il est originaire. Il est en effet né à Ciboure, non loin de Saint Jean de Luz.
L’Espagne a également grandement influencé Ravel. Voici la Rhapsodie Espagnole.
L’Asie l’a également influencé. Voici Laideronnette, impératrice des pagodes, extrait de Ma Mèrel’Oye.
On pourrait aussi parler du jazz. Dans les deux concertos pour piano, le jazz est en effet omniprésent. Ravel admirait beaucoup George Gershwin, cette admiration étant largement réciproque. J’ai toujours trouvé dans le concerto en sol des réminiscences de la Rhapsody in Blue.
Un jour à Paris, un joueur de cabrette, cette cornemuse auvergnate et aveyronnaise, remarquait pendant qu’il jouait un homme au fond de la salle qui notait ses mélodies sur papier. L’homme est venu se présenter à lui à la fin. C’était Ravel ! Dans quelle œuvre a-t-il pu introduire, s’il l’a fait, ce qu’il a noté ? Nul ne peut le dire.
En effet, Ravel s’inspire de ce qu’il entend, mais le transfigure au point de le rendre méconnaissable. Pour le mouvement lent du concerto en sol, il s’est, a-t-il dit lui même, inspiré du quintette pour clarinette et cordes de Mozart !
Le Noël des Jouets, les Chansons Madécasses, Don Quichotte à Dulcinée, le Tzigane, Gaspard de la Nuit, Ma Mère l’Oye.. Il ne s’agit pas ici de fournir une liste exhaustive des œuvres de Ravel, et pourtant on pourrait. Je me suis laissé dire que l’intégralité de sa musique tient sur 48 heures. Cela signifie qu’en deux jours, on pourrait écouter tout Ravel. Il n’est donc pas impossible, loin de là, de connaître son œuvre entière. Deux jours de musique, ce n’est pas énorme, si l’on considère la production gigantesque de Bach, Telemann, Mozart ou même Beethoven. Plus récemment, Dimitri Chostakovitch totalise lui aussi une durée absolument phénoménale, avec 14 symphonies, des opéras, de la musique de chambre, de la musique vocale, de la musique de film.
J’ai lu récemment les mémoires de Chostakovitch. Je me suis étonné qu’à aucun moment il n’y mentionne Ravel, car il le connaissait forcément. Tout juste évoque-t-il Debussy, et cela de manière très succincte. Sans doute l’esthétique française ne correspondait-elle pas à la sienne. Serge Prokoviev, autre important compositeur russe, admirait en revanche Ravel. « En France, seul Ravel sait ce qu’il fait », aurait-il déclaré.
Debussy, dans son célèbre livre Monsieur Croche , ne mentionne lui non plus jamais Ravel. Sans doute une certaine rivalité existait entre les deux hommes. Ils furent en bons termes jusqu’en 1905 mais après, un froid s’installa entre eux. La rumeur dit que Ravel, qui pourtant n’avait jamais caché son admiration envers son aîné, accusa Debussy de lui avoir emprunté le thème de son Habanera dans une œuvre. Debussy, quant à lui, ne manqua pas d’envoyer des piques sur la musique de Ravel qu’il jugeait trop artificielle :
« Ce qui m’agace, c’est son attitude de faiseur de tour ou mieux, de Fakir charmeur, qui fait pousser des fleurs autour d’une chaise. » (Lettre du 25 janvier 1907 de Claude Debussy à Jacques Durand)
Toujours est-il que le duo Debussy-Ravel représente la quintessence de la musique française de cette période.
Les deux artistes s’estimaient tout de même. « Ne changez pas une note à votre quatuor », aurait dit Debussy à Ravel, alors que ce dernier projetait de remanier son œuvre.
Il faut savoir aussi que la Sonate pour violon et violoncelle a été écrite par Ravel en hommage à Debussy, après la mort de ce dernier.
On a souvent comparé Debussy et Ravel, ce qui est normal étant donné leur exacte contemporanéité. Ils sont très différents. Debussy renie les formes classiques telles que forme sonate, passacaille, forme ABA, alors que Ravel les assimile et les utilise. Ravel assume l’harmonie classique alors que Debussy utilise les accords pour ce qu’il représentent du point de vue de la couleur, loin des enchaînements de tonique et dominante. La musique de Ravel est souvent d’une précision mécanique, tranchante, pas celle de Debussy. Enfin, Ravel aime la difficulté technique, la virtuosité instrumentale. Debussy y attache moins d’importance. Ravel demanda un jour à son amie la pianiste Marguerite Long si une Toccata de Saint Saëns était plus difficile que la sienne, extraite du Tombeau de Couperin. Elle lui a répondu par l’affirmative. Il était parait-il très vexé.
Ce qui peut réunir Debussy et Ravel, c’est que tous deux sont des orchestrateurs hors pair. Chacun en effet possède une science de l’instrumentation extraordinaire. Ravel a souvent repris, d’ailleurs, des œuvres d’autres compositeurs pour les orchestrer. Il faut écouter « Les tableaux d’uneexposition » de Moussorgsky, œuvre écrite à l’origine pour le piano, et orchestrée donc par Ravel. N’oublions pas non plus qu’avant d’écrire Boléro, il voulait, pour satisfaire la commande d’Ida Rubinstein, orchestrer des pièces pour piano (Iberia) d’Isaac Albeniz. Il prenait cela comme un amusement.
A sa mort en 1937, de nombreux hommages lui furent rendus. Voici quelques citations, par ceux qui ont eu la chance de le côtoyer. On trouve parmi eux Serge Lifar, Arthur Honegger, Roland Manuel, Henri Gil-Marchex, André Suarez et Emile Vuillermoz.
« Il est aisé de distinguer sa musique de celle de Debussy. Bien que tous deux soient partis à la conquête de la même terre promise, ils y ont accédé par des voies différentes.
Il y a plus de poésie rêveuse et de feinte nonchalance dans les enchantements de Debussy, plus de magie, plus d’ingénieuse féerie et plus d’inflexible volonté, dans les sortilèges de Ravel. L’auteur de l’Heure Espagnole ne redoute pas l’ironie et le ton pince-sans-rire ».
Emile Vuillermoz, critique musical.
« Il y a aussi une précision dans l’aspect général des pièces, une netteté dans les lignes, une accentuation rythmique, une concision un peu sèche du langage, malgré un lyrisme parfois à peine contenu, qui sont propres à l’auteur de Daphnis ».
Arthur Honegger, compositeur.
« (..) Laissons le problème moral posé par l’affaire : quand il s’agissait d’art, Diaghilev ne tenait jamais compte des questions d’amour propre froissé. Dans la belle musique de Ravel, il n’avait vu…qu’une valse, et non pas un ballet, un ballet d’action : la partition ne permettait aucun développement spectaculaire et paralysait toute variété « chorégraphique ». La rupture eut donc lieu, également pénible pour les deux hommes. (..)
Les deux anciens amis étaient devenus adversaires à tout jamais. Leur réconciliation, qui eût été si utile au ballet et à la musique de ballet, n’eut pas lieu. Ravel renonça au ballet. (On ne peut véritablement pas donner ce titre à son Boléro, créé en 1928). »
Serge Lifar, chorégraphe.
« Avec les concertos, nous pénétrons rétrospectivement dans ce royaume interdit où pendant quatre ou cinq années le génie de Maurice Ravel s’est réfugié, c’est une grande chance pour les pianistes. Je leur souhaite de ne jamais s’en montrer indignes ».
Henri Gil-Marchex, compositeur et pianiste.
Voici pour finir quelques autres citations, extraites elles de cette même Revue Musicale, mais de 1923, du vivant du compositeur, ce bien avant la composition du Boléro ou des concertos.
« Si parisien qu’il soit, Ravel est le plus espagnol des artistes. Il répond mieux qu’un autre à l’idée qu’on se fait d’un grand musicien à la façon de l’Espagne : Il a du Goya et du picaresque ; il tient de la feria et de Manet ».
André Suarès, poète et écrivain.
« Il veut avant tout produire un effet sans laisser deviner son industrie. (..) Pour y parvenir, il ne s’efforcera pas d’extraire de lui même quelque étonnante nouveauté. C’est en imitant qu’il innove, car il n’a pas la prétention de créer ex nihilo. Aucune œuvre de Ravel qui n’ait été premièrement un pastiche. Il travaille « sur le motif » comme un peintre. Il s’installe devant une sonate de Mozart ou devant un concerto de Saint Saens comme un paysagiste devant un bouquet d’arbres. L’œuvre achevée, il est généralement impossible de trouver trace du modèle ».
Roland Manuel, compositeur et musicologue.
« Son orchestre a une qualité de son exceptionnelle. Sans renoncer à la soyeuse douceur du velours debussyste, l’étoffe que tissent ses archets est plus lumineuse et plus crissante. Elle est à chaque instant « lamée de broderies métalliques » d’un style imprévu et charmant.
Ravel, comme tous les musiciens de son temps, a la curiosité des sonorités exceptionnelles. (…) Il est de ceux qui interrogent curieusement les virtuoses pour surprendre leurs petits secrets de fabrication. (…)
L’orchestre est en effet pour Ravel une forêt de Brocéliande dont chaque arbre emprisonne une fée. La grande caractéristique du génie de Ravel est précisément son pouvoir féerique ».
Emile Vuillermoz.
« C’est une musique qu’il faut jouer avec son cœur mais aussi avec une lucide intelligence, celle-ci mettant ordre aux dérèglements possibles de celui-là. S’emparer de la pensée d’un compositeur, se l’amalgamer, pour la communiquer ensuite à un auditoire irrégulièrement attentif et diversement impressionnable, c’est, avec Les Miroirs et Gaspard de la Nuit, une tâche très délicate à remplir dignement » .
Voici deux nouvelles pièces originales créées à l’occasion du confinement. Composées ces derniers jours à l’attention d’instrumentistes chevronnés qui se trouvent en ce moment en Aveyron.
CV12 Tango. Sorte de joute musicale sur un tempo alerte.
CV12 Blues, entre nonchalance et emportement.
La formation est originale. Guitare classique, violon et saxhorn. Cet alliage convient parfaitement au style de musique populaire de cette mini suite. Un troisième volet est en cours. J’espère qu’il verra le jour d’ici peu. Ce n’est pas impossible, car nous ne manquons actuellement pas de temps pour nous consacrer à la musique. Autant voir le bon côté des choses !
Voici un cours d’accompagnement pour pianistes débutants. (Il va de soi que les instrumentistes confirmés trouveront d’autres formules !).
Les morceaux abordés sont la chanson Hey Jude des Beatles, la chanson Couleur Menthe à l’eau de Mitchell/Paparamandis, le chant Oh When The Saints, et pour finir un exemple de marche de septièmes, du standard Les feuilles Mortes de Prévert/Kosma. Chaque morceau aborde un sujet particulier. Il est présenté en partition, puis en vidéo.
Pour commencer, voici un exercice simple, une cadence parfaite en do majeur puis en do mineur. L’idéal est de pouvoir transposer cet enchaînement dans toutes les tonalités possibles. (Commencer en ré, en mi et en fa).
Partition.
Vidéo correspondante
La cadence plagale
Vidéo correspondante
Les accords pour la chanson Hey Jude des Beatles.
Partition pour la première vidéo
Partition pour la deuxième vidéo
Voici ensuite les deux vidéos correspondantes.
Oh When the Saints. Pour la modulation de do vers fa.
Voici pour le traditionnel Oh When the Saints. Pour le travail de la modulation de do majeur vers fa majeur. (Enchaînement C-C7-F-Fm).
Partition.
Suivi de la vidéo correspondante.
Couleur Menthe à l’eau. Les accords de septièmes de différentes espèces. Le retard.
Les accords pour la chanson « Couleur menthe à l’eau » de Mitchell/Papadiamandis. Pour le travail des accords de septièmes de différentes espèces (Septième de dominante, septième majeure, septième mineure). Au début, le retard de la tierce sur l’accord de sol.
Partition.
La vidéo qui correspond.
La marche de septième.
Voici un exemple de marche de septième, pour accompagner entre autres le morceau « Les Feuilles Mortes » de Prévert/Kosma. Les septièmes sur chaque accord sont en rouge.
Un article du 16 janvier 2019 sur ce même site traitait de la musique instrumentale pendant la période baroque. En voici en quelque sorte la suite.
A partir de la période classique vont se fixer de manière définitive des formes, des genres et des formations instrumentales. C’est en effet durant cette période que l’orchestre symphonique devient la formation que l’on connaît de nos jours, cela notamment grâce aux compositions de Haydn, Mozart, et de leurs précurseurs. Des genres comme la symphonie en quatre mouvements se fixent également. Quant aux structures musicales, on considère la forme sonate bithématique comme l’un des apanages de cette période classique.
Le présent article est une approche des origines de la forme sonate et de la symphonie. Nous verrons ensuite comment bithématisme et symphonie doivent être présentés comme une synthèse de modes de pensée et d’écriture musicale ayant fait évoluer le langage vers une expressivité maximale.
La forme sonate.
Que signifie l’expression Forme Sonate ? Il s’agit d’une forme fixe qui régit la plupart des premiers mouvements de symphonies et concertos classiques. Forme tripartite qui consiste tout d’abord à exposer plusieurs thèmes, à les développer ensuite avant de les réexposer pour conclure. Ces deux thèmes sont toujours de caractère différent. Si par exemple le premier thème est à prédominance rythmique, le second peut être à prédominance mélodique, ou vice-versa. Peut également coexister un troisième thème. Par exemple le premier mouvement du quatuor dit « Des dissonances » de Mozart est une forme sonate trithématique, correspondant à la symbolique du chiffre 3 à une certaine période de la vie du compositeur.
Il faut savoir que pendant l’ère baroque, les pièces instrumentales sont principalement basées sur un seul thème. On parle alors de monothématisme. Une idée de base régit l’ensemble de la composition, qu’il s’agisse de sonate, de concerto ou de sinfonia.
C’est durant la période pré-classique que va s’affirmer le bithématisme, dont la paternité reviendrait en partie à Carl Philipp Emmanuel Bach dans la composition de ses sonates pour violon et clavier, ou pour clavier seul. Cependant, le fait de concevoir une composition à plusieurs thèmes avait déjà été inauguré auparavant à l’état d’ébauche, par certains compositeurs comme Jean Sébastien Bach, Jean Marie Leclair ou même Domenico Scarlatti.
Ecoutons pour exemple le premier mouvement du Concerto Italien de Jean Sébastien Bach.
On peut remarquer en ce début un thème très caractérisé rythmiquement :
Puis un autre, plus mélodique.
La structure de ce mouvement peut donc s’apparenter à une forme sonate. S’apparenter seulement, car ces deux thèmes sont dans la même tonalité (le mi bémol du thème B étant tout de même un emprunt au quatrième degré si bémol). A l’époque classique, il est inconcevable que le thème A et le thème B soient tous deux dans un ton identique, et les rapports tonaux que les deux thèmes entretiennent se situent entre tonique et dominante, (cas très fréquent) ou tons relatifs (premiers mouvements de la 40eme symphonie de Mozart, et de la 5eme symphonie de Beethoven).
Pour en revenir à C.Ph.E. Bach, son plus grand mérite a été d’employer de manière assez systématique le bithématisme dans ses sonates. Dans l’exemple ci dessous, apparaissent les notions d’exposition d’une idée à la tonique, une autre à la dominante, de développement et de réexposition, dans un esprit virtuose proche de certaines sonates de Scarlatti. Le compositeur y utilise notamment le style brisé que l’on peut entendre dans Solfegietto, l’une de ses pièces les plus célèbres.
L’entrée en scène d’un second thème dans les compositions musicales est une véritable avancée vers une musique plus proche des sentiments, de l’humain. En effet la rencontre entre deux thèmes aux caractères différents peut être assimilée à une rencontre entre deux personnages antagonistes, et cette opposition ne peut être que d’essence dramatique, ce dernier terme devant être considéré dans son sens large puisqu’il vient du latin « drama » qui signifie action. Il y a action, drame, lorsque sont mises en scène des forces contraires.
Sous l’influence de l’Empfinsamkeit, (le sentiment), qui sera le mot d’ordre des fils de Bach et de leurs contemporains, les musiciens vont ainsi chercher une musique plus sensible, et les compositeurs qui suivront, Haydn Mozart et Beethoven seront les héritiers directs de ce courant pré-classique de 1740.
A propos de la sonate
L’expression forme sonate montre à quel point ce genre est important dans l’histoire de la musique. La sonate apparaît en effet comme un creuset dans lequel vont se tenter nombre d’expériences, tant dans le domaine du jeu instrumental que dans celui de l’écriture. Ainsi va se répandre cette expression dans les autre domaines instrumentaux tels que symphonie et concerto.
Evolution de la sonate pour clavier
Il faut savoir que la sonate monothématique est pensée essentiellement durant la période baroque pour un violon accompagné par une basse continue. La sonate bithématique sera elle, surtout destinée au clavier. Curieusement, la sonate pour clavier va naître en France grâce à la vogue du violon. Au début du 17eme siècle se produira en effet en France un véritable engouement pour la sonate pour violon, sous l’influence de Corelli dont la renommée s’était répandue dans toute l’Europe. De très nombreux compositeurs vont ainsi écrire des sonates qu’il sera de bon ton d’accompagner au clavecin. Mais cette partie de clavecin va se trouver de plus en plus développée, grâce notamment à François Couperin et Jean Philippe Rameau. Jean Joseph de Mondoville va quant à lui donner en 1734 des Pièces de clavecin en sonate avec accompagnement de violon. Ainsi se trouve renversé un équilibre habituel, le violon passant ainsi au second plan. Voilà qui participera notamment au développement de la sonate pour clavier. (Bien des années plus tard, le violoniste Niccolo Paganini, également excellent guitariste publiera une sonate pour guitare avec accompagnement de violon, chose assez inhabituelle qui mérite d’être signalée).
La symphonie.
Les origines.
Il est difficile de cerner avec précision les origines du genre tant elles sont diverses. Bien avant la période classique, au XVIeme siècle, le terme sinfonia désigne toutes sortes de compositions musicales, instrumentales et même vocales. C’est au XVIIeme siècle que le terme ne va plus s’appliquer que dans le domaine instrumental, et pour des formations aux effectifs très variés. Les débuts de la symphonie sont donc à chercher dans des domaines tels que l’opéra, le concerto, la suite, ou la sonate.
Dès ses premiers opéras, Monteverdi utilise des épisodes purement instrumentaux qu’il nomme sinfonia. Ces épisodes peuvent être un interlude, une ouverture ou une ritournelle, et ils sont composés pour diverses formations.
Exemple : une sinfonia extraite de l’Orfeo.
Mais peu à peu, le terme de sinfonia va s’appliquer spécifiquement à l’ouverture des opéras, ce qui va permettre son épanouissement. Cette ouverture va adopter deux schémas distincts, l’ouverture à l’italienne et l’ouverture à la française.
Dans une ouverture à la française se succèdent deux parties, la première majestueuse avec prédominance de rythme pointé, la seconde plus légère et rapide, avec un style d’écriture en imitations. Peut survenir une troisième partie, rappel de la première.
Exemple :
ouverture du Bourgeois Gentilhomme de Lully.
Une ouverture à
l’italienne est à rapprocher d’un concerto en trois parties suivant
le plan vif-lent-vif.
Exemple : une ouverture de Domenico Scarlatti. (Tolomeo ed Alessandro)
Par la suite, il fut fréquent qu’une ouverture d’opéra soit utilisée comme pièce indépendante, pour le concert, voire pour le culte, les compositeurs à cours de temps (et parfois d’idées) n’hésitant pas à se réemployer eux mêmes. Plusieurs sinfonie (pluriel de sinfonia) de Vivaldi portent ainsi le titre de l’opéra pour lequel elles ont été écrites, mais on sait qu’elle ont été régulièrement séparées du contexte qui les à vues naître.
Voici un exemple de sinfonia de Vivaldi, L’Incoranazione di Dario, suivant le plan vif-lent-vif de l’ouverture à l’italienne.
Tous ces éléments laissent entrevoir une certaine complexité dans les origines du genre symphonie. Mais on commence à comprendre comment il s’est extrait de son contexte de base pour atteindre les salles de concert.
Au seuil de la période classique, nous voyons donc la sinfonia qui commence à trouver son équilibre, avec trois mouvements qui la constituent, suivant le plan de l’ouverture à l’italienne et également des concerti pour soliste. Les compositeurs qui suivront ajouteront à ce plan un menuet en troisième place, ce qui portera à quatre le nombre des mouvements. Avec Beethoven, le menuet deviendra le scherzo. Ainsi peu à peu va se fixer le plan de la symphonie en quatre mouvements telle que nous avons l’habitude de la considérer de nos jours.
Entre 1715 et 1750 il va se composer un nombre immense de sinfonie. Peu à peu d’ailleurs, la nouvelle orthographe « symphonie » va remplacer l’ancienne. Tous les compositeurs d’Europe vont s’adonner à ce genre.
En Italie, deux maîtres se distinguent : Sammartini et Vivaldi, déjà évoqué plus haut. On peut également écouter Galuppi, Porpora, Pergolese, ce dernier concevant encore la sinfonia pour formation réduite. En France les compositeurs vont également beaucoup écrire pour l’orchestre, avec une certaine originalité. Voici par exemple comment Rebel peint le chaos originel dans son oeuvre « Les Elémens » en 1737.
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Il faut également écouter les symphonies de Mouret, à l’orchestration assez subtile donnant la part belle aux cuivres et bois.
En Autriche et en Allemagne également, de très nombreuses oeuvres orchestrales vont voir le jour. C’est à Mannheim que des symphonies seront exécutées avec une magnificence sans égale. En effet, la musique occupait dans cette ville dès 1743 une place très importante, sous l’influence du duc Charles Théodore, qui avait tout fait pour constituer un orchestre exceptionnel, dont la direction fut confiée à Stamitz, excellent violoniste et compositeur qui par ses symphonies a fini d’imposer les quatre mouvements, avec un allegro initial de forme sonate, un finale en rondo et un menuet intercalé entre le mouvement lent et le finale. C’est aussi à Mannheim que s’est fixé l’orchestre classique, avec quatuor très affirmé auquel se rajoutent bois, cuivres et percussions. Voici la symphonie intitulée « La chasse » de Stamitz.
On comprend à l’écoute de cette musique d’où viennent Haydn et Mozart. Si Haydn a pu être appelé « père de la symphonie », on constate qu’il n’en est rien, devancé qu’il a été par de très nombreux musiciens. Cependant il est certain qu’il a poussé le genre de la symphonie classique à un point extrême de perfection formelle. Comme Stamitz d’ailleurs, Haydn a composé une symphonie intitulée « La chasse ».
Il peut être intéressant de comparer brièvement ces deux pièces. Toutes deux comportent au début une introduction lente (procédé d’ailleurs assez cher à Haydn). Chez Stamitz perdure une partie de clavecin, celle ci ayant disparu avec Haydn. Passée l’introduction, le premier mouvement est basé sur un thème à prédominance rythmique. Enfin, chacune de ces deux oeuvres comporte un titre évocateur, les sonneries de chasse étant chez Haydn très évidentes dans le dernier mouvement. Il faut d’ailleurs savoir que ce finale est à l’origine l’ouverture de son opéra La fedelta premiata (la fidélité récompensée). Tout comme nombre de ses prédécesseurs, Haydn n’hésite donc pas à réintroduire dans une symphonie un matériau déjà existant.
Nous avons évoqué au début de cet article la synthèse entre forme sonate et symphonie. Comme il a été dit, cette forme est en général à la base des premiers mouvements de symphonies classiques et romantiques. En voici quelques exemples.
Le plus connu et souvent cité : la 5eme symphonie de Beethoven.
Voici tout d’abord le thème A, thème dit du destin.
Et le thème B, partagé entre les pupitres de violons, clarinette et flûte.
Bien entendu l’exemple est extrêmement connu et le citer n’a vraiment rien d’original. Il permet cependant d’appréhender très facilement cette notion de forme sonate qui peut parfois sembler un peu ardue pour des oreilles néophytes, ces deux thèmes possédant des caractéristiques bien différentes.
Il faut écouter le premier mouvement de cette symphonie en entier. L’exposition comme souvent, est dite deux fois. Lorsque Beethoven expose son thème B, il y rajoute sur la ligne de basse un rappel du thème A, comme un écho. Après l’exposition apparaîtra le développement. Seul le premier thème sera développé. Le second ne reviendra que lors de la réexposition. Il faut savoir que certains thèmes se prêtent au développement au contraire d’autres qui ne s’y prêtent pas. Ce qui est également intéressant dans cette exposition, c’est de voir à quel point les thèmes s’influencent mutuellement. En effet, tout le début, dans la tonalité de do mineur est d’un caractère farouche et tragique. Lorsque le thème B apparaît, en tonalité de mi bémol majeur (relatif de do mineur), la musique s’apaise. L’exposition de ce second thème sera suivie d’un retour au caractère très rythmique du début, mais en tonalité majeure, comme si le deuxième thème avait influencé le premier en lui conférant son apaisement. De tragique, la musique devient alors triomphale. Cet exemple peut illustrer cette idée de théâtralité dans la musique, due à la rencontre entre deux personnages musicaux antagonistes, comme cela a été évoqué plus haut. C’est la grande avancée en musique que l’on doit à l’élaboration puis à l’instauration de la forme sonate dans la musique instrumentale.
On ne peut parler de forme sonate sans évoquer Mozart. Voici une oeuvre que j’affectionne particulièrement : la 29eme symphonie en la majeur.
Le premier mouvement est basé sur les deux thèmes suivants :
Dans ce cas, le second thème est exposé dans le ton de la dominante de la, à savoir mi majeur. Comme il a été dit plus haut, il est extrêmement fréquent que les deux thèmes soient en rapport tonique-dominante.
Apparaîtra plus tard une troisième idée qui mènera à la réexposition. Le thème B sera alors donné non plus dans le ton de la dominante mais dans le ton de la majeur. Une réexposition n’est jamais textuelle bien entendu, car les thèmes doivent revenir mais enrichis par le développement dont ils ont fait l’objet auparavant.
Voici deux exemples assez parlants pour illustrer la forme sonate dans le domaine symphonique.
La symphonie est donc un genre extrêmement important de l’histoire de la musique, qui a puisé ses sources dans des origines très diverses pour rayonner durant les périodes classique et romantique. Les compositeurs de la fin du XIXeme et ceux du XXeme siècle vont également s’emparer du genre, ce qui donnera naissance à de véritables fresques sonores sous la plume inspirée de Gustav Mahler ou Dmitri Chostakovich, pour ne citer qu’eux. Cela fera l’objet d’une autre étude.
Durant ma carrière d’enseignant, j’ai souvent été amené à composer pour des orchestres de lycéens, dans le cadre de projets divers et généralement d’envergure. Ma musique a ainsi été interprétée dans des conditions souvent optimales, dans de grandes salles de concert telles que la halle aux Grains de Toulouse ou l’Arena de Montpellier, entre autres. La plupart des pièces que j’ai écrites font partie de trois comédies musicales ayant un thème commun : les aventures souvent rocambolesques de l’équipage d’un navire.
Cela commença donc en 2008 avec « La Vengeance du Bourdon », s’est poursuivi en 2012 avec « Lune et Compas », et s’est terminé en 2018 avec « La Faute aux Poètes ». Ces trois oeuvres sont le fruit d’une collaboration entre plusieurs enseignants de musique, Laurent Boyé, Régis Daniel, Jean Louis Ladagnous et moi même, chacun de nous ayant apporté sa pierre à l’édifice sous forme de chansons, d’arrangements de chansons ou d’oeuvres purement orchestrales.
J’ai eu ainsi l’idée d’extraire mes pièces pour orchestre de leur contexte et de les regrouper sous forme de suite, démarche justifiée par une certaine unité de style. Le présent article permettra donc de découvrir cette musique intitulée Suite Héroïque afin de pouvoir la proposer à des orchestres de conservatoire ou des orchestres d’étudiants, car je désire actuellement faire jouer ces pièces, dont certaines introduisent au sein d’un orchestre symphonique des instruments traditionnels tels que bombarde, biniou, cornemuse, cabrette, boudègue ou hautbois.
Les conservatoires ayant dans leurs murs des classes de musique traditionnelle peuvent être donc intéressés par cette suite dont voici les extraits, faits de quelques pages de partition et de fichiers audio.
La suite est composée de :
–Ouverture. Pour bombarde, cornemuse et orchestre.
Voici le thème de cette ouverture, joué ici par le très regretté Jean Christophe Maillard lors d’un concert à la Halle aux Grains de Toulouse en 2009.
-Fantaisie sur des thèmes populaires. Pour deux bombardes ou deux hautbois occitans et orchestre. Peut également se rajouter une cornemuse. Cette pièce est en trois parties, la première dans l’esprit de sonneries de chasse, la seconde donnant la part belle aux cordes dans un esprit viennois, et la troisième se rapprochant d’une danse scottish.
Voici l’entrée des cordes
Et le début de la danse.
-La tempête. Pour orchestre.
En voici un extrait en concert.
-Danse populaire. (An dro). Pour trois bombardes, biniou koz et orchestre.
Voici l’entrée de l’orchestre, avec les cordes.
Et le tutti.
Voici un bref extrait en concert.
-Bataille navale. Sur un rythme obstiné en mesures irrégulières.
-Combat du Kraken. La pièce la plus récente du programme. A mon sens la meilleure.
Ci-dessus un bref extrait de la partition avec l’entrée des cordes.
Il existe sur ce même site un article traitant de « La faute aux poètes » dans lequel on peut entendre cette pièce jouée en concert. Voici le lien:
-Parade finale. Pour cornemuse, bombarde et orchestre.
La musique proposée ici est dans l’ensemble d’une écriture parfois classique, parfois plus contemporaine. Elle se rapproche souvent de certaines musiques cinématographiques.
Les instruments traditionnels peuvent être remplacés par des instruments du symphonique tels que cuivres, hautbois ou bien clarinette. Le présent article est donc un support pour permettre de faire entendre ces oeuvres qui je le souhaite sauront soulever quelque intérêt.
Cette thématique concerne toute œuvre musicale faisant appel à un texte, avec ou non présence de celui-ci. Les exemples à étudier peuvent être puisés dans l’opéra, la musique religieuse, le lied (pièce vocale allemande consistant en la mise en musique d’un poème), la mélodie (équivalent français du lied) la chanson.
Dans le cas d’une absence de texte, il existe de très nombreuses œuvres pour orchestre avec support littéraire. Ce sont des œuvres de musique à programme (musique descriptive) appelées poèmes symphoniques. Parmi les plus fameux : Mazeppa, de Franz Liszt, d’après un poème de Victor Hugo, et Ainsi parlait Zarathoustra de Richard Strauss, d’après l’œuvre de Nietszche, ceci pour ne citer que deux exemples.
Cet article ne traitera en revanche que des oeuvres musicales avec présence de texte.
Il existe plusieurs manières d’illustrer un texte par la musique.
Quand un compositeur met en musique un texte, il va en souligner le sens par différents moyens.
–Rapport entre texte et ligne mélodique :
le figuralisme
Un figuralisme est une représentation, parfois au premier degré, des idées littéraires par la musique. Les figuralismes sont très présents dans la musique religieuse, l’opéra et certaines chansons. Cette notion s’est affirmée durant le 16eme siècle, notamment grâce au madrigal italien. Ce que l’on a appelé madrigalisme est en effet une imitation du mot par la musique, qui peut se faire de différentes manières:
-D’un point de vue symbolique tout d’abord. Par exemple, pour décrire le ciel, une mélodie peut monter dans l’aigu. Pour décrire la terre, elle peut descendre. En témoigne l’exemple suivant, dans le thème principal du Libera me du Requiem de Gabriel Fauré.
Comme autre exemple, on pourrait citer l’air du catalogue de l’opéra Don Giovanni de Mozart, au moment où Leporello évoque deux types de femme, la petite et la grande. « La piccina » est dit en valeurs très brèves, « la granda maestosa » en valeurs longues. Le figuralisme rajoute ici au côté burlesque de la scène.
Henry Purcell, dans une pièce intitulée Hear my prayer, (Hear my prayer oh Lord and letmy crying come unto thee : entends ma prière oh Seigneur et laisse mes pleurs venir à Toi), illustre son texte de la manière suivante:
Hear my prayer: mélodie rectotonale, supplication psalmodique.
My crying: « mes pleurs » est évoqué par une ligne torturée hésitant entre si bémol et si bécarre.
Enfin l’idée globale du texte (laisse mes pleurs venir à Toi), est évoquée par une ligne mélodique ascendante.
Ecoutons cette (trop) brève pièce dans son intégralité. L’ensemble est une polyphonie vocale à huit voix qui monte progressivement vers un climax (sommet expressif), véritable architecture sonore qui pourrait évoquer les coupoles de certains édifices religieux, qui portent toujours le regard vers le point central où siège la lumière. Cette montée progressive rend ici compte du sens global du texte.
Comme dernier exemple, restons avec Henry Purcell dans une autre polyphonie vocale, Man that is born of a woman, pièce extraite de la musique pour les funérailles de la reine Mary. Dans la seconde partie, les ténors énoncent:
He cometh up (il grandit): ligne mélodique ascendante.
And is cut down like a flower (et est fauché comme une fleur): ligne mélodique descendante.
Concernant le symbolisme musical, il va de soi qu’il en existe une infinité d’exemples. Il suffit d’en comprendre le principe pour pouvoir remarquer ce procédé dans d’autres partitions.
Dans cette pièce, l’écriture participe également à l’évocation du texte. En effet, lorsque le choeur entonne la phrase: « he fleeth as it were a shadow, and never continueth ». (Il fuit comme s’il était une ombre et ne se maintient jamais en un séjour), le contrepoint se resserre, en donnant l’impression d’une fuite perpétuelle ne trouvant sa résolution que dans l’accord final. Nous sommes ici en présence d’une métaphore musicale, qui donne un rapport très profond entre texte et musique.
La métaphore est un procédé sans doute plus abstrait que le symbolisme. Une dissonance, par exemple, peut traduire la souffrance. Pour illustrer cette idée, je propose un extrait de la cantate 137 de Bach. Aus der Tiefe rufe ich Herr zu Dir. (De l’abîme, je crie Seigneur vers toi).
Après une évocation symbolique de l’abîme, avec une ligne vocale qui part de l’aigu pour chuter vers le grave, (aus der Tiefe), l’expression « je crie » (rufe ich) est illustrée par un retard, une dissonance qui par la tension qu’elle génère va participer de manière très subtile à une évocation en profondeur du sens de ce texte.
Ce procédé se retrouve dans la pièce de Purcell citée plus haut, (Hear my prayer), avec un accord dissonant à chaque apparition du mot « crying ».
–Rapport entre texte et harmonie.
Un accord, une succession harmonique peuvent à leur tour souligner une idée littéraire. Une modulation (changement de tonalité) peut renforcer un sentiment ou une situation. L’arrivée d’un nouveau personnage sur scène, par exemple, peut être marquée par un changement de tonalité.
En voici un magnifique exemple, avec une modulation par enharmonie dans le septuor du deuxième acte de Don Giovanni. Pour résumer la scène, Leporello cherche à s’enfuir. Il trouve une porte dans l’obscurité et va pour l’ouvrir. Cependant cette porte s’ouvre sur Don Ottavio et Donna Anna. La musique va ainsi moduler de façon très surprenante de si bémol majeur vers ré majeur, modifiant totalement l’éclairage de la scène.
-Rapport entre texte et rythme.
Une mesure, une cellule rythmique peuvent également être en adéquation avec un texte. Pour reprendre le Libera me de Fauré, on trouve au début un rythme obstiné (noire-noire-soupir-noire, décomposition de ce qui pourrait être un rythme iambique, une longue suivie d’une brève) qui donne à la musique un caractère très sombre et implacable.
–Rapport entre texte et orchestration.
Une phrase jouée par un hautbois n’évoquera pas les mêmes sentiments qu’une phrase de flûte, clarinette, basson, etc.. Dans un opéra, l’orchestration tient une très grande place. Bizet, comme Mozart, associe par exemple la flûte traversière à l’idée de la séduction. Il est fréquent aussi qu’une voix aigüe se trouve doublée par un instrument grave, le contraire étant valable.
Dans cette rubrique, les modes de jeu instrumentaux sont également à considérer avec attention. Un trémolo de cordes dans un opéra sera toujours synonyme de situation tendue, d’incertitude. Des pizzicati de basses posent le discours.
Dans un opéra, l’arrivée d’un personnage marquant est généralement accompagnée par une instrumentation spécifique. Voyez par exemple la véritable trouvaille orchestrale qui marque l’arrivée du grand inquisiteur dans l’opéra Don Carlos de Verdi.
Un mélange des timbres les plus graves de l’orchestre (contrebasses, violoncelles, contrebasson et basson) sur un motif pesant de marche lente, soutenu par des accords aux trombones. La musique est ici lourde de sens, inquiétante et caverneuse, dans la tonalité de fa mineur.
-Rapport entre texte et type d’écriture. Ecriture horizontale, verticale. (Notion déjà entrevue plus haut avec la deuxième pièce de Purcell).
Prenons comme exemple une chanson polyphonique de la renaissance: La Guerre de Clément Janequin. Dans cette chanson, l’écriture peut être horizontale, verticale, très dense, plus dépouillée, dépendante du sens du texte et de ce que veut en faire comprendre le compositeur. Ecoutons les King’s Singers.
Le premier mot, « écoutez! » est tout d’abord lancé comme un appel, mélangé entre les différentes voix par une entrée en imitations dans la tonalité très claire de fa majeur. (Certaines versions de cette chanson sont en la).
Certains mots sont dits en homorythmie. « Aventuriers, bons compagnons, ensemblecroisez vos bâtons ». En jeu de réponse entre deux groupes de chanteurs et en mesure ternaire très entraînante, dynamique et d’esprit guerrier. Cette mesure ternaire se retrouvera d’ailleurs à la fin de la chanson lors de la victoire, alors que les chanteurs disent « ils sont perdus ».
« Et orrez si bien écoutez les coups ruez de tous côtés ». Les mots « de tout côtés » se trouvent répétés en écho par le groupe de chanteurs, de tous les côtés de l’ensemble vocal, dans un esprit figuraliste.
« La fleur de lys, fleur de haut prix, y est en personne », chanté par le ténor et accompagné par une polyphonie claire. Il va de soi que le compositeur cherche ici à flatter le monarque et qu’il désire que son texte soit compris, c’est pourquoi Janequin cherche ici à rendre le texte bien intelligible. La ligne mélodique est d’ailleurs à ce moment très caressante. (Dans le même ordre d’idée, il insiste aussi au début de la chanson sur les mots « du noble Roy François »).
Dans la seconde partie, le vacarme et la pagaille du champ de bataille sont rendus par une polyphonie en revanche très dense, avec de nombreuses onomatopées, imitant la charge des chevaux, les bombardes, les clairons et les armes qui s’entrechoquent.
La musique cherche à créer des images fortes. Il s’agit d’une véritable fresque sonore qui fait revivre au roi la victoire qu’il a obtenue sur les milanais à Marignan en 1515, et tous les moyens vocaux sont ici employés dans ce but.
Dans cette version, il faut apprécier comment les King’s Singers rendent la charge avant le fracas final, (sur les onomatopées « vom, vom, patipatoc »), en un accelerando qui laisse pantois. On ne peut être qu’admiratif devant tant de virtuosité et d’aisance.
Cette chanson de Janequin fut dit-on à son époque une oeuvre extrêmement célèbre. Le compositeur était, et reste toujours, considéré comme l’un des plus grands de son temps, en particulier dans le domaine de la chanson imitative que l’on peut assimiler à la chanson de gestes.
A la fin de la chanson, c’est le mot « Victoire » qui sera lancé dans le même esprit que le mot « écoutez », au début de la pièce, terminant la pièce en apothéose.
Trois liens pour davantage de précisions sur cette oeuvre:
Voici donc quelques exemples qui peuvent étayer une argumentation sur la thématique du rapport entre texte et musique. Il s’agit d’un domaine très vaste, mais dans lequel de nombreuses manières de procéder se retrouvent. A l’auditeur de pouvoir les appliquer.
Nota bene
Concernant le rapport texte-musique, il existe sur ce même site trois articles qui parlent de ce thème à travers des oeuvres précises et que l’on peut consulter grâce aux liens suivants:
La période baroque correspond dans l’histoire de la musique au développement et à l’émancipation de la musique instrumentale. En effet, de nombreux genres instrumentaux tels que la sonate, la suite de danses ou le concerto verront le jour durant cette ère qui s’étend de 1600 à 1750. Cette émancipation est due à de nombreux facteurs.
La
naissance du style concertant.
Au début du 17eme siècle s’ouvre donc en musique une ère nouvelle. Ce renouveau est en partie dû à la naissance de l’opéra en Italie. Un style va se développer que l’on va appeler style concertant (stile concertato), expression appliquée au début tant aux œuvres vocales qu’aux œuvres instrumentales. Le style concertant confère à chaque partie un rôle bien défini, contrairement aux œuvres de la renaissance dans lesquelles les différentes voix se fondent en un tout dans lequel chacune possède un rôle similaire.
Monteverdi parlera de « stile nuovo », ou style nouveau, par opposition au « stileantico », ou style ancien. Le « stile nuovo » va donner la primauté à une voix, le superius, chargée de traduire musicalement les textes poétiques. La musique instrumentale reprendra ce principe en mettant en avant une ou plusieurs lignes principales soutenues par un accompagnement fait d’une ligne de basse que l’on va appeler continuo ou bien basse continue. Sont alors posés les jalons du style musical qui va s’épanouir durant toute cette ère baroque, l’une des plus longues de l’histoire de la musique puisqu’elle durera de 1600 à 1750 (mort de Jean Sébastien Bach).
Petite parenthèse
La rupture avec le style dit ancien ne s’est pas faite de manière brutale. Le stile antico va en effet perdurer pendant la période baroque, et de nombreux compositeurs vont persister dans le domaine polyphonique à la manière des maîtres de la renaissance, notamment dans leur musique religieuse.
La basse continue
La basse continue est donc l’une des grandes innovations de la période baroque. Ce principe consiste à jouer sous la partie de superius une ligne de basse toujours instrumentale avec ou non des chiffrages permettant à un instrument polyphonique tel qu’un clavier ou un luth de réaliser les accords. Il est très rare que ces accords soient écrits par le compositeur, et ils sont laissés au soin de l’interprète. Le principe perdure encore de nos jours. Les clavecinistes que l’on entend dans les orchestres de musique baroque sont en effet rompus à la réalisation des basses chiffrées. (On retrouve d’ailleurs le même principe dans le jazz, musique dans laquelle les accords sont représentés par des lettres et des chiffres permettant aux pianistes et guitaristes de jouer les harmonies). Les accords chiffrés permettent une grande simplification de la notation. Les partitions peuvent alors être réduites à deux lignes : la partie supérieure et la partie de basse chiffrée. Il était fréquent à la période baroque que les parties intermédiaires soient de simples parties de remplissage dont le compositeur se déchargeait volontiers. Lully dans ses ouvertures d’opéra n’écrivait que le dessus et la basse chiffrée, et il laissait alors à ses secrétaires le soin d’écrire les parties d’alto (haute contre), de taille et de quinte de violon, instruments longtemps tombés dans l’oubli mais que l’on cherche à faire revivre de nos jours.
Le fait de concevoir la musique en deux plans, un dessus virtuose soutenu par un accompagnement en basse chiffrée, va permettre l’épanouissement de la mélodie, celle ci pouvant alors se développer beaucoup plus librement que lorsqu’elle est soumise à un tissu polyphonique. Cette conception permettra notamment aux instrumentistes d’augmenter leurs capacités expressives. Les violonistes par exemple, vont de plus en plus s’aventurer dans les différentes positions, accroissant ainsi leurs possibilités techniques. Répertoire vocal et répertoire purement instrumental vont alors se développer de manière bien distincte. C’est là que commence la réelle émancipation de la musique instrumentale, liée aussi bien aux progrès de la facture qu’aux progrès techniques des instrumentistes.
Différents genres de musique instrumentale durant la période baroque. Sonate, suite, concerto.
La sonate tient dans l’histoire de la musique une place à part. Il s’agit en effet d’un genre très important qui va être le creuset de nombreuses recherches et d’aboutissements dans le domaine instrumental et dans l’écriture musicale. Le terme issu du verbe « suonare » (jouer, en italien), apparaît dans la seconde moitié du 16eme siècle avec la canzona da sonar, genre instrumental inspiré de la polyphonie vocale, dont voici un exemple de Giovanni Gabrieli.
On va distinguer deux types de sonates : la sonata da chiesa (sonate d’église) et la sonata da camera (sonate de chambre, c’est à dire destinée au concert). Dans les deux genres l’on va trouver une recherche constante de virtuosité, qui correspond comme il a été dit plus haut aux progrès réalisés dans le domaine de la lutherie. Le violon, notamment, atteint à cette époque son sommet avec des luthiers comme Amati ou Maggini. Il n’a pas changé depuis.
Voici des sonates de l’un des virtuoses de cette période, le violoniste Uccellini.
La sonate pour trois violons et continuo de Gabrieli
Pour la virtuosité, voici le Capriccio Stravagante (caprice extravagant) de Carlo Farina, oeuvre à rapprocher du concerto pour soliste, objet du paragraphe suivant. On y utilise des pizzicati, des sons harmoniques et même le jeu avec le bois de l’archet. (col legno). On retrouvera ce mode de jeu bien plus tard, notamment dans la Symphonie Fantastique d’Hector Berlioz !
Le concerto
Loin de l’acceptation moderne du terme, qui désigne un instrument soliste en dialogue avec un orchestre, le terme concerto au début de l’ère baroque réfère à toute oeuvre musicale faisant intervenir des groupes d’instruments différant soit par le timbre, soit par la dynamique. Monteverdi utilise également le terme pour désigner certaines pièces vocales donnant à entendre des voix en dialogue. (Concerto « Duo Seraphim » extrait des Vêpres). Dans la première moitié du 17eme siècle, le terme « concerto » va se réduire peu à peu à la musique instrumentale. Le véritable genre ne va se fixer que vers 1680, avec les concertos (concerti serait plus juste!) de Torelli, Corelli, et enfin Vivaldi.
Quelques exemples.
Les concerti ecclesiasticci de Viadana. Oeuvres destinées à l’église.
Les Sacrae Symphoniae de Gabrieli présentent également un caractère concertant.
Le concerto pour deux violons en sol majeur de Torelli, alors que commence à se fixer le genre « concerto pour soliste ».
Un concerto pour hautbois de Corelli.
Enfin, le concerto pour quatre violons de Vivaldi.
Arrangé pour quatre claviers par Bach. Il était fréquent à l’époque baroque que des compositeurs s’inspirent mutuellement.
A l’origine pour quatre clavecins, mais j’ai toujours aimé la version pour piano ! J’ai d’ailleurs eu l’occasion de le jouer dans une version pour quatre guitares.
Revenons en à Torelli et Corelli. C’est bien à eux, représentants de l’école de Bologne que revient la paternité du genre concerto pour soliste et orchestre. Les 12 concerti op 6 de Corelli furent composés vers 1682. Il s’agit de concerti grossi dans lesquels un petit groupe de solistes (le concertino) se trouve en dialogue avec un ensemble instrumental plus fourni (tutti ou ripieno). Dans cet ensemble, le premier violon tient déjà un rôle privilégié, ce qui laisse augurer de ce que sera la suite de l’évolution du genre.
Ces concertos restent cependant étroitement proches de la sonate, da camera ou bien da chiesa. L’on va trouver des préludes, des successions de danses, et l’esprit du concerto y figure surtout dans une alternance entre des masses sonores en écho.
Avec Torelli vont se préciser à la fois les formes et styles concerto. Tout d’abord, le plan en trois mouvements (vif-lent-vif) se fixe. Dans son opus 8, Torelli compose six concerti grossi et six concerti de soliste dans lesquels un seul violon se trouve opposé au tutti. Ce dernier propose les idées alors que le soliste les développe de manière virtuose.
C’est avec Vivaldi que la forme concerto en trois mouvements va réellement s’imposer. Celui que l’on appelait « le prêtre roux » va composer près de 470 concerti dont la plupart mettent en scène des instruments solistes divers : violon, hautbois, flûte, basson ou même mandoline. Chez Vivaldi, le concerto devient plus dramatique. Les contrastes sont très marqués, notamment entre l’allegro et l’adagio central. Les premiers mouvements de concerto chez Vivaldi possèdent généralement des thèmes bien marqués, avec des contours mélodiques précis et affirmant bien la tonalité. Dans les mouvements lents en revanche, il est fréquent que le soliste développe une sorte de cantilène sur un accompagnement harmonique de l’orchestre, à la manière d’un air d’opéra. Voici un exemple avec le concerto pour deux mandolines.
Certains concertos chez Vivaldi sont descriptifs, ce qui est également une marque d’originalité. Ces oeuvres à programme comportent donc des titres tels que La Chasse, LaTempête ou pour citer le recueil le plus connu, Les Saisons.
Vivaldi a beaucoup apporté dans le domaine de la technique instrumentale, en développant la notion de virtuosité de manière assez personnelle. Pour ce qui concerne l’orchestre, il y utilise parfois toutes les cordes en unisson, en pizzicato, ou avec sourdine. Par la suite, des compositeurs comme Albinoni, Tartini ou Locatelli continueront dans cette voie.
Petite parenthèse : le concerto pour soliste supplante le concerto grosso.
Avec Torelli et Vivaldi en effet, le genre concerto pour soliste va s’épanouir à tel point que le concerto grosso va peu à peu tomber en désuétude. Cette notion d’opposition entre masse orchestrale et individu est à rapprocher de l’opéra, tant elle est d’essence dramatique. L’un des premiers compositeurs à avoir appréhendé cette dualité est Lully, qui en 1666 dans son Ballet des Muses introduisait un menuet sur basse obstinée dans l’esprit d’une chaconne, avec un violon soliste en parfait dialogue avec l’orchestre.
Vers 1700, Alessandro Scarlatti mettra en évidence la virtuosité du premier violon de l’orchestre. Voici un exemple qui mérite que l’on s’y attarde : le second mouvement de ce concerto grosso (à 1’56 »), sorte de fugato qui à un moment expose une très belle partie de violon solo. Ne pas hésiter à écouter l’intégralité de cette musique toute de grâce.
On constate ainsi que la notion de concerto pour soliste est déjà contenue en germe dans des oeuvres antérieures à Torelli. Mais c’est avec ce dernier que la distinction entre soliste et orchestre se fera de manière systématique.
Fin de la parenthèse.
Trois grands maîtres de la période baroque: Bach, Haendel et Telemann.
Avec Bach, le genre concerto va s’adapter de différentes manières. Les Suites pour orchestre sont composées dans un esprit concertant, avec présence d’une flûte soliste dans la seconde (très célèbre Badinerie en si mineur), deux hautbois et un basson dans la première. D’autre part, les suites 3 et 4 sont dans l’esprit d’un concerto pour orchestre, à la manière des italiens du début du 17eme siècle.
Le concerto pour soliste adopte chez Bach le modèle vivaldien, avec une coupe en trois mouvements et des rapports identiques entre soliste et orchestre mais dans un esprit plus contrapuntique. Voici le fameux concerto pour violon en la mineur.
Il faut également écouter les concertos pour clavecin et orchestre. Voici par exemple le très puissant concerto en ré mineur.
Chez Bach, il faut s’attarder dans les concertos sur les mouvements lents qui développent toujours une très grande poésie.
Enfin, pour une synthèse entre concerto grosso et concerto pour soliste, les six Concertos Brandebourgeois, qui constituent une véritable somme de trouvailles orchestrales, d’invention mélodique et de virtuosité.
Voici le cinquième de ces concertos, qui contient notamment une très célèbre cadence pour clavecin à la fin du premier mouvement. Dans ce mouvement, le dialogue instauré entre la flûte et le premier violon mène le jeu.
On constate à l’écoute de cette vertigineuse cadence de clavecin que la virtuosité au clavier n’est pas l’apanage des grands pianistes de l’époque romantique !
Georg Friedrich Haendel, se réservait dans ses concertos pour orgue alors qu’il tenait la partie soliste des plages d’improvisation, notamment dans les mouvements lents. Cet esprit donne à ses concertos un caractère très spontané peut être moins réfléchi que chez son contemporain Bach. Voici le concerto en la majeur.
Le concerto grosso en sol majeur
Une page très connue: le concerto en si bémol pour harpe.
Telemann est un compositeur extrêmement original, dépassant en quantité d’oeuvres ses illustres contemporains. Sa production est en effet immense, et comprend des pièces aux sonorités souvent très particulières. Voici pour écouter un concerto pour quatre violons.
Le concerto pour deux altos.
Enfin, voici le concerto Da Camera, avec une brillante partie de flûte à bec.
Tous ces exemples prouvent à quel point l’écriture instrumentale a évolué durant cette période baroque. Un article suivant traitera de l’évolution d’un autre genre important de l’histoire de la musique instrumentale : la symphonie.
Je suis depuis toujours un amoureux de la chanson française et des beaux textes. Il y a eu par le passé une pléthore d’artistes que l’on écoute encore de nos jours avec un plaisir toujours renouvelé.
Au risque de me faire taxer de passéisme, je ne trouve pas aujourd’hui la richesse qu’il a pu y avoir jadis, et il me semble que des Jacques Brel, Georges Brassens, Boby Lapointe, Charles Trenet, manquent cruellement à nos générations actuelles, dans lesquelles tout de même quelques talents émergent.
Ce préambule ne coïncide pas du tout avec le titre de cet article, c’est pourquoi je vais entrer sans tarder dans le vif du sujet, avec un des textes les plus incroyables de Boby Lapointe, « Je suis né au Chili ».
Tout d’abord écoutons ce chef d’oeuvre.
Boby Lapointe (1922-1972), ici en train d’admirer des verres à pied, est spécialiste du calembour, de la contrepèterie, du double sens et de l’alitération. Ses chansons regorgent de trouvailles. Je vous propose donc de relire le texte ci dessous, avec un commentaire entre chaque vers. Les vers sont en gras et en italique.
Premier couplet
Je suis né au Chili, maman était au lit et mon papa auchi
« Chi » au lieu de « si » : astuce qui permet une inversion de syllabes doublement comique
Mais il n’y resta pas car maman le tapa et papa s ‘épata
Contrepèterie. Double sens des syllabes « ta-pa ».
Il lui dit le fait est que nous allons fêter l’enfant que je t’ai fait
Même principe que dans le vers précédent.
Il but tant de pots tôt qu’il buta à un poteau et typez le topo.
Encore le même principe
Maman dans le moka papa dans le coma et moi né commako
Contrepèterie moka-coma, et le mot « commako » (comme ça en argot) réunit le tout
Tout noué tout ténu tout menu et tout nu né tout nu ça nous tue.
A relire plusieurs fois pour bien comprendre les astuces. Alitérations dignes d’une autre chanson de Lapointe : « Ta Katie t’a quitté ».
Car de mon corps palot le soleil bouffait la peau sans vous belle Paula
Même principe qu’au dessus. Double contrepèterie : palot-la peau-Paula
Qui de vos mains de fée en cette fin de mai me graissâtes le dercheme.
Me graissâtes.. Ah le passé simple.. Quand on pense que l’on veut en supprimer l’étude à l’école ! (Le dercheme : l’arrière train en argot). Apprécier la contrepèterie « mains de fée-fin de mai ».
Et je veux rendre à ma façon
Grâce à votre graisse à masser
Votre saindoux pour le corps c’est
Votre sein doux pour le corset
Ce que mes vers pour l’âme sont
Mes vers pour l’hameçon (facile à comprendre mais je le mets quand même car c’est génialement trouvé)
De tout ce qu’à ma peau me fîtes (pommes frites)
Combien fus-je épaté de fois (…)
Combien à vous qui m’épatâtes (incroyable passé simple une fois de plus).
Mon bon petit coeur confus d’oie (confit d’oie).
Second couplet
Absolument pas liée à vos voisins de palier mais m’entendant piailler
Belle astuce de texte
A poil sur la terrasse sans chapeau tête rase sans que je m’arrêtasse
Très fort : le subjonctif du verbe arrêter réalise la contrepèterie.
Enjambant le balcon en un radical bond vous traitâtes d’un saleton
Un saleton : un coup de pied en argot
Ma mère dans le moka mon père dans le coma qui me laissaient commako
Déjà vu
Sortant je ne sais d’où un morceau de saindoux vous massâtes soudain
Même principe qu’au dessus. Pour ce qui suit, mieux vaut être attentif pour saisir tous les jeux de mots :
Ma peau piètre de vos froids doigts sans rides vos belles mains c’est de vos si
-Ma paupiette de veau- -foie d’oie- -ris de veau- -émincé de veau-
Jolies phalanges ouatées que vous m’avez ôté au citron et aux miches, oui
-langes ouatés- -thé au citron- -méchoui-
La douleur qui en douce n’avait sauté qu’aux s’cousses étranges de vos frictions
-navets sautés- -couscous- -tranches de veau-
(en espérant n’avoir rien oublié..)
De tout ce qu’à ma peau me fîtes, etc.……………….
Voici un texte que l’on devrait apprendre à l’école!
Ne pas hésiter à écouter avec attention l’intégrale de Boby Lapointe. Chaque mot, chaque phrase peut cacher une trouvaille.
Brassens admirait beaucoup Boby Lapointe. Il lui a fait à sa mort un hommage très émouvant. Quant à Francis Blanche il en aurait dit:
« De nous tous, c’est ce gars là qui restera ».
Pour Brassens
Il existe un site très intéressant sur lequel je vais souvent, et qui concerne Georges Brassens. Chaque chanson y est expliquée avec toutes ses références de manière brillante. Voici le lien: